Dans un environnement économique globalisé et hautement concurrentiel, les entreprises doivent innover en permanence pour maintenir leur avantage compétitif. L’intelligence économique (IE) joue un rôle important dans ce processus, en fournissant les informations stratégiques nécessaires pour prendre des décisions éclairées. Lorsqu’elle est appliquée dans les directions des ressources humaines (DRH), l’IE permet aux organisations de gérer plus efficacement leurs talents, d’anticiper les tendances du marché du travail, de se protéger contre les menaces internes et externes, tout en explorant les dimensions offensives et défensives de l’IE dans les RH.
Nécessité d’une implication stratégique globale
Rôle du DRH et de la Direction Générale dans l’Intégration de l’Intelligence Économique
Pour que l’IE soit pleinement intégrée aux ressources humaines et apporte une valeur ajoutée significative, il est essentiel que la Direction Générale (DG) et la Direction des Ressources Humaines (DRH) soient activement impliquées, pour une collaboration efficiente afin de développer et mettre en œuvre une politique d’intelligence économique globale. Cette synergie garantit une couverture complète de tous les aspects stratégiques de l’entreprise.
Politique d’IE à 360 Degrés
Une politique d’IE à 360 degrés implique une approche holistique, intégrant l’intelligence économique dans tous les aspects de l’entreprise. Pour mettre en œuvre cette approche, il est important que toutes les directions, y compris les ressources humaines, la finance, le marketing et la recherche et développement, collaborent pour partager informations et insights pertinents. De plus, une cartographie des risques doit être réalisée de manière collective afin d’identifier et de prioriser les risques, qu’ils soient externes (économiques, concurrentiels, technologiques) ou internes (conflits, insatisfaction des employés, fuites de talents).
En favorisant une culture d’intelligence collective, où les employés sont encouragés à partager leurs connaissances et leurs idées, l’entreprise peut mieux anticiper et répondre aux défis et opportunités. L’objectif ultime de cette approche est de créer une organisation résiliente et proactive, capable de naviguer efficacement dans un environnement concurrentiel en constante évolution, tout en assurant la satisfaction et l’engagement de ses employés.
Communication interne un pilier central de l’IE
La communication interne est essentielle pour assurer une compréhension et une adoption efficaces des pratiques d’IE au sein de l’entreprise. La DRH se doit de collaborer étroitement avec les départements de communication pour informer les employés sur l’importance de l’IE, et les former aux meilleures pratiques. Par exemple, des sessions de formation régulières et des ateliers peuvent être organisés pour éduquer les employés sur la sécurité des données (cybersécurité) et la confidentialité.
Il serait judicieux de favoriser une culture de transparence où les employés sont encouragés à partager leurs idées et leurs préoccupations. Cela peut être réalisé grâce à des canaux de communication ouverts, tels que des forums internes, des newsletters et des réunions régulières avec la direction. Additionnée par la mise en place des mécanismes de feedback continu permet de recueillir les opinions des employés et d’ajuster les stratégies en conséquence. Comme des enquêtes de satisfaction régulières et les entretiens individuels peuvent aider à identifier les problèmes et à prendre des mesures correctives, assurant ainsi un environnement de travail harmonieux et productif.
Approche offensive de l’IE dans les RH
Nouveaux métiers émergents RH intégrant l’IE
Les nouveaux métiers RH qui intègrent l’IE reflètent efficacement le croisement et le renforcement de ces deux disciplines pour répondre aux défis modernes des entreprises. Le Data analyst RH, par exemple, utilise des données pour aider la DRH à prendre des décisions éclairées en matière de gestion des talents, en analysant des informations sur le recrutement, la rétention, la performance et la satisfaction des employés afin d’identifier des tendances et des opportunités d’amélioration. Le marketing RH combine les techniques de marketing avec les pratiques RH pour attirer et retenir les talents, créant des stratégies pour promouvoir la marque employeur, améliorer l’expérience des candidats et des employés, et renforcer l’engagement des talents. Cette passerelle opérationnelle entre RH et Marketing devient plus efficiente. La démarche de prospective RH, selon Régine Monti, inclut la constitution d’une base d’information rétro-prospective, l’exploration des futurs possibles via des scénarios, et l’articulation à l’action pour identifier les impacts sur les métiers et compétences.
Néanmoins, en utilisant les outils d’IE, les entreprises pourraient tendre vers de nouveaux métiers comme la prospective d’intelligence RH, qui se concentrerait sur l’anticipation des tendances futures en matière d’emploi et de compétences, en utilisant des analyses de données, des études de marché et des prévisions économiques pour planifier les besoins en talents à long terme. De plus, le domaine de la carrière et du développement des talents s’attacherait à créer des parcours de carrière clairs et attrayants pour les employés. En anticipant et en développant des programmes de formation (grandes écoles, universités au niveau national et international), des opportunités de mentorat et des plans de succession, les entreprises s’assureraient que les employés disposent des compétences nécessaires pour évoluer au sein de l’organisation. Ces rôles démontreraient comment l’IE pourrait être intégrée dans les pratiques RH pour renforcer les capacités de l’organisation à anticiper les défis et à saisir les opportunités.
Veille concurrentielle et benchmarking
La veille concurrentielle permet aux entreprises de surveiller les politiques et pratiques RH de leurs concurrents pour rester attractives. Par exemple, Google utilise des plateformes de veille pour analyser les tendances en matière de compensation et de bénéfices dans le secteur technologique. Cette pratique permet à Google de maintenir ses avantages compétitifs en matière de recrutement en offrant des packages de rémunération et des avantages sociaux alignés sur les attentes des meilleurs talents.
Communication externe et gestion de la marque employeur
La communication externe joue un rôle fondamental dans la gestion de la réputation de l’entreprise notamment dans sa stratégie d’attractivité des talents. Afin que cette dernière soit efficace, l’utilisation efficiente des médias sociaux est indispensable pour promouvoir la marque employeur.
Microsoft a acquis Linkedin en 2016 et a renforcé sa stratégie d’attractivité, en optimisant sa communication externe, grâce aux témoignages d’employés, offrant ainsi un aperçu authentique de la vie au sein de l’entreprise. Cela met en exergue les opportunités de carrière disponibles ainsi que le bien être au travail. Cette acquisition a permis à Microsoft de bénéficier d’une plateforme pour attirer des talents et développer sa culture d’entreprise, tout en lui procurant un avantage concurrentiel. De plus, Microsoft utilise des données issues des réseaux sociaux et des sites d’évaluation des employeurs pour ajuster ses stratégies de recrutement et de rétention. En surveillant les avis et commentaires des employés actuels sur des plateformes comme Glassdoor et LinkedIn. Microsoft peut identifier les aspects positifs et négatifs de sa marque employeur et apporte des modifications nécessaires pour l’améliorer, développant ainsi une image positive et engageante.
La gestion de crise est un autre aspect important, puisqu’il est indispensable d’avoir des plans de communication en place. Afin de gérer les crises et minimiser les dommages réputationnels. Notamment, en cas de violation de données, il est essentiel de communiquer rapidement et ce, de manière transparente avec les parties prenantes, pour maintenir la confiance. Fournir des informations précises et opportunes permet notamment d’éviter la désinformation et rassurer les parties concernées, sans que l’image de l’entreprise ne soit ternie.
L’Oréal, Dassault Systèmes et Airbus : 3 Stratégie de mise en concurrence des écoles pour un recrutement innovant
Maintenir des relations entre les institutions académiques et les partenaires industriels s’avère alors intéressant pour favoriser les collaborations et entretenir leur vivier de talents. L’Oréal, Dassault Systèmes et Airbus ont par exemple mis en place des stratégies novatrices de recrutement en s’appuyant sur des partenariats avec des institutions académiques. Ils mettent en concurrence différentes écoles pour attirer les meilleurs profils susceptibles de répondre au mieux aux différentes problématiques actuelles et futures.
L’Oréal utilise le programme L’Oréal Brandstorm afin de recruter les meilleurs talents pour ses programmes de développement, en offrant aux participants l’opportunité d’innover dans le domaine de la beauty-tech. Cela permet aux étudiants de développer leurs compétences entrepreneuriales et créatives.
Dassault Systèmes organise des hackathons pour repérer des talents innovants et renforcer les compétences internes, notamment en matière de développement durable. Ces événements permettent à l’entreprise de collaborer avec les étudiants de l’Institut Polytechnique de Paris et du réseau européen BEST Ingénieurs-conseils pour développer des solutions créatives et technologiques, dont l’intelligence artificielle et le big data.
Airbus a lancé le programme Airbus Academic Programme (AAP) en collaboration avec l’Université de Stuttgart, visant à renforcer la coopération en matière d’éducation et de recherche, lors du Salon du Bourget en 2023 . De plus, Airbus a signé un partenariat solide avec la National University of Singapore (NUS) pour développer un pipeline de talents global dans les domaines de l’aviation, de la défense et de l’espace. L’objectif étant de cartographier et favoriser les compétences nécessaires, en offrant un spectre plus étendu dans les efforts de recrutements. Par ailleurs, Airbus organise divers événements de carrière à travers le monde, tels que des salons de l’emploi et des conférences en ingénierie aérospatiale à Londres, Paris et Barcelone, offrant aux étudiants et jeunes professionnels des opportunités de « réseautage » et de découverte des carrières chez Airbus.
Jonathan Chaste
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