Suite à une enquête approfondie menée par Air France sur son concurrent Ryanair, ce dernier, mis en examen pour travail dissimulé, quitte l’aéroport de Marseille en janvier 2011. Air France y installe à la suite une escale en octobre. Retour sur une enquête mouvementée.
Fortement concurrencée par les lignes TGV et les compagnies low-costs sur le marché intérieur, Air France décide de répliquer. La compagnie commence d’abord par diversifier son offre en créant une filiale, Transavia, puis Air France Express, qui verra le jour en 2012.
Celles-ci, permettant l’implantation de son personnel navigant sur des sites régionaux, notamment Marseille en octobre, entrainent une réduction des coûts de « découchage ». Les dépenses opérationnelles baisseront de 15% selon Air France.
Les dernières difficultés rencontrées par Ryanair, l’un de ses principaux concurrents, ont pu aussi bénéficié au transporteur français.
Ryanair, ou le cumul des subventions régionales
L’histoire débute en 2010, quand suite à une enquête approfondie, Air France révèle que Ryanair bénéficie de subventions et de tarifs publicitaires particulièrement avantageux. En effet, parce qu’elle dessert principalement les aéroports peu rentables, dans des zones touristiquement sinistrées, la compagnie irlandaise négocie systématiquement des aides. Celles-ci, plus ou moins élevées, sont versées par les collectivités territoriales et les chambres consulaires. En 2010, elle aurait ainsi touché 660 millions d’euros de subventions en Europe, dont 35 millions en France.
Ces aides peuvent prendre des formes variées, allant de la ristourne sur l’assistance aux escales aux faibles redevances aéroportuaires.
En outre, Ryanair décide de rentabiliser son investissement en vendant des espaces publicitaires sur son site Internet aux régions désireuses de relancer l’économie locale, et ce à des prix excessifs. Selon Air France, la subvention moyenne accordée par voyageur à Ryanair était de 11 euros. Le maximum était atteint par Rodez avec 32 euros, et 22 euros pour Tours, selon l’Observatoire des subventions.
Faisant alors rapidement le buzz, cette information est largement relayée par la presse nationale, dénonçant l’avidité de la compagnie étrangère. Air France, selon le quotidien Le Figaro, va jusqu’à affirmer que la compagnie irlandaise se rémunère sur « le dos du contribuable français ».
La faille de Ryanair : des pratiques anticoncurrentielles
Forte de cette victoire communicationnelle, Air France poursuit son enquête. La première bataille à peine gagnée, une seconde est alors lancée. C’est sur le terrain du dumping social que le combat va pouvoir s’exprimer.
Air France découvre ainsi rapidement que Ryanair pratique du dumping social sur son escale de Marseille. En effet, rémunérant son personnel sous contrat irlandais alors que celui-ci réside en France, la compagnie fautive tente d’échapper aux conditions de la législation française.
La conclusion est alors immédiate et la compagnie irlandaise est mise en examen pour travail dissimulé, et décide de quitter l’aéroport phocéen en janvier 2011.
Risquant son va-tout Ryanair tente une requête en nullité de l’instruction qui sera déboutée par le parquet d’Aix-en-Provence le 8 novembre dernier et le jugement aura bien lieu en 2012. En attendant la place est libre, Air France sera seule compagnie low-costs installée à Marseille.
Montant global de l’aide accordée à Ryanair par les collectivités territoriales française jusqu’en 2006
AEROPORTS |
Aide/passager |
Montant global de l’aide accordée à Ryan Air |
Beauvais |
9€ |
28,6 M€ de 2001 à 2006 |
Bergerac |
9€ |
2,3 M€ de 2003 à 2006 |
Biarritz |
9€ |
3,7 M€ de 2000 à 2006 |
Brest |
23€ |
1,09 M€ de 2003 à 2006 |
Carcassonne |
9€ |
6,5 M€ de 2001 à 2006 |
Dinard |
12€ |
4,4 M€ de 2001 à 2006 |
La Rochelle |
12€ |
2,2 M€ en 2006 |
Limoges |
11€ |
2,9 M€ de 2003 à 2006 |
Marseille |
10€ |
2,7 M€ en 2006 et 2007 |
Montpellier |
9€ |
4,5M€ de 2002 à 2006 |
Nantes |
10€ |
0,5 M€ en 2006 |
Nîmes |
9€ |
4 M€ de 2000 à 2006 |
Pau |
14€ |
2 M€ de 2003 à 2006 |
Poitiers |
18€ |
2,1 M€ de 2003 à 2006 |
Rodez |
32€ |
3,2 M€ de 2004 à 2006 |
Toulon |
13€ |
0,5 M€ en 2006 |
Tours |
22€ |
2,1 M€ de 2003 à 2006 |
Delphine Fichaux et Christian de Matteis