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La force militaire chinoise : la réalité et sa stratégie

Compte-rendu du 69ème séminaire IE qui s’est tenu à l’Ecole de Guerre Economique le 13 octobre 2014, accueillant Yoshiaki Yano, major général retraité de l’armée de terre japonaise depuis 2006, actuellement professeur à la Japan University of Economics.

Disputes territoriales, dépenses militaires en hausse constante, ce 69e séminaire IE organisé par l’Ecole de Guerre Economique était l’occasion pour Yoshiaki Yano de revenir sur l’un des grands questionnements géopolitiques de notre ère : qui est la Chine et que veut-elle ?

M. Yano a effectué de nombreuses  recherches sur la Chine durant son parcours. Il nous livre ici une analyse dynamique de la stratégie militaire chinoise.

Historiquement, la Chine  est la région la plus militarisée du monde : un tiers des guerres de l’humanité  s’est produit sur ces terres. Lorsque Deng Xiaoping était au pouvoir (1978-1992), l’objectif principal était la croissance économique et la modernisation de l’appareil militaire chinois. Aujourd’hui, dans cette lignée, la vision hégémonique de la Chine entraîne le pays à adopter une stratégie d’expansion militaire et de récupération des territoires, notamment maritimes. M. Yano nous en donne un exemple marquant : le conflit japonais sur les îles Senkaku/Diaoyu. La Chine revendique aujourd’hui ces territoires au nom d’une appartenance historique, en dépit de leur rachat par le gouvernement japonais en 2012.

Ainsi, pour atteindre ses objectifs, la Chine associe aujourd’hui les moyens à la volonté : le budget de la défense chinoise a considérablement augmenté ces dernières années et pourrait même dépasser celui des Etats-Unis d’ici à 2020. M. Yano remarque que la force chinoise devient plus offensive : la Chine investit massivement dans des outils de nouvelle génération tels que des missiles balistiques longue portée, des satellites et des instruments de guerre électronique. Selon les spécialistes américains, les investissements réalisés serviraient en outre à la mise en œuvre de la stratégie Anti-Access/Area Denial (A2/AD) permettant le déploiement hypothétique de forces navales le long de deux chaines d’îles englobant le Japon et l’ensemble des îles Senkaku et Nansei.

C’est pourquoi si la stratégie A2/AD se renforce, les forces américaines auront de plus en plus de difficultés à intervenir. Selon M. Yano, le Japon doit donc se développer diplomatiquement et militairement afin d’acquérir une certaine autonomie. Tout d’abord par l’augmentation du montant alloué aux forces d’autodéfense, le renforcement des mesures contre les guerres asymétriques mais aussi le développement d’une véritable culture du renseignement militaire aujourd’hui absente.

Cependant, l’armée japonaise souffre toujours de carences depuis que le Japon a vu son système de défense détruit après la seconde guerre mondiale. L’armée japonaise pâtit toujours d’une mauvaise image dans l’opinion publique et reste marginalisée. Par exemple, en ce qui concerne la mobilisation des effectifs, 1% de la population d’un pays doit être prête à être mobilisée or le Japon n’est aujourd’hui qu’à 1/3 de ce ratio.

Une solution complémentaire peut ensuite être trouvée dans l’ouverture du pays vers l’extérieur. M.Yano enjoint le Japon à se tourner davantage vers l’OTAN, les pays amis de l’Asie-Pacifique, les pays européens, voire même la Russie malgré les différends territoriaux qui empêchent encore un rapprochement diplomatique entre les deux pays.

Pour autant, selon M.Yano, les mentalités changent de manière positive et le gouvernement Abe prend les mesures adéquates pour faire face à l’insécurité grandissante dans la région. Cependant, face à l’expansion militaire chinoise, la route est encore longue pour le pays du soleil levant.

Guillaume Meyer et Elodie Le Gal