Emplacement stratégique pour les flux maritimes sortant de la mer Rouge et point d’étape des nouvelles routes de la soie, Djibouti souhaite pérenniser les ressources financières issues de sa situation géographique et de son complexe portuaire, par la création d’un fonds souverain.
Dans le cadre de la mise en œuvre du plan Vision Djibouti 2035 lancé en 2014, le président djiboutien vient de promulguer le 24 juin le décret d’application de la loi créant le Fonds Souverain de Djibouti (FSD) votée trois mois plus tôt. Alimenté dans un premier temps par une partie des revenus liés aux locations de bases militaires, à l’exploitation des zones franches et à une holding étatique déjà spécialisée dans les investissements régionaux (Great Horn Investment Holding), le FSD doit bénéficier d’une injection d’1,5 milliard de dollars sur 10 ans. Misant sur le long terme, il a vocation à réinvestir ses gains dans des projets nationaux ou situés dans le Corne de l’Afrique, en ciblant particulièrement les secteurs des télécoms, de l’énergie, des infrastructures et nouvelles technologies, de la logistique et de l’agriculture.
Avec ce nouveau fonds, le Djibouti concrétise son ambition de devenir le Singapour de la Corne. Reconnaissant exploiter cette opportunité lors des négociations internationales, cet Etat se lance ainsi dans la diversification de ses revenus tout en se donnant les moyens de mener un début de stratégie d’influence régionale. Pour cela, Djibouti s’appuie sur son positionnement géographique, qui en fait à la fois une porte d’entrée vers l’Afrique (notamment l’Ethiopie, en pleine croissance) et une escale majeure entre la mer Rouge et l’océan Indien, qui voit transiter les flux maritimes en provenance ou à destination d’Asie. La Chine, qui a cerné l’intérêt de cette position stratégique en l’intégrant dans sa Belt and Road Initiative, a d’ailleurs investi dans le développement de ses infrastructures portuaires et ferroviaires en échange d’une nouvelle base militaire établie en 2017, érodant rapidement les parts de marché et l’attractivité locale de la France.
Louis-Marie Heuzé