Le cyberespace, loin de l’utopie égalitaire des débuts d’internet, est désormais un lieu d’affrontement mondial où s’exercent luttes d’influence et conflits d’intérêts. La révolution des données a fait émerger de puissants acteurs numériques : les « Gafam » américains et « BATX » chinois atteignent un nombre d’utilisateurs et une puissance financière qui leur permettent de rivaliser avec les États.
Créée à l’initiative du groupe Les Républicains, la commission d’enquête sur la souveraineté numérique s’est donné comme mission d’en identifier les champs fondamentaux, à l’échelle individuelle ou collective, pour esquisser les moyens de la reconquérir, qu’ils relèvent de la règlementation ou de la mise en oeuvre de politiques publiques. Comment, en effet, face à ces redoutables concurrents, conserver une capacité autonome d’appréciation, de décision et d’action pour l’État dans le cyberespace ? Comment garantir une « autonomie informationnelle » suffisante à nos concitoyens toujours plus dépendants d’intermédiaires techniques au fonctionnement opaque ?
Conduits sous la présidence de M. Franck Montaugé (Socialiste et Républicain – Gers) et sur le rapport de M. Gérard Longuet (Les Républicains – Meuse), les travaux la commission d’enquête ont permis d’entendre sous serment 63 personnes de tous horizons (membres du Gouvernement, entrepreneurs, scientifiques, juristes, hauts fonctionnaires, régulateurs indépendants) au cours de plus de 70 heures d’auditions.
Sans résignation ni naïveté, la commission appelle à répondre à une quadruple remise en cause : celle de notre défense, celle de notre ordre juridique, celle de notre ordre économique, et celle de notre système fiscal et monétaire. Pour remédier à l’absence de stratégie globale et lisible, elle propose un principe et une méthode (le forum institutionnel du numérique), un rendez-vous régulier (la loi d’orientation et de suivi de la souveraineté numérique) et une série de mesures précises et urgentes, notamment dans les domaines de la protection des données personnelles et des données économiques stratégiques, de la concurrence, et en faveur de l’innovation et du multilatéralisme.