Protection du secret des affaires: retour sur la Conférence organisée par le SYNFIE

Le 16 juillet 2014, la Présidence de l’Assemblée Nationale a enregistrée une nouvelle proposition de loi sur le secret des affaires. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois de l’Assemblée Nationale et Claude Revel, Déléguée Interministérielle à l’Intelligence Economique, ont défendu l’ambition de ce projet lors de la conférence du 02/12/2014, organisée par le Syndicat Français de l’Intelligence Economique.

Les changements et mutations du monde économique contemporain sont largement expliqués par la multiplication des flux d’informations. Aujourd’hui, l’abondance et l’internationalisation de l’information  dessinent une évidence: il devient indispensable pour les entreprises de protéger leur capital informationnel. En effet, l’innovation et l’information stratégique sont essentielles au fonctionnement et au développement des entreprises. Les Etats-Unis l’ont bien compris: l’adoption du « Uniform Secret Trade Act » en 1987, puis du « Cohen Act » en 1996 en sont la démonstration.

Pour Claude Revel (D2IE), cette proposition de loi permet de répondre à cette dynamique internationale : son objectif est d’éduquer, de dissuader et de punir. Jean-Jacques Urvoas le répète : il s’agit d’éduquer les entreprises qui, pour beaucoup d’entre elles, n’ont pas conscience des menaces qui pèsent sur elles, de dissuader les malfaiteurs et de les punir si nécessaire.

En particulier, la proposition de loi a essayé de porter ses efforts sur les points suivants :

  • Face aux nouvelles modalités de la vie économique, la norme s’est muée en un instrument concurrentiel. La proposition de loi sur le secret des affaires entend donc doter les entreprises françaises d’outils juridiques permettant de protéger leurs intérêts.
  • La notion de secret des affaires nécessite une délimitation juridique. En effet il n’en existe aucune définition officielle bien que de nombreux textes de lois y fassent référence. Une telle carence laisse trop de place à l’interprétation, bafouant trop souvent la nécessité de créer une stabilité juridique indispensable à la vie des affaires.
  • Une approche complète articulant la voie civile et la voie pénale. Il était nécessaire d’adopter un cadre civil comme le préconisait le Conseil d’Etat dans son avis du 31 mars 2011 sur un projet de loi relatif au secret des affaires. L’approche civile, associée à une approche pénale, permet de remédier à plusieurs carences qui ont conduites à l’échec de la précédente proposition de loi du député Carayon.
  • Cette proposition de loi sur le secret des affaires permet enfin de devancer et d’amplifier la transposition de la future directive européenne relative à « la protection des savoir-faire et des informations non divulguées contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicite ».

En définitive la proposition de loi présentée par Jean-Jacques Urvoas et Claude Revel  lors de la conférence organisée par le SYNFIE a pour objectif de doter les entreprises françaises des leviers leur permettant de faire face au nouvel environnement concurrentiel international. Mais avant qu’elle puisse « éduquer » les entreprises, il s’agira également «d’éduquer» l’Assemblée Nationale et le Sénat sur la problématique du secret des affaires, afin que la proposition de loi puisse être votée en 2015.  Afin de garantir son adoption, il semblerait que l’on se dirige vers l’incorporation des différents articles au sein de la grande loi Macron qui devrait être proposée prochainement. Si cet arbitrage fait preuve de pragmatisme, il est dommage que cette révolution conceptuelle dans « la culture française de l’information » ne puisse faire l’objet d’un temps politique et communicationnel plus spécifique.

Guillaume Meyer et Hugo Lambert

Pour aller plus loin:

“Le secret des affaires, impératif juridique dans la compétition économique”

“Le droit de l’intelligence économique et stratégique : de la reconnaissance à l’affirmation”

“Le droit, l’autre champ de bataille de la guerre économique”