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La RSE, une porte d’entrée pour l’intelligence économique dans l’univers du développement durable

Bien que l’intelligence économique (IE) et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) aient des origines différentes, elles partagent de nombreux points communs dans leur gestion des flux d’informations. Lorsqu’elles sont alignées, ces deux démarches peuvent créer une synergie puissante, propulsant les entreprises vers une réussite durable et éthique.

Tandis que l’IE développe un capital informationnel pour un avantage compétitif en intégrant des éléments non économiques dans l’analyse économique, la RSE utilise des informations standardisées pour répondre à des objectifs sociétaux. La directive européenne Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), un document clé de la RSE, établit une méthodologie pour un audit extra-financier indépendant du financier, offrant une vision plus claire de la performance globale de l’entreprise. Dès 2024, les grandes entreprises européennes devront se conformer à cette directive, systématisant la collecte et la diffusion d’informations extra-financières selon les guidelines du groupe consultatif européen sur l’information financière (EFRAG).

L’alignement de l’IE et de la RSE peut créer une synergie propulsant les entreprises vers une réussite durable et éthique, basée sur cinq axes : création de valeur partagée, gestion des risques et des réputations, conformité et avantage concurrentiel, innovation et durabilité, et communication stratégique.

La création de valeur partagée

La synergie entre l’intelligence économique (IE) et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) est fondamentale pour la création de valeur partagée. L’IE, par son analyse fine du contexte économique et concurrentiel, permet aux entreprises d’identifier des opportunités de marché et des menaces potentielles. La RSE, quant à elle, s’assure que les réponses de l’entreprise à ces opportunités et menaces sont alignées avec des principes éthiques et durables. Cela crée une valeur qui va au-delà des bénéfices financiers immédiats, englobant des avantages sociaux et environnementaux. Exemple 1 : Une entreprise de technologie verte utilise l’IE pour identifier une opportunité de marché dans les énergies renouvelables. En appliquant les principes de la RSE, elle développe des panneaux solaires innovants qui sont plus efficaces et moins coûteux, bénéficiant ainsi à la fois à l’entreprise et à l’environnement. Exemple 2 : Une entreprise de cosmétiques utilise l’IE pour détecter une tendance croissante vers les produits biologiques. En intégrant la RSE, elle lance une nouvelle ligne de produits dont le sourcing renforce la part d’ingrédients naturels et biologiques, répondant à la demande des consommateurs tout en soutenant la biodiversité et les agriculteurs locaux.

La gestion des risques et la réputation

La gestion des risques et la réputation sont des aspects cruciaux pour toute entreprise. L’IE offre des outils pour anticiper et gérer les risques, notamment en surveillant les changements dans l’environnement réglementaire, économique et social qui pourraient affecter l’entreprise. La RSE, en promouvant des pratiques responsables, contribue à atténuer ces risques et à construire une réputation solide. Exemple 1 : Une entreprise agroalimentaire utilise l’IE pour surveiller les tendances de consommation et détecte une demande croissante pour des produits sans OGM. En adoptant une politique RSE de transparence et en s’approvisionnant en ingrédients non-OGM, elle améliore sa réputation et réduit le risque de controverse. Exemple 2 : Une entreprise de jouets utilise l’IE pour identifier les risques liés à la sécurité des produits. En adoptant une approche RSE, elle met en place des normes de sécurité plus strictes que celles requises par la loi, ce qui améliore la confiance des clients et renforce sa réputation de marque sûre pour les enfants.

La conformité et les avantages concurrentiels

La conformité réglementaire est un terrain sur lequel l’IE et la RSE se rencontrent. L’IE aide les entreprises à comprendre et à naviguer dans le paysage réglementaire complexe, assurant que les activités de l’entreprise sont en accord avec les lois et les normes en vigueur. La RSE va au-delà de la simple conformité, en adoptant des pratiques qui dépassent les attentes réglementaires et éthiques, ce qui peut offrir un avantage concurrentiel distinct. Exemple 1 : Une entreprise pharmaceutique utilise l’IE pour rester informée sur les régulations internationales. En intégrant la RSE, elle va au-delà des normes en matière de tests éthiques, ce qui lui confère un avantage concurrentiel et la positionne comme leader dans l’industrie. Exemple 2 : Une entreprise de services financiers utilise l’IE pour rester à jour sur les réglementations anti-blanchiment d’argent. En intégrant la RSE, elle développe des programmes de formation pour ses employés, dépassant les exigences réglementaires et établissant un nouveau standard dans l’industrie.

L’innovation et la durabilité

L’innovation est un moteur clé de la compétitivité et de la croissance. L’IE guide les entreprises vers des innovations pertinentes en identifiant de nouvelles tendances, technologies et opportunités de marché. La RSE encourage ces innovations à être menées de manière responsable, en veillant à ce qu’elles répondent aux besoins économiques tout en respectant les exigences sociales et environnementales. Exemple 1 : Un constructeur automobile utilise l’IE pour anticiper les régulations sur les émissions de CO2. Grâce à la RSE, il développe une nouvelle gamme de véhicules électriques, répondant aux besoins environnementaux tout en ouvrant de nouveaux segments de marché. Exemple 2 : Une entreprise de restauration rapide utilise l’IE pour anticiper un changement dans les préférences alimentaires. Grâce à la RSE, elle introduit des options de menus végétariennes et véganes, réduisant son empreinte carbone et répondant aux attentes des consommateurs pour des choix alimentaires plus durables.

La communication stratégique

La communication stratégique joue un rôle vital dans la façon dont une entreprise est perçue par le public et les parties prenantes. L’IE utilise la communication pour défendre et promouvoir les intérêts de l’entreprise, en informant et en influençant les parties prenantes sur les questions qui affectent l’entreprise. La RSE utilise la communication pour démontrer l’engagement de l’entreprise envers des pratiques éthiques et durables. Exemple 1 : Une entreprise de vêtements utilise l’IE pour identifier les préoccupations des consommateurs sur le travail des enfants. En communiquant activement sur ses initiatives RSE pour garantir des conditions de travail équitables, elle renforce sa marque et son influence sur le marché.

L’intégration de la démarche, des outils, de l’expérience de l’IE et de la RSE est une stratégie gagnant-gagnant pour les entreprises qui cherchent à se démarquer et à avoir un impact positif sur la société et l’environnement. Cela nécessite une vision à long terme et un engagement envers des pratiques qui sont bénéfiques pour l’entreprise, la société et l’environnement. Exemple 1 : Une chaîne de supermarchés intègre l’IE et la RSE en lançant une initiative de produits locaux et biologiques. Cela lui permet de répondre à la demande des consommateurs pour des produits durables tout en soutenant l’économie locale, illustrant l’alignement entre les objectifs commerciaux et les valeurs sociétales. Exemple 2 : Une entreprise de mobilier utilise l’IE pour identifier une opportunité dans le marché du mobilier durable. En adoptant une stratégie RSE, elle crée une ligne de meubles fabriqués à partir de matériaux recyclés, ce qui lui permet de se distinguer sur le marché tout en contribuant à l’économie circulaire.

L’IE pour anticiper les aléas inhérents à la RSE

Ces 5 axes d’exploration des synergies entre l’IE et la RSE, illustrent bien le potentiel de synergies entre les deux démarches. La RSE est utile à l’alignement des objectifs d’affaires avec les valeurs sociétales. Cependant, si elle n’est associée à une stratégie d’intelligence économique bien conçue, elle peut exposer les entreprises à divers risques et vulnérabilités. Par la mise en place d’une politique de transformation et des actions de transparence, elle peut accroître la vulnérabilité des entreprises mais également de l’ensemble des acteurs économiques. Ces aléas peuvent être regroupé en 5 groupes : les risques juridiques et de conformité, les risques opérationnels, les risques de réputation, les vulnérabilités sociales et environnementales, les innovation et durabilité.

Les risques juridiques et de conformité

Les entreprises engagées dans la RSE doivent naviguer dans un paysage réglementaire complexe et en constante évolution. Le risque de non-conformité peut entraîner des sanctions légales et des dommages à la réputation. L’IE, grâce à sa capacité de veille réglementaire, permet aux entreprises de rester informées des dernières évolutions législatives et de s’adapter en conséquence, assurant ainsi la conformité et évitant les pénalités.

Les risques opérationnels

La mise en œuvre de pratiques RSE peut parfois perturber les opérations existantes, entraînant des coûts supplémentaires ou des inefficacités. L’IE peut identifier les domaines où la RSE pourrait impacter les opérations et proposer des stratégies pour optimiser les processus tout en respectant les engagements RSE.

Les risques de réputation

La RSE peut soulever des attentes élevées parmi les parties prenantes. Un échec à répondre à ces attentes peut nuire à la réputation de l’entreprise. L’IE permet de surveiller l’opinion publique et les tendances du marché, fournissant ainsi des informations précieuses pour ajuster les initiatives RSE et communiquer efficacement sur les efforts de l’entreprise.

Les vulnérabilités sociales et environnementales

Les initiatives RSE peuvent révéler des vulnérabilités sociales et environnementales au sein de la chaîne d’approvisionnement ou des communautés locales. Les contraintes du reporting, les impératifs de transparence peuvent révéler des vulnérabilités.  L’IE aide à anticiper et à comprendre ces vulnérabilités, permettant aux entreprises de prendre des mesures proactives pour les adresser et de renforcer leur engagement envers la durabilité.

L’innovation et la durabilité

Bien que la RSE puisse stimuler l’innovation, elle peut aussi orienter les entreprises vers des options plus coûteuses ou moins éprouvées. L’IE, en identifiant les tendances technologiques et en évaluant les innovations, peut guider les entreprises vers des solutions durables qui sont à la fois rentables et responsables.

L’émergence de cadres incitatifs et réglementaires plus exigeants sur la RSE augmentera le volume d’informations disponibles, transformant la fonction RSE en adoptant une approche systématique comme celle de la CSRD. Cela compliquera le choix des axes de progrès des entreprises, élargissant la portée des impacts évalués et renforçant l’influence des parties prenantes. Les données accrues et la transparence affecteront diverses fonctions au-delà de la RSE, mais offriront aussi une opportunité pour une création de valeur plus durable. L’intelligence économique peut aider à gérer les risques associés, fournissant des informations stratégiques pour des décisions éclairées, renforçant ainsi la résilience et la compétitivité des entreprises dans un environnement conscient des enjeux sociaux et environnementaux, et créant des synergies avec les services de développement durable.

Stéphane Ledoux et Mickaël Réault pour le club ESS-RSE de l’AEGE

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