Alors que la flotte mondiale est appelée à doubler à l’horizon 2030, 30 000 aéronefs , le secteur devra répondre à des contraintes écologiques de plus en plus sévères. La réduction de la consommation de carburants et des émissions de CO2 devient un nouvel enjeu concurrentiel.
Le 13 octobre 2011 , Air France à réalisé son premier vol « vert » entre Toulouse et Paris, utilisant à part égale du biokérosène et son équivalent fossile. Bien que ce ne soit pas une première mondiale, cet essai correspond à la mise en place d’une stratégie à long terme qui concerne tous les acteurs du secteur aérien : la diminution des émissions de CO2. Nombreux sont en effet les incitatifs qui poussent le secteur aéronautique dans cette voie : fluctuation du prix des énergies fossiles, gain d’image auprès des consommateurs, taxation à partir de 2012 sur le marché européen via les crédits carbone. Encore récemment une économie de niche, l’aviation « éco-responsable » est en passe de devenir une norme dans le secteur.
La principale solution développée jusqu’ici pour réduire l’impact environnemental des trajets aériens consiste à « compenser » les émissions carbones via un don à un organisme menant une action environnementale (reforestation…). Si certaines micro-compagnies tiennent compte du bilan carbone dans le prix des billets, la règle demeure l’engagement personnel du voyageur.
Les compagnies d’envergure internationale sont, elles, en train de mettre au point une réponse technique plutôt que financière pour diminuer leurs bilans carbone.
Prévoyant, grâce au mix biokérosène-kérosène, une baisse des gaz à effet de serre de 11.000 tonnes par an sur les vols de la Navette, Air France mise à terme sur une réduction de 135.000 tonnes pour ses long-courriers vers l’Amérique par le même moyen.
Engagée dans une démarche analogue, la compagnie allemande Lufthansa a annoncé en juillet 2011 l’utilisation de 50% de biocarburant sur la ligne Hambourg-Francfort, escomptant réduire de 1.500 tonnes les émissions de CO2 de cette ligne en l’espace de six mois. Visant à inclure entre 5 et 10% de biocarburant dans sa consommation totale à l’horizon 2020, l’entreprise de Cologne déplore toutefois l’insuffisance actuelle des capacités de production de ce nouveau type d’énergie.
Coopétition euro-américaine
D’autres leviers existent néanmoins pour parvenir à réduire les émissions de gaz à effet de serre : l’optimisation du plan de vol, et les progrès technologiques sur les avions eux-mêmes.
Partenariat euro-américain, le programme AIRE (Atlantic Interoperability Initiative to Reduce Emissions) consiste à mettre en place des deux côtés de l’Atlantique une gestion améliorée des différentes phases du trajet aérien : depuis la montée des passagers dans l’avion jusqu’à leur descente, en passant par les procédures de roulage et de vol.
Dans le duel constant auquel se livrent Airbus et Boeing, le développement de nouvelles motorisations joue un rôle de plus en plus prépondérant. Prévu pour une commercialisation en 2015, l’A320 NEO (New Engine Option) permettra de réduire la consommation de carburant de 15% et les émissions d’oxydes d’azote de 10%. Cette version a reçu une quantité record de commandes (plus de 1.200, engagements compris), dont celle d’American Airlines, qui s’était engagée depuis 1996 à n’acheter que Boeing, patriotisme économique oblige. Menacé, Boeing réplique avec le 737 Max, nouvelle version de son best-seller, lui aussi doté de nouveaux réacteurs, mais qui ne sera commercialisé qu’en 2017.
A très long terme, le secteur aérien se prépare à accueillir des aéronefs qui prendront en compte, dès leur conception, les nouvelles contraintes environnementales. Présenté par EADS au salon du Bourget 2011, le projet « ZEHST » , pour « Zero Emission High Speed transport », se veut le Concorde écologique du futur (2050). Bien que réservé à un marché spécifique, celui des voyages d’affaires, ce programme est révélateur de la réflexion entreprise par l’avionneur pour allier respect de l’environnement et vitesse supersonique.
Simon Bourdet et Pierre Poullaouec