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Les États-Unis à l’assaut de l’industrie photonique française

Le Portail de l’IE pointait ces dernières semaines les risques de rachat de Photonis, leader mondial de l’amplification lumineuse. Si cette opération semble avoir été prise en compte par les autorités qui pourraient préempter les fonds américains, il n’en va, pour l’instant, pas de même pour Latécoère, autre fleuron aéronautique français spécialiste de la Li-Fi, technologie hautement stratégique.

Les technologies photoniques françaises semblent intéresser de près les Américains. Si la position de Photonis semble être momentanément sécurisée, c’est au tour de celle de Latécoère d’être remise en question, tant l’offensive financière se montre implacable. Quand on pense à Latécoère, on imagine avant tout un avionneur historique, aujourd’hui sous-traitant majeur des grands maîtres-œuvres industriels de l’aéronautique (Airbus, Dassault, Embraer, Boeing…) et leader des systèmes d’interconnexions et des aérostructures.

Le fort dynamisme de la politique de R&D du groupe le place en fer de lance de l’innovation photonique française grâce au développement de la technologie Li-Fi ou « Light Fidelity ».  Or le dévoilement de son avance dans le secteur semble dangereusement concomitant à la tentative de rachat du groupe par le fonds américain Searchlight.  Ce rachat comporte des enjeux industriels cruciaux dont le passage d’un sous-traitant stratégique civilo-militaire sous la norme International Traffic in Arms Regulations ITAR. Toutefois, une appréhension minimale de prospective et de risque technologique révèle l’importance future de cette technologie et l’avance prise dans ce domaine par la France.

Quelles sont les particularités de la Li-fi pour susciter tant de convoitises ? Adossée à la fibre, elle constitue une technologie de rupture potentielle dans la transmission de données et leur sécurisation. À l’heure où la question de la gestion de la bande-passante se pose de manière critique aussi bien dans les sphères civiles comme militaires, la Li-fi se distingue par son absence de spectre électromagnétique pour un débit 10 à 100 fois plus important que la Wi-fi. Cette invisibilité électro-magnétique, la rend de surcroit impiratable en dehors de son spectre lumineux : un atout de taille face à la recrudescence des risques en cybersécurité. En outre, la Li-fi est moins énergivore. Ces atouts en font une technologie duale aux applications utiles autant dans la sphère civile que militaire. Si cette technologie n’est pas encore tout à fait mature, ces atouts en font une technologie aux applications duales (civiles & militaires). Les dix prochaines années seront donc déterminantes dans la définition d’un avantage technologique par la puissance qui sera en pointe dans ce domaine et qui lui permettra un avantage commercial et stratégique.

Or la France démontre une avance non négligeable avec plusieurs entreprises à la tête du secteur photonique : Photonis, Lucibel, Oledcomm, Latécoère… Cette dernière est un industriel international (plus de 5000 employés) aux fortes capacités de développement et déploiement. Un changement de bannière serait donc une catastrophe à long terme et s‘ajouterait à la longue liste des actes manqués français depuis maintenant plus de 40 ans.

Face à ces enjeux, on se demande pourquoi Bpifrance ne porte pas plus d’intérêt à ce type d’écuries.

Pierre d'Herbès