Le CubeSat, un petit satellite cubique miniature, est devenu un outil clé de la stratégie spatiale brésilienne en raison de son faible coût et de sa flexibilité. Depuis 2018, le pays mise ainsi sur cette technologie pour accélérer ses capacités nationales mais aussi pour réduire sa dépendance internationale.
L’intérêt du CubeSat et son utilisation massive par le Brésil
Le Cubesat désigne généralement un format de satellite artificiel, pesant entre 1 kilogramme et 10 kilogrammes. En guise de comparaison, les satellites des débuts et du milieu de la conquête spatiale pesaient en moyenne 400 kilogrammes. Le développement de ces satellites miniatures a débuté dès la fin des années 1990, mais sa généralisation n’a eu lieu qu’à la fin des années 2010.
La technologie CubeSat offre un certain nombre d’intérêts majeurs. Tout d’abord, leur faible coût de développement et de production facilite grandement l’accès au marché. Ensuite, ils permettent des transferts technologiques rapides en raison de la disponibilité d’un grand nombre d’informations en source ouverte. Comme il existe de nombreux plans de constructions et d’études sur le CubeSat en source ouverte, cette technologie est plus facile à assimiler. Enfin, ils offrent la possibilité d’adapter la plateforme à un grand nombre d’applications spatiales.
Le Brésil a expérimenté ce type de plateforme satellitaire en 1990, avec le Microsat 2, qui pesait 10 kilogrammes. Cependant, la plateforme CubeSat ne sera massivement utilisée dans le programme spatial qu’à partir des années 2010. À partir des années 2018, cette technologie devient dominante dans le programme spatial brésilien.
L’inclusion de la plateforme CubeSat dans la stratégie globale de souveraineté
Le Brésil est encore en phase d’acquisition de technologies liées à la plateforme CubeSat, comme en témoigne l’utilisation fréquente de ces satellites pour tester leur résistance en orbite et évaluer leurs modules de service. Néanmoins, l’accélération de l’utilisation d’autres applications spatiales à partir des années 2020 démontre la rapidité d’acquisition des technologies par le pays. La plateforme a également été incluse dans la stratégie globale de souveraineté nationale.
Le programme prévoit ainsi plusieurs scénarios allant dans ce sens, qui prennent en compte différents niveaux de décaissement du budget prévu pour la conception de satellites. Si la raison n’est pas précisée, il pourrait s’agir de motifs économiques, notamment l’anticipation des variations de la monnaie brésilienne, doublée de l’inefficacité de l’administration. Le scénario 0 prévoit ainsi une utilisation de 40 % du budget alors que le programme ne prévoit pas de grand satellite avant un décaissement de 55 %.
Une stratégie qui semble porter ses fruits
La stratégie brésilienne en trois axes semble pour l’instant porter ses fruits. Les transferts de technologies ont permis le développement de capacités nationales en matière de production et de vente de technologies spatiales. Actuellement, le pays a d’ores et déjà atteint ses objectifs, comme en témoigne l’existence des satellites Amazonas 1 et VCUB 1.
De toute évidence, le pays veut continuer dans cette direction, en combinant un programme spatial institutionnel et un programme privé qui se complètent. Ce modèle permet de multiplier les projets dans le secteur en diversifiant les sources de financement. Il favorise ainsi la montée en compétence des acteurs de la filière, tout en augmentant leur nombre et leurs revenus, le tout dans le cadre des grandes orientations du programme spatial national.
Le futur du PNAE et de Visiona
Le PNAE prévoit une participation plus grande et plus diversifiée de l’industrie brésilienne pour son projet de constellation Catarina. À cette fin, des créations d’entreprises spécialisées dans la production exclusive de CubeSats sont prévues. Visiona prévoit de continuer ses efforts de développement de capacités nationales d’observation de la terre et de production de données nationales. Comme en témoigne le projet de construction d’un nouveau satellite d’observation en coopération avec l’agence de financement d’études et projets. Le satellite VCUB 1 est un premier succès, ce dernier ayant commencé à transmettre ses images le 18 octobre 2024. Il est très probable que la stratégie future de l’entreprise soit de renforcer la production de données nationales. L’objectif affiché est de les mettre à disposition des acteurs publics du pays afin de soutenir des politiques publiques. Progressivement, l’entreprise pourrait exploiter le potentiel commercial de ces données en passant des contrats avec des entreprises brésiliennes.
Des partenariats futurs avec l’armée ne sont pas à exclure, au vu de l’intérêt de l’observation du territoire à des fins de sécurité. Ces nouvelles capacités nationales pourraient lui fournir de meilleurs outils pour surveiller les territoires difficiles d’accès. Ces zones sont souvent le théâtre de nombreuses activités criminelles comme l’orpaillage ou le trafic de drogues. À plus long terme, il est possible que ces données servent d’outil d’influence, à minima au niveau régional.
Malgré tout, la souveraineté n’est pas encore une réalité
La souveraineté nationale en matière de données reste inaccessible pour le Brésil, comme le montre la dépendance actuelle du pays aux satellites opérés par l’Agence spatiale européenne. Cependant, avec une industrie nationale en plein essor et capable de produire divers satellites d’observation, le pays pourrait atteindre cet objectif dans les cinquante prochaines années. L’étape suivante pour le Brésil sera de développer ses propres lanceurs, un domaine dans lequel les efforts passés n’ont toujours pas abouti.
David Salgado
Pour aller plus loin :
- Brésil : une stratégie souveraine pour l’observation de la Terre [1/2]
- L’Alliance NewSpace France pour faire rayonner l’excellence spatiale tricolore au niveau planétaire
- Le nucléaire spatial propulsé par Framatome Space