ZLECAf : Le grand pari du libre-échange africain

L’Afrique s’apprête à entrer dans une nouvelle ère commerciale avec la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Ce projet ambitieux, qui commence à prendre une forme concrète depuis 2021, promet de créer le plus grand marché commun au monde en nombre de pays. Mais derrière cette ambition se cachent de nombreux défis. La ZLECAf peut-elle réellement transformer l’économie du continent ou restera-t-elle une simple utopie ? 

Une ambition historique pour l’intégration africaine

La création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) marque une étape décisive pour l’Afrique, longtemps soumise aux intérêts économiques étrangers. En unissant 54 nations, le continent affirme sa volonté de se démarquer en tant que bloc économique autonome et semble prêt à redéfinir les règles du jeu commercial mondial. L’objectif est ambitieux : tripler le commerce intra-africain d’ici 2030, actuellement limité à 15 % des échanges totaux. Pour y parvenir, la ZLECAf prévoit de supprimer progressivement les droits de douane sur 90 % des marchandises, facilitant ainsi la circulation des biens et des services.

Au-delà des aspects purement commerciaux, cette initiative incarne une quête d’indépendance économique. Elle vise à libérer le continent des influences étrangères en créant un marché intégré capable de rivaliser sur la scène internationale. La ZLECAf offre ainsi une opportunité unique de transformer les économies africaines en stimulant l’industrialisation, en créant des emplois pour une jeunesse en pleine expansion, mais aussi  en attirant des investissements étrangers. En embrassant cette vision, l’Afrique ne se contente pas de suivre le courant mondial du libre-échange. Elle trace aussi sa propre voie, déterminée à écrire un nouveau chapitre de son histoire économique, où solidarité et souveraineté vont de pair.

Un potentiel énorme mais des obstacles persistants

Selon des études de la Banque mondiale, la mise en œuvre réussie du ZLECAf pourrait augmenter le PIB africain de plusieurs centaines de milliards de dollars d’ici 2030. Cette augmentation pourrait être le résultat d’une diversification des secteurs économiques, avec une forte impulsion vers les industries à valeur ajoutée.

Cependant, plusieurs difficultés persistent. Les infrastructures en Afrique sont souvent défaillantes, avec des réseaux routiers et des installations portuaires qui nécessitent des investissements massifs. Selon la African Development Bank, il faudrait environ 130 à 170 milliards de dollars par an pour combler le déficit infrastructurel du continent. De plus, les disparités économiques entre les pays membres sont importantes, allant des économies développées comme le Nigeria et l’Afrique du Sud aux pays en développement, ce qui pourrait créer des inégalités dans la distribution des avantages du libre-échange. La stabilité politique est également un facteur clé. Certains pays font face à des tensions internes qui pourraient compromettre l’implémentation de ZLECAf. De plus, il existe une résistance potentielle des industries locales face à la concurrence accrue des entreprises plus développées.

ZLECAf : une réalité en marche ou un pari risqué ?

ZLECAf est-elle une réalité en devenir ou un pari trop optimiste ? Les opinions divergent. D’un côté, l’engagement politique de 54 pays montre une volonté forte de réussir ce projet. D’un autre côté, les défis pratiques sont considérables. Les experts économiques s’accordent à dire que le succès de ZLECAf dépendra de la capacité des pays à surmonter les obstacles infrastructuraux et à harmoniser leurs politiques commerciales. Comparé à d’autres blocs commerciaux comme l’Union européenne (UE)  ou l’ASEAN, ZLECAf a donc le potentiel de devenir un acteur majeur sur la scène économique mondiale, mais cela nécessitera une coordination étroite et une adaptation aux spécificités locales. Les relations avec les puissances extérieures, telles que la Chine, l’UE et les États-Unis, pourraient également influencer le succès de ce nouveau projet.


Oscar Lafay 

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