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La France dans le jeu des puissances mondiales : l’urgence d’une stratégie nationale d’intelligence économique

Les négociations entamées le 8 juillet 2013 sur un possible accord commercial transatlantique de libre-échange entre les Etats-Unis et la France ont fait couler beaucoup d’encre. Les Français considéraient que cet accord porterait atteinte à l’exception culturelle française alors que Bruxelles affirmait vouloir tenir une attitude offensive à l’égard de ses homologues américains.

Pour autant, nul n’ignore que le vieux continent peine à imposer ses normes dans les nouveaux rapports de force géoéconomiques depuis la fin de la Guerre froide.

La question de la suprématie économique n’épargne pas la France. Sans stratégie, elle se contente de copier les modèles ; japonais dans les années 1980, chinois dans les années 1990, et aujourd’hui allemand. Et pourtant, le monde s’est complexifié. Les Etats perdent peu à peu de leur souveraineté. La concurrence s’est accrue et concerne de plus en plus d’éléments immatériels. De nouveaux enjeux sont apparus tels que la bataille des normes, la maîtrise des ressources naturelles et des réseaux d’influence notamment.
Dans ce contexte, les puissances adoptent des stratégies offensives en matière de géostratégie et de géoéconomie. Le Brésil s’est ainsi lancé dans une stratégie de traçage des dépôts de brevets européens et américains ; la Corée a construit une prospective et une stratégie sur 25 ans en la matière. Quant aux Etats-Unis, ils sont devenus des experts dans l’instauration de leurs propres normes et dans les échanges d’informations entre public et privé. Ces derniers, comme le Japon, pourtant disciples du libre-échange, se sont transformés en économies réalistes, usant de pragmatisme afin de contrôler étroitement leurs intérêts stratégiques en les mettant à l’abri de la concurrence.

Ainsi, la France accuse un sérieux retard. Elle se doit de réagir et de construire une stratégie de long terme pour passer d’une action défensive à une action offensive afin de créer des avantages compétitifs en sa faveur. Elle ne peut plus se permettre de se laisser distancier sur l’échiquier mondial. Pourquoi la France ne protège-t-elle pas plus l’exploitation de ses ressources marines et sous-marines alors qu’elle est le deuxième pays au monde en matière de ZEE et alors que la concurrence déloyale internationale fait rage et les tentatives de prédation se multiplient ? Notre pays connaît des difficultés dans la transformation des dépôts de brevets en produits ou pour éviter que nos entreprises, donc nos technologies ne soient rachetées par des concurrents.
Notre pays reste empêtré dans ses anciennes croyances et n’a pas encore dépassé l’obsolète grille de lecture anglo-saxonne du « soft power » de Joseph Nye. Pour Christian Harburot, directeur associé du cabinet Spin Partners, et expert international en intelligence économique, il est nécessaire de repenser les convergences et divergences entre trois cadres théoriques : « distinguer les politiques de puissances, les logiques de marché et les réalités de territoire ». La France doit s’engager dans une grille de lecture multiculturelle, en phase avec le réel, et non déformée par les prismes idéologiques. Selon lui, les universitaires et professionnels de l’intelligence économique doivent aussi arrêter de ne se référer qu’à ce qui est écrit. Il considère en effet que « par omission ou par omerta, une grande partie de la réalité n’est pas écrite. Il y a nécessairement des stratégies cachées qui ne sont jamais retranscrites et qui peuvent avoir des effets très importants ».

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