Tensions entre l’Argentine et la France autour d’un contrat pour quatre patrouilleurs

Depuis fin septembre, des tensions entre l’Argentine et la France semblent se développer. La cause de cette (mauvaise) évolution des rapports serait l’annulation potentielle, par Buenos Aires, d’un contrat de 360 millions d’euros environ promis à Naval Group.

En mai 2016, un appel d’offre est émis par l’Argentine, afin de doter sa Marine nationale de quatre nouveaux patrouilleurs. Souhaitant un contrat inter-étatique, cet appel d’offre n’est ouvert qu’aux entreprises publiques. C’est donc tout naturellement que Naval Group se positionne et fini par remporter l’appel d’offre à la fin de l’année 2016, face à deux rivaux espagnol (Navantia) et chinois (China Shipbuilding Industry Corporation).

L’appel d’offre remporté et l’accord du président argentin Mauricio Macri obtenu, le contrat commercial est négocié. Une entente est trouvée en juin 2017 et le contrat est envoyé au ministère de la Défense français afin qu’il suive le processus administratif. Un changement de ministre de la Défense le 14 juillet va ralentir le processus mais finalement, fin août, l’accord final aboutit, le contrat est prêt à être signé.

C’est à partir de ce moment que les choses vont se compliquer. En effet, reconnaissant la victoire de Naval Group, les argentins vont cependant avouer étudier une offre moins chère : celle de l’espagnol Gondan, un petit chantier naval. Ce dernier est entré en relation avec Federico Ramon Puerta, ambassadeur argentin en Espagne pour que celui-ci, proche du président argentin, intercède en la faveur du petit constructeur espagnol qui est nettement moins cher que l’entreprise française (50 millions).

Parallèlement, un dossier agricole aurait également contribué à tendre les relations. Une coalition franco-allemande des producteurs de colza aurait fait pression pour empêcher la réouverture du marché européen au biodiesel argentin en menaçant notamment de déposer une plainte auprès de l’OMC. Ceci n’aurait pas plu au président Mauricio Macri. Assisterait-on à un désir de vengeance ?

Il semblerait que malgré une situation compliquée, la volonté de trouver une solution et d’éviter la crise est réelle, comme en témoigne les nombreux échanges entre les ministères des deux pays. De plus la France semble toujours bien positionnée pour vendre ses patrouilleurs OPV 90. La Marine argentine souhaite réellement des bateaux français. Naval Group jouit en effet d’une très bonne notoriété et la qualité de ses navires n’est plus à démontrer. En outre, l’appel d’offre notifiait clairement que l’entreprise qui fournirait les bateaux devrait être une entreprise nationale, ce que n’est pas le cas du chantier naval Gondan. Dès lors, Naval Group pourrait se retourner contre l’Argentine sur ce point précis.

La seule solution serait pour l’Argentine de lancer un nouvel appel d’offre auquel pourrait répondre l’entreprise espagnole. Cependant, ce stratagème serait considéré comme une rupture unilatérale par la France. Les argentins oseront-ils se fâcher avec Paris ?

François Dumeyniou