À deux ans de l’ouverture à la concurrence des premières lignes régionales françaises, la SNCF et la DB accentuent leurs offensives en vue de conforter leur position sur le réseau européen. Dans cette lutte, l’emploi de l’IE fera la différence.
Sujet hautement sensible et complexe, cette ouverture à la concurrence n’est pas seulement le résultat de mesures économiques mais biens de décision politiques. De par cet aspect, le combat que se livre DB et la SNCF se poursuit alors sur le terrain de la société civile. Ainsi, bien que la concurrence du fret soit effective depuis 2003, les cheminots français se montrent en réalité rétifs à sa mise en place. C’est ce qui explique le blocage en 2005 du premier train de fret privé sur le réseau français par 200 cheminots. Le lobbying est aussi largement utilisé comme l’illustre le courrier de la Commission Européenne adressé au gouvernement français remettant en question le statut de la SNCF ou bien la convocation de Guillaume Pepy, PDG de la SNCF et Rüdiger Grube, PDG de la Deutsch Bahn par les ministres des transports français et allemand.
Se servant de l’ensemble des outils disponibles faisant parti du domaine de l’intelligence économique, les deux acteurs utilisent aussi la communication d’influence. Ainsi, dès 2008, la SNCF a publiquement accusé la Deutsch Bahn de tenter de débaucher des cheminots français en piratant son système informatique. Les employés ont pu voir sur le blog Fret SNCF –uniquement accessible sur l’intranet de l’entreprise- un message évoquant leur "profil idéal" avec un lien les renvoyant directement sur la page recrutement du site Web d’Euro Rail Cargo, la filiale fret de Deutsche Bahn.
De même, lorsqu’en 2010 la SNCF, à travers sa filiale Keolis, était en phase de négociation avec Arriva, un acteur présent sur le marché anglais, des médias britanniques ont mis à jour des analyses financières montrant que cette opération conduirait à une perte de pouvoir des actionnaires d’Arriva. C’est à ce moment que le Deutsch Bahn a entamé une campagne de communication en vue d’influencer les actionnaires d’Arriva engageant ensuite une OPA amicale.
La dernière illustration en date de ce conflit reste la confrontation des deux compagnies pour l’accès au tunnel sous la Manche. Pour l’instant la Commission intergouvernementale (CIG) franco-britannique limite la traversée du tunnel aux trains mesurant 400 mètres de long et d'un seul tenant, comme les TGV d'Eurostar. Cette norme interdit de ce fait l’ICE allemand composé de deux trains de 200 mètres couplés de se rendre en Angleterre. La compagnie allemande n’a jamais caché vouloir concurrencer Eurostar -filiale à 55 % de la SNCF- et a donc annoncé avoir déposé un recourt auprès du CIG. Malgré tous le poids qu’Eurostar et la SNCF font peser sur les gouvernements français et britannique, la Deutsch-Bahn à semble t’il déjà marqué un premier point. Le 12 octobre dernier, afin d’effectuer des tests, un ICE est entré pour la première fois de l’histoire dans le tunnel ; la DB semble avoir gagné la première manche d’une bataille médiatique haletante. La SNCF ne devrait pas tarder à répondre. Prochaine manche à suivre…