Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

[JdR] Ready For A Serious Game ?

Quoi de mieux qu’un Serious Game pour se plonger dans un univers de crise, le plus réel possible ?
C’est ce que proposait la Nuit de la Gestion de Crises organisée par l’ANAJ-IHEDN et le Club Risques de l’Ecole de Guerre Economique, le 8 juin 2018.

Quel était le principe du jeu ?

L'association Serious Games Network-France, qui organisait ce jeu, proposait à un groupe de 20 personnes de se réunir autour d’une thématique : le conflit syrien. Le but était de traiter d'un sujet actuel, la question Kurde, dans  l’espace géographique moyen-oriental, de l'Iran à la Syrie.

Des sous-groupes étaient ensuite constitués en fonction de parties prenantes  réels de la problématique posée, soit :

  • Daesh,
  • l'Iran,
  • les Etats Unis,
  • la Russie,
  • l'Irak,
  • les Kurdes
  • et Médecins sans frontières.

Les joueurs devaient lancer les dés et, en fonction de leur résultat, pouvaient proposer une action stratégique à mener. Les autres joueurs pouvaient ensuite compléter l'idée ou bien opposer une résistance. Les mentors du jeu étaient chargés quant à eux de valider ou d'invalider les propositions. Vous l'aurez compris : le Serious Game est avant tout un jeu créatif. Celui-ci a été  d'autant plus innovant qu'il sortait du logiciel classique préprogrammé. En effet, les créateurs ont opté pour une forme innovante (ou old-school) : un plateau de jeu et une paire de dés. Là où la programmation peut limiter les cas de figure, le papier n'a aucun frein et n'oppose aucune résistance à l'imaginaire. Ainsi des alliances existantes étaient reformées, comme celle entre les Américains et les Kurdes, mais aussi des situations tout à fait improbables, à l’image d’une alliance entre Américains et Iraniens, par exemple. Le but du Serious Game est donc de véritablement couvrir tous les cas de figures possibles, présents comme à venir.

Venons-en à l'intérêt de ce jeu. C'est avant tout un outil de développement. « Ce n'est pas un jeu à somme nulle », confiait Michel Sasson, professeur à l'Ecole de Guerre Economique. Lors d'une partie, comme dans la vie réelle, les intérêts des joueurs convergent et divergent à plusieurs reprises, donnant forme à la Théorie des Jeux (voir John Von Neumann, Ernst Zermelo, Oskar Morgenstern).

Les avantages du Serious Game sont multiples, il permet de :

  • Favoriser la réflexion autour de sujets concrets : là où la réalité cloisonne l'esprit, le jeu permet, au contraire, de le libérer et d'innover sur des situations qui paraissent bloquées. Dans le cadre d'une gestion de crise, c'est un excellent exercice à réaliser en amont afin de se préparer aux nombreuses éventualités possibles.
  • Se placer dans la position adverse : en effet, en situation réelle nous sommes focalisés sur notre position et nos intérêts. Toutefois, cet outil permet un exercice mental intéressant en se situant dans le camp opposé. Ainsi, vous percevez la situation sous un autre angle, analysez les failles que vous détectez dans votre propre camp, envisagez les alliances possibles, etc.
  • Ecouter et de se faire entendre : au travail, la hiérarchie impose et le temps est compté. Ainsi il peut être difficile parfois de se faire entendre sur certaines propositions mais également d'écouter ce que les autres membres (ou adversaires) ont à dire. Ici, oubliez tout cela. Les règles du jeu priment et chacun est obligé d'écouter les propositions des autres et peut s'exprimer. Dès lors, l'étendue des idées s'ouvre à vous…

 

Dans quel secteur peut-on employer un Serious Game ?

Déjà utilisé en Allemagne, en Angleterre ou encore aux Etats Unis, le Serious Game s'impose un peu plus à chaque personne qu'il conquiert. En France, vous en trouverez un aux Invalides portant sur la Campagne de Napoléon – Idéal pour se mettre dans la peau des conseillers de l'Empereur.

La force du Serious Game est qu'il est en permanente évolution et répond ainsi à une demande de façon précise. En termes d'Intelligence économique, le Serious Game est une façon de comprendre les échiquiers de puissance, de se représenter les enjeux de pouvoir et de prendre l'avantage sur ses adversaires.  Cet outil a de l’avenir !

 

Pour les entreprises :

Les grandes entreprises utilisent beaucoup le Serious Game comme un outil de formation et de prévention. En effet, cet exercice est une excellente formation pour tous les secteurs. Le jeu peut s'appliquer aussi bien dans la prévention d'une crise que dans le lancement d'un nouveau produit ou encore dans la fluctuation des cours boursiers. C'est un support modulable en fonction du domaine auquel on compte l'adapter et qui sait répondre à toutes les attentes.

Les PME, bien que moins friandes de cet exercice, pourraient y trouver leur compte également. Bien que plus petites, ces structures ont véritablement une force stratégique à ne pas négliger dans beaucoup de domaines. Le Serious Game pourrait, dès lors, les aider à se placer vis-à-vis de la concurrence, de leur clientèle mais aussi de leur fournisseur, afin d'anticiper tout mouvement sur leur marché et veiller à la protection de leurs intérêts.

 

Pour l'enseignement :

Les écoles étrangères ont commencé à intégrer le Serious Game à leur système d'éducation. En France, le jeu est en cours de découverte bien que certains professeurs ont décidé de l'intégrer pleinement dans leur enseignement. C'est, par exemple, le cas de Michel Sasson (professeur EGE).

Les opportunités de cette méthode sont sans limites à tous les niveaux de l'éducation.

Dès le lycée, ces outils pourraient permettre aux élèves de se former un esprit critique. Au lieu de collecter et d'archiver les informations depuis les bancs des salles de classe, ils pourraient ainsi être acteurs de l'information. Par ailleurs, le jeu est un excellent moyen d'implication de l'élève, dès lors où il est actif et non plus passif. De ce fait, les bénéfices sont doubles : meilleur compréhension d'une situation complexe et développement d’un esprit critique. Cette méthode pourrait être incluse dans les cours d'Histoire-Géographie ou encore de Philosophie…

Dans le supérieur, les enjeux du Serious Game sont diverses et variés. Premièrement, cela permet une application directe des enseignements théoriques afin de saisir toutes les subtilités d'un domaine. Par la suite, l'exercice permet aux étudiants de renforcer leur esprit critique et leur curiosité.

Dans notre monde où la pluridisciplinarité est croissante, il est essentiel d'envisager un regard différent sur une situation donnée. Le Serious Game vous en donne l'occasion. Enfin, l'exercice doit être anticipé en amont de l'entreprise pour que s'ancre l'habitude de projection.

 

Pour soi :

Le Serious Game peut très bien se pratiquer dans une sphère privée ou personnelle. Encore une fois, il faut prendre ce jeu pour un outil performant mais qui demande de l'entrainement. Pourquoi ne pas s'essayer à celui-ci dans n'importe quelle situation ? Vous en ressortirez plus convaincu de son utilité.

 

La traduction parle d'elle-même, « Jeu Sérieux ». Il s'agit bel et bien d'un moyen récréatif ayant pour but de voir et de comprendre une situation sérieuse. A l'avenir, nous le considèrerons de plus en plus comme une méthode à part entière et non plus comme un jeu. Pour autant, sa forme riche en créativité, en imaginaire, devra rester intact afin que nous puissions en tirer toujours le meilleur. A mon sens, ce concept jeune ne finira pas de nous épater dans les prochaines années.

 

Médéric Mezzano