Cette semaine, les laboratoires Pfizer (Etats-Unis) et BioNTech (Allemagne) ainsi que Moderna Pharmaceutics (Etats-Unis) ont respectivement annoncé un vaccin pour prévenir du SARS COV2, efficace à 95% pour les premiers et 94,5 % pour le second. Alors que s’amorce l’espoir d’une sortie de la pandémie, la concurrence s’organise pour prendre part à la compétition économique de la santé.
En tout, 195 vaccins candidats sont recensés par l’OMS comme concourant à la réalisation d’un vaccin contre le COVID-19. Parmi eux, 11 ont fait l’objet d’essais de phase 3, soit la dernière étape avant homologation et une possible mise sur le marché. Cette effervescence est animée par un immense appât que sont les brevets, qui pourraient offrir aux heureux gagnants une capacité d’influence non négligeable. Le vaccin, censé être un bien commun et humanitaire, s’annonce tel un redoutable outil de guerre économique, d’influence, et de quête de capitaux.
D’abord, en avril dernier, Donald Trump avait ouvert le bal de l’exclusivisme, mettant à profit son fameux slogan « America First » et supprimant toute contribution des Etats-Unis à l’OMS. En mai, le laboratoire français Sanofi lui emboîtait le pas, déclarant que, si un vaccin venait à être créé, la priorité serait donnée aux États-Unis. Evènement dont ils ont tenté de réparer les dégâts en Juin dernier, investissant dans un nouveau site français pour la recherche et la production de vaccins. Aujourd’hui, c’est au tour de l’Union Européenne de confirmer son auto-centrisme, déclarant via Clemens Martin Auer, porte-parole des négociations sur les vaccins : « D'ici à la fin de septembre, nous aurons sécurisé 1 milliard de doses pour les citoyens de l’Union ». Une vision monopolistique bien loin des valeurs prônées par l’Union.
Pourtant, l’Europe et 170 pays ont apporté leur soutien à l’initiative COVAX pour un vaccin distribué équitablement à tous, y compris aux pays pauvres. Un projet qui parait bien artificiel quand on sait que nombre de pays riches ont déjà réservé plus de 5 milliards de vaccins, selon la Fédération internationale des fabricants (lFPMA), dont les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Union Européenne, le Japon, et l’Australie. Cette dernière se démarque cependant avec la déclaration de son premier ministre, Scott Morrison, sur un potentiel vaccin qui, s’il s’avérait fonctionnel, serait gratuit. Hormis cette initiative qui pour l’instant ne s’adresse qu’à la population australienne, la crise sanitaire n’aura pas contribué à l’harmonisation des coopérations internationales en matière de développement sanitaire. Loin de vaciller, la guerre économique sera ravivée par le marché des vaccins anti-COVID.
Clémentine Balayer