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Intelligence économique : d’une politique publique à une ambition nationale.

Le Portail de l’IE reprend ici l’éditorial « D’une politique publique à une ambition nationale » de la Lettre d’actualités de l’Intelligence Économique et de l’Innovation de CCI France de février 2016. Il analyse la nomination du Commissaire à l’information stratégique et à la sécurité économiques, qui dirigera le Service de l’information stratégique et de la sécurité économiques, successeur de la D2IE.

Fin 2011, le Groupe de travail « Métiers et Formations en Intelligence Économique et Stratégique » de CCI France publiait une série de scenarii prospectifs sur l’évolution de l’Intelligence Economique (IE). Parmi eux, la « Diffusion » : l’IE « disparaissait » en tant que telle, mais les « compétences informationnelles » qu’elle proposait, notamment concernant le management de l’information, se diffusaient par le biais de ses outils et méthodes.

D’avantage qu’une politique publique, l’IE devenait une grille de lecture permettant l’articulation de ces « compétences informationnelles » ainsi que des métiers et organisations en découlant. C’est à cette aune que l’on peut analyser la récente évolution institutionnelle de l’IE en France. Le gouvernement vient en effet de nommer Jean Baptiste Carpentier « Commissaire à l’information stratégique et à la sécurité économiques » (CISSE).

Placé auprès du Ministre de l'Economie, de l'Industrie et du Numérique, Jean Baptiste Carpentier dirige le « service de l’information stratégique et de la sécurité économiques » (SISSE), service à compétence nationale fusionnant, au sein de la direction générale des entreprises (DGE), les moyens de la délégation interministérielle à l’IE (D2IE) et du service ministériel de coordination à l’IE (SCIE). Cette fusion et ce changement de dénomination n’ont pas manqué de susciter questionnements et commentaires.

L’abandon du terme signifie t’il la fin de l’IE ? L’affichage cède la place à un état d’esprit : à la lecture du décret, on constate en effet que cette nouvelle « politique publique en matière de protection et de promotion des intérêts économiques, industriels et scientifiques de la Nation » amène à un redéploiement vers les technologies stratégiques, accompagné d’un focus sur l’information à caractère stratégique, ainsi que sur les enjeux de souveraineté numérique. On assiste également à un recentrage vers les acteurs économiques et les entreprises, qui devront se doter des moyens nécessaires à une mise en œuvre plus opérationnelle de l’IE, par exemple via les stratégies de normalisation et la maîtrise du management de l’information.

Ce passage à Bercy est-il un « retour aux sources » ? Cette création fait écho avec celle de la première structure gouvernementale d’IE : le Comité pour la Compétitivité et la Sécurité Economique (CCSE), créé en 1995 auprès du Premier ministre, puis transféré rapidement à Bercy… La situation actuelle ne serait donc qu’une énième manifestation d’un mouvement de balancier. CCSE et SISSE sont pourtant fondamentalement différents : le SISSE est un service à compétence nationale similaire à une agence de l’Etat, mais surtout les fonctions liées au développement territorial sont conservées, avec notamment l’animation du réseau de Correspondants Régionaux à l’IE (CRIE), avec l’appui des Préfets.

Concrètement, que peuvent en attendre les entreprises, les territoires et les secteurs stratégiques ? L’Etat dispose désormais de « bras armés » pouvant répondre à une stratégie de conquête de positions fortes dans l’industrie et la nouvelle révolution numérique : France Stratégie pour la réflexion stratégique, Business France pour l’attractivité et la conquête des marchés, BPI France pour l’investissement dans les secteurs stratégiques… c’est l’articulation et la mise en « ordre de bataille » de tous ces acteurs, avec l’appui du SISSE, qui assurera le succès et les retombées visibles de cette politique publique de « protection et de promotion des intérêts économiques, industriels et scientifiques de la Nation ».

Cette réorganisation n’est donc pas qu’un énième avatar de la politique publique. Elle peut servir une ambition nationale irriguée par une stratégie d’intelligence économique. Le réseau Intelligence Economique & Innovation des CCI, ainsi que ses partenaires historiques en France (CDSE, CISP-3AF, Cybercercle, Instituts Carnot, Pacte PME…) et à l’étrangers (CCI FI, CPCCAF, Entreprise Europe Network…), ont naturellement vocation à s’y associer pour qu’ensemble, mobilisant information et connaissance, nous contribuions à l’émergence des champions économiques de demain.

 

Philippe Clerc  (Conseiller Expert IE Internationale) & Thibault Renard (Responsable Intelligence Economique)                                      

Direction International, Industrie, Innovation et Intelligence Economique de CCI France

Lettre Actualité de l'Intelligence Economique et de l'Innovation de CCI France, février 2016