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L’Intelligence Economique, une nouvelle approche pour la gestion des Ressources Humaines

Les 7 et 8 octobre dernier se tenait l’édition 2014 du congrès HR (Human Ressources). Le cœur du sujet cette année était la mutation digitale. Des DRH de grands groupes se sont ainsi réunis pour évoquer les éventuelles transformations du pôle Ressources Humaines générées par le développement de la digitalisation au sein des entreprises.

Indéniablement, la transformation digitale est aujourd’hui un facteur de compétitivité. Face aux données et informations qui explosent, des services en ligne tels que SAAS et autres bases de données relationnelles apparaissent en grand nombre. La mutation numérique devient dès lors une clé de la stratégie des entreprises pour prendre de meilleures décisions et ce le plus rapidement possible.

Les RH, fonction support, se voient imposer ces changements et s’interrogent sur leur participation à la stratégie numérique ainsi que sur leur activité numérique directe. L’information étant au cœur de cette stratégie, on peut alors se demander en quoi l’intelligence économique pourrait renforcer le pouvoir des RH confrontées à cette révolution globale et permanente des usages et des pratiques dans les entreprises ?

L’exemple de Google, qui a su modéliser le traitement de ses informations en interne, montre qu’il est possible de faire de l’IE un outil renforçant le pouvoir des ressources humaines au sein de l’entreprise.

Google : la gestion de l’information et l’homme au cœur  de son modèle RH

Ce n’est pas une surprise ! La réussite de Google est attribuée en majeure partie à la gestion de son capital humain. Les pratiques RH sont innovantes et originales, basées sur la modélisation des comportements grâce à son laboratoire du personnel et de l’innovation (PILAB), modèle unique en son genre. Les méthodes utilisées par ce laboratoire sont expérimentales et prospectives. Elles permettent de répondre aux questions suivantes :

  • Comment gérer au mieux le personnel ?
  • Quelle récompense doit-on choisir pour rendre le salarié plus heureux ?
  • Quels sont les salariés qui sont susceptibles de quitter l’entreprise ?
  • Quels candidats ont le plus de chance de réussir dans leur future fonction ?

Ces questions sont ensuite traitées sous forme d’algorithme. On assiste ici à une véritable modélisation mathématique de la GRH. Le laboratoire préconise alors des solutions tirées de ses expériences menées sur le terrain :

  • Première décision : le travail en équipe est favorisé : la collaboration, la découverte et l’amusement conduiraient à une plus forte innovation.
  • Deuxième décision : distribution généreuse et avantages fastueux comme des congés de maternité de 5 mois accordés avec réinsertion assurée. En cas de décès d’un salarié, le conjoint percevra la moitié de son salaire pendant dix ans.

Chez Google, rendre heureux les salariés permettrait de réduire les coûts de production (et donc d’accroître la productivité). Le département des ressources humaines de Google est un véritable laboratoire scientifique (POPS)  qui s’appuie sur un logiciel statistique sophistiqué, lui permettant de dégager des certitudes empiriques sur chaque aspect de la vie des salariés. Ces expériences faites sur les employés nous rappellent les démarches empiriques d’Elton Mayo de 1920 à la Western Electric qui avaient permis de montrer l’importance des relations humaines dans le travail et leur impact sur la productivité de l’entreprise

L’originalité de Google est d’avoir choisi d’intégrer une rigueur mathématique dans la GRH, alors que le concept laisserait plutôt penser à une démarche philosophique, psychologique et comportementale. Mais c’est justement la démarche inverse qu’ils utilisent : étudier les comportements humains au travail pour en faire des références absolues et prendre ainsi les meilleures décisions. En est donné pour preuve, la simplification du processus d’embauche par la définition d’un nombre optimal d’entretiens (en appliquant la loi des rendements décroissants), le choix de l’argumentation de salaire ou d’un bonus ou encore, de manière moins importante, le choix de l’environnement physique du travail (comme la taille des assiettes à la cantine permettant de faire attention à la santé par le biais de la quantité mangée).

Preuve de l’efficacité de ces nouvelles méthodes de gestion RH, Google apparait aujourd’hui comme l’employeur le plus attractif du monde (classement Universum).

Si Google représente un cas très spécifique dont le modèle n’est pas forcément transposable à toutes les organisations, l’illustration peut-être pertinente comme point de départ d’une nouvelle voie RH.

L’intelligence économique, un outil pertinent  au service des RH des entreprises

Ce qu’il y a d’intéressant à travers cet exemple développé ci-dessous, c’est qu’il est possible d’identifier deux aspects de l’IE pouvant intéresser les DRH.

Dans un premier temps, la GRH peut s’appuyer sur l’IE au niveau de la formation. Un personnel formé en adéquation avec son travail sera plus performant. Mais ces questions de formation et de qualification doivent être anticipées,  du fait  qu’elles évoluent sans cesse. C’est donc ici que les outils de l’IE interviennent, entre autres les outils de veille, d’analyse et de compréhension des besoins, l’analyse de l’environnement interne et externe mais aussi les cartographies des acteurs.

Par ailleurs, le DRH est aussi chargé de veiller à ce que l’image de l’entreprise renvoyée par les employés soit cohérente. L’IE définit cette idée comme de « la veille sociétale ».  Avec internet, rappelons-le, il est possible de noter et juger les entreprises au travers de sites et de blogs. Le rôle de la direction des ressources humaines serait donc ici d’anticiper ce qu’il peut se dire sur le web en suivant ses collaborateurs et ainsi peut-être éviter les  conflits sociaux  tout en conservant son image. Toutes les parties en sortiraient ici gagnantes…

En fait, la direction des ressources humaines devrait se voir doter de missions de veilles sociales et c’est en ce sens que les RH deviendraient stratégiques. La question sous-jacente demeure : « quels outils permettent d’aider le DRH à anticiper les besoins et à renforcer son rôle stratégique? ». On s’interroge en fait sur comment les DRH pourraient utiliser cette discipline pour améliorer leur gestion des ressources humaines et donc comment utiliser l’anticipation et la veille de l’information dans une optique RH.

Si l’IE est à l’origine d’une approche traitant de l’environnement externe de l’entreprise, elle s’adapte aussi aux  ressources internes. Aujourd’hui, les recruteurs font de plus en plus appel au web 2.0, grâce surtout à l’apparition des réseaux sociaux. Il s’agirait désormais de la moitié des recruteurs. Aussi, se développent  de nouveaux outils internes comme les « espaces de travail collaboratif » qui renforcent la transparence de l’information au sein des organisations et le dialogue entre les collaborateurs.

Au regard des enjeux qui s’annoncent pour les entreprises au XXIème siècle en matière de politique RH dans un contexte où la mutation digitale et l’infobésité sont reines, l’intelligence économique apparait comme un outil phare sur lequel les organisations devraient s’appuyer pour optimiser leur capital humain.

Margaux Walck