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Les entreprises subventionnées par des Etats tiers, nouvelle cible de Bruxelles

La Commission Européenne cherche à réparer un vide juridique en proposant un nouvel instrument visant à remédier aux distorsions de concurrence potentielles causées par des entreprises non-européennes bénéficiant de larges subventions étatiques. C’est une nouvelle étape pour l’Union Européenne (UE) qui confirme le virage en cours vers l’autonomie stratégique et la souveraineté européenne et qui pointe du doigt les ambitions chinoises sur le Vieux Continent.

C’est un véritable tournant qu’a amorcé la Commission Européenne ce mercredi 5 mai 2021, en cherchant à développer ce nouvel instrument. A l’inverse des pays-membres, les subventions accordées par des pouvoirs publics de pays tiers à des entreprises non européennes ne sont pas soumises à des contrôles.  Celles-ci peuvent être caractérisées sous différentes formes : prêts à taux zéro, des subventions financières directes, des garanties d’Etat illimitées, des financements à perte… Une situation entraînant un profond déséquilibre, que souligne Margrethe Vestager, commissaire à la concurrence : « L'ouverture du marché unique est notre principal atout, mais elle doit s'accompagner d'une certaine équité. Il est important de garantir des conditions de concurrence égales en ces temps difficiles, afin de soutenir la reprise de l'économie de l'UE. »

La Commission cherche à introduire trois mesures de contrôle. La première est un outil qui permet l’examen des concentrations lorsque le chiffre d’affaires dans l’UE est égal ou supérieur à 500 millions d’euros et que la contribution financière étrangère est d’au moins 50 millions d’euros. La deuxième est un outil qui examine les offres soumises dans le cadre de marchés publics lorsque la valeur de ce marché est égale ou supérieure à 250 millions d’euros. Enfin, le dernier outil permet l’examen sous la propre initiative de la Commission de marchés publics de plus faibles valeurs. Concernant les mesures correctives pouvant être établies, le texte prévoit une cession de certains actifs ou encore l’interdiction de l’attribution de marchés à des entreprises subventionnées.

Ce texte répond aux conclusions émises par le Conseil Européen en 2019 et celles du rapport sur la politique de concurrence du Parlement Européen en février 2020. Si le texte n’est pas encore en vigueur et a besoin d’être ratifié, ces mesures soulignent un changement de paradigme au sein des instances européennes, qui vise à protéger les actifs européens des prédations extérieures, à l’image de l’exclusion de certains pays de programmes de recherche de l’Union.

Bien qu’elle ne soit pas citée dans le texte, la Chine est la principale cible, dans un contexte de refroidissement des relations après l’accord sur les investissements conclu fin décembre entre Bruxelles et Pékin ; accord n’ayant toujours pas été ratifié et mis en suspens. Pékin, en réponse, a appelé l’Union à ne pas mettre en place un environnement discriminatoire pour ses entreprises. Les Etats-membres sont partagés sur la question, entre inquiétude de la concurrence déloyale et volonté de préserver des liens privilégiés à l’image de l’Allemagne.

 

Thibault Menut

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