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[JDR] La stratégie vaccinale de Londres pour conserver son hégémonie financière européenne

Officiellement sorti de l’Union européenne depuis le 1er janvier 2021, le Royaume-Uni (RU) s’interroge sur son avenir économique et financier et plus particulièrement pour la City, sur sa place boursière. Après des mois de négociations sans trouver d’accord avec l’Europe et au rythme de la pandémie, Londres cherche cependant à maintenir son influence dans le secteur financier. Entre problèmes de transports aériens et fermeture des frontières, la couronne trouve solution à ses maux dans une stratégie vaccinale qui donne l’espoir d’une relance économique, non sans risque.

La vaccination, point culminant d'une relance économique, commence à être disponible. Malgré un accès anticipé limité aux personnes de plus de 65 ans, les commandes commencent enfin à être respectées. Accusée d'être avantagée par les laboratoires Pfizer/BioNTech, Londres a pourtant payé la dose à 16.60 € l’unité contre 12 € dans les pays de l’Union européenne. Depuis son autorisation de mise sur le marché par l’Agence européenne du médicament (EMA) le 29 janvier 2021, le vaccin Astrazeneca est devenu le troisième vaccin disponible en Europe, après ceux de Pfizer/BioNTech et Moderna. Mais la multiplication des vaccins qui devait accélérer la campagne de vaccination entraîne la méfiance de la population suite à l’existence de supposés effets secondaires comme en témoignent par exemple un tiers des soignants de la ville de Rouen, qui explique ressentir de la « fièvre » et des « frissons ».

Pourtant les campagnes de vaccinations démontrent cependant leur efficacité comme le démontre l'étude réalisée par le PHE (Public Health England) avec une diminution encourageante de 70 % des cas de Covid sur le territoire après la première dose de vaccin. Fort de ses résultats, Londres prévoit d'ici le milieu de l'année 2021 l'accès aux vaccins à l'ensemble des adultes du territoire. Estimant actuellement à 56 000 le nombre de décès supplémentaires d’ici l’année prochaine, la stratégie vaccinale du gouvernement britannique a pour objectif de réduire ce constat au minimum. Comme de nombreux pays européens, l'Angleterre cherche donc à limiter les effets du covid. Le nombre de décès liés à la pandémie montre une tendance baissière à court-terme, mais des spécialistes prévoient déjà une coexistence inévitable avec le coronavirus comme c’est déjà le cas avec d'autres maladies endémiques comme la grippe, la rougeole ou encore le VIH. Avec ces campagnes, Londres tente de réduire le risque sanitaire sur son territoire, mais paradoxalement s’expose à la méfiance des populations. Le virus de la méfiance se propage également à la City au grand dam de Londres.

La méfiance des investisseurs financiers sur les conséquences du Brexit

Le secteur financier semble être l’un des oubliés de l'accord post Brexit qui ne prend pas en considération ce secteur représentant tout de même 7 % du PIB, 10 % des recettes fiscales et 1,1 million de postes. La sortie de l’Union lui a fait perdre son titre de première place boursière européenne à la City qui est passé derrière Amsterdam qui a connu une augmentation de 20 % des volumes échangés.

La perte de parts de marché sur le secteur financier s'explique aussi par l’exode de 1,3 millions de travailleurs étranger partis depuis le début de la crise du covid. Les secteurs les plus touchés sont les aides à domicile, les commerces et la restauration qui ont vu pas moins de 700 000 départs de Londres et une diminution de 90 % des candidatures. Malgré de nombreux départs, le Brexit créer pour certains spécialistes un avantage concurrentiel important notamment à la City. 1500 entreprises – acteurs du secteur financier – ont fait des demandes d'autorisation pour exercer au RU dont 1000 d'entre elles prévoient d'y établir leurs bureaux. Parmi elles, 400 compagnies d'assurances et une centaine de banques. Cette demande massive d'accès à la place financière de la couronne semble être un signe d’une confiance retrouvée chez certains investisseurs. Cependant, la pandémie a ralenti ce mouvement et le risque pour Londres est de perdre le semblant de confiance retrouvée depuis quelques mois si la situation venait à se dégrader; ce qui ne serait pas de bonne augure pour l’ensemble du commerce anglais.

Bientôt la fin du cauchemar pour les commerces anglais ?

Alors que l'économie britannique a reculé de 10 % l'année dernière, la BOE (Bank of England) prévoit un ralentissement de la baisse du PIB à 4 % d'ici la fin du mois de mars. La promesse d'un futur rebond réconcilie doucement les investisseurs étrangers et les incertitudes se dissipent petit à petit comme en témoigne la consolidation de la livre sterling au-dessus de 1,40 $. Lundi 22 février, Boris Johnson annonçait un dé-confinement  « prudent » et « progressif » à venir, avec la réouverture des écoles le 8 mars, des commerces le 12 avril et espère lever les autres restrictions d'ici fin juin.

Andrew Bailey, le gouverneur de la BOE cherche lui aussi des solutions pour limiter l'impact de la pandémie en Angleterre proposant une politique de taux négatifs qui serait la solution afin d'empêcher l'économie de sombrer et ainsi favoriser une reprise rapide. Cette solution ne fait toutefois pas l’unanimité malgré la promesse d’une relance économique permise par l’incitation que cela engendrerait concernant les prêts octroyés par les banques. Néanmoins, le risque d’un taux d’intérêt négatif reste la stabilité monétaire.

Londres demeure donc dans l’incertitude économique et politique. L’arrivée du variant B.1.1.7 laisse planer le doute sur une potentielle reprise. En effet, certains épidémiologistes comme Neil Ferguson demandent un reconfinement de 18 mois. Dans le même temps, si le couvre-feu devait encore continuer, les conséquences seraient encore plus dramatiques étant donné que les faillites s’accumulent depuis quelque temps. Aussi, l'arrivée des débats sur l'indépendance de l'Écosse pourraient créer une nouvelle incertitude politique si le Parti national écossais remporte les élections parlementaires écossaises de mai. La stratégie de Londres à l’égard de l'Europe promet une stabilisation économique malgré les incertitudes dues au vaccin et au Brexit. 

 

Thomas DOURRON pour le club Risques de l’AEGE

 

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