Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

[JdR] L’agilité des entreprises est-elle stimulée par la gestion des risques ?

L’environnement globalisé des affaires mute à une vitesse exponentielle et l’opportunité du changement peut vite se transformer en risque d’obsolescence. A mesure que les pratiques évoluent, la guerre de l’innovation oblige les différents acteurs à s’adapter pour défendre leur place. Nouvelles technologies et business model innovants bousculent les codes et créent un écosystème économique inédit qui génère de nouveaux risques. Pour maîtriser des risques, il faut savoir s’adapter, évoluer voire être créatif mais la réciproque est-elle vérifiable ?

La contribution des dispositifs de gestion des risques à l’agilité de l’entreprise était le sujet phare de cette 5e édition des Trophées de la Maîtrise des Risques, organisés par Crowe Horwarth, en partenariat avec l’IFACI et, pour la première fois, l’AMRAE. La caractéristique de notre environnement mise en valeur, lors de cette rencontre était l’instabilité ; l’objectif était de savoir si la résilience est un des moteurs de l’adaptabilité des entreprises. Faire face à chacune des nouvelles facettes d’un environnement demande de l’habileté, de l’aisance, de la souplesse mais pas seulement. Nous l’avons vu lors de cette remise de prix, l’agilité n’est pas seulement la capacité à éviter les obstacles mais elle s’associe aussi à la vivacité de l’esprit.

Face à la diversité des menaces qui sont générées par le bouleversement des systèmes traditionnels, comment piloter une stratégie globale ?

Ouverte à toutes les parties prenantes de la gestion des risques, cette compétition plonge au plus profond des méthodes de Risk Management, en partant de l’identification jusqu’à la gestion de crise. L’objectif des organisateurs était de réunir autour de la même table, l’audit, le contrôle interne, le risk management et la direction financière, pour en puiser les meilleures pratiques actuelles et les tendances du marché français. L’évolution des enjeux opérationnels engendre une modification des codes à tous les niveaux, c’est pourquoi l’agilité est devenue une condition de succès et parfois de survie.

 

L’agilité des entreprises, une condition de succès stimulée par la gestion des risques

Avant la remise des prix, trois opérationnels ont confronté leur vision de la gestion des risques. Autour de la table, Louis Vuitton, Sanofi et Valéo ont mis en valeur le thème de la soirée, malgré la différence de leur secteur d’activité et de méthode. Pour eux, accompagner le changement est pour toute société une nécessité pour continuer d’exister ; c’est là l’un de leurs défis quotidiens. Désormais, pour produire des résultats compétitifs, il faut devancer le changement.

Se distinguent donc deux points de vue autour du rôle de la gestion des risques dans l’agilité des entreprises :

  • le premier étant de gérer les risques inhérents à son activité pour l’améliorer, ce qui serait plus proche de la capacité à éviter les obstacles ;
  • le second point de vue étant de gérer des risques extrinsèques à son activité de base pour la développer.

Pour Michelin, gagnant du Grand Prix des Trophées de la Maîtrise des Risques, la clé est de responsabiliser les acteurs au travers d’outils de pilotage. Le groupe a partagé ses méthodes pour piloter des transformations ayant pour but de s’adapter aux nouveaux aspects de son environnement économique.

Ce que l’on retient de son process, c’est que pour stimuler l’agilité du groupe, la direction des risques et le Top Management ont initié un mouvement général de transformations. Il a été insufflé à tous les niveaux : dans son business, dans son mindset et dans une transformation d’organisation. Cette politique générale est couplée à une dynamique de diversification des activités du groupe sur des marchés émergents. Pour cela, une transformation des métiers a été menée ainsi que sur le staffing, les manières de travailler ensemble et de reporter.

Dans ce groupe, la politique globale Risk Management est pilotée par un département qui fusionne chaque direction intéressée par la gestion des risques. Il est dirigé par Florence VINCENT, directrice audit interne et gestion des risques, depuis près de dix ans,  et, depuis trois ans, le contrôle interne et la qualité du groupe. Son rôle est d’animer et de diriger le groupement formé par les directeurs de chacun de ces quatre départements.

La méthode qui est mise en avant est d’agir sur tous les leviers, communiquer sur tous les canaux et ne pas négliger la formation. Tout démarre par le Top Management qui doit insuffler la dynamique à tous les niveaux de l’entreprise. Pour cela, plusieurs outils sont mis en avant pour communiquer auprès du COMEX : exercice de crise, serious game, simulations.

 

Témoignage des équipes Michelin, gagnant du Grand Prix des Trophées de la Maîtrise des Risques

 

L’agilité des entreprises, une condition de survie garantie par la gestion des risques

Pour GRDF, meilleure contribution du Contrôle Interne, l’enjeu est d’assurer un service avec la meilleure sécurité possible pour les usagers et leurs salariés ainsi que d’assurer l’avenir en accompagnant la transition énergétique. S’agissant d’un acteur économique particulier, car délégataire de service public, leur agilité n’a pas pour objectif de créer de nouveaux marchés, mais de dynamiser la gestion de leurs projets et de diffuser une culture de risques.

La direction CIRA regroupe le Contrôle Interne Risque et Audit et est pilotée par Christine RIBES, depuis 2012. Il s’agit d’un réseau qui accompagne l’entreprise pour valoriser la démarche de gestion des risques tant au niveau stratégique qu’opérationnel. L’accent est mis sur l’accompagnement et la prise en compte des problématiques à chaque niveau de l’entreprise.

Leurs outils privilégiés sont la formation, la cartographie des risques et le contrôle interne qui sont mis en avant dans les sujets sélectionnés par la direction CIRA. Des méthodes innovantes sont développées pour stimuler l’engouement du COMEX, tels que des contrôles internes flash pour mettre en lumière un point technique particulier ou encore des ateliers de « design fiction » (imaginer des futurs en se basant sur des films de science-fiction). Les manageurs et chefs de projets sont sensibilisés à la culture de risques pour la diffuser dans leurs entités. Un accompagnement en région est mis en place par la direction CIRA qui pilote des projets ponctuels avec les équipes locales.

Pour Renault, meilleure contribution de la Gestion des Risques, l’enjeu est double : il s’agit à la fois de  maintenir leur leadership en s’adaptant à l’évolution du marché, notamment sur les questions de la mobilité de demain mais aussi d’être un acteur innovant pour conquérir de nouveaux marchés et renforcer la présence mondiale du groupe.

Ils ont été récompensés pour leur capacité à allier agilité et robustesse pour la performance, à savoir de représenter une synthèse entre une prise de risque pour s’imposer et conserver leur place sur le marché et une maîtrise des risques pour s’imposer de façon durable. La Direction du Management des risques est dirigée par Gérard PAYEN et composée d’une équipe de deux Risk Managers et s’appuie sur un réseau d’experts Risques ainsi qu’un réseau de Risk Managers opérationnels, présents dans chacune des entités industrielles et commerciales du groupe.

La résilience ne doit pas être un plus, uniquement à la charge du pôle Risque ou Sûreté. L’objectif est d’être responsabilisant pour l’ensemble des acteurs, à la fois individuellement et aussi collectivement en tant qu’équipe.

Leur méthode est donc différenciante car elle permet la maîtrise et la prise de risque. Elle a, en effet, pour but de permettre aux opérationnels d’appréhender les risques au plus tôt par le biais d’une cartographie sur chaque projet, puis de décider d’assumer certains risques pour permettre la réussite du projet. Dans tous les secteurs, la cartographie des risques n’est jamais complète. Il existe constamment des nouveaux risques qui ne peuvent être anticipés. La résilience des entreprises dépend de la capacité des hommes à gérer l’imprévu.

 

Témoignage des équipes GRDF, meilleure contribution du Contrôle Interne

 

Témoignage des équipes de Renault, meilleure contribution de la Gestion des Risques

 

La tentation est grande pour les experts de la gestion des risques de se réfugier derrière les pratiques et jargons habituels et non de s’appuyer sur la réalité opérationnelle. La gestion des risques, le contrôle interne et l’audit doivent suivre les mutations de l’entreprise et s’adapter aux contraintes que vivent les opérationnelles. L’agilité des équipes pour communiquer, sensibiliser et s’adapter aux référentiels métiers est essentielle pour être entendus tant par le top management qu’au plus bas de la chaîne de production.

A la lumière de ces trois histoires d’entreprises, on comprend :

  • d’une part, que l’agilité des entreprises est garantie par la direction des risques en ce qu’elle entraîne la réactivité d’un groupe face aux nouvelles menaces d’un environnement qui évolue. Les trois démarchées récompensées mentent en valeur le développement de modes de communication innovants, notamment auprès du Top Management, en suscitant son intérêt, et au sein de l’entreprise en diffusant une culture de risque.
  • d’autre part, que l’agilité des entreprises est stimulée par la direction des risques car elle permet de distinguer des opportunités nouvelles dans chacune des facettes des évolutions du marché. On retiendra l’intérêt suscité par le rapprochement des différentes directions des risques, à savoir la concertation des initiatives et des actions sous une seule bannière.

Crowe Howarth a synthétisé l’enseignement tiré de son expérience et de l’organisation de ce rendez-vous en quatre piliers qui favorisent l’agilité en entreprise : Prioriser, Simplifier, Responsabiliser et Diversifier

 

Pierre Sorel et Jehna Levine