Alors que la loi sur la transition énergétique a récemment été votée, la France s’est fixée des objectifs ambitieux pour sa politique énérgétique. Les » smart grid » (réseaux électriques intelligents) pourraient être une bonne piste pour les atteindre.
L’énergie électrique : état des lieux en France en 2015
Deux définitions préliminaires doivent être fournies pour mener à bien cet état des lieux : celles du bouquet énergétique et du bouquet éléctricité.
L’appellation de mix énergétique (ou bouquet électrique) désigne la répartition des différentes sources d’énergie primaire dans la consommation énergétique finale d’une zone géographique donnée. Il inclut les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, charbon), le nucléaire, les déchets et les diverses énergies renouvelables (hydraulique, biomasse, solaire, éolien et géothermie).
Le bouquet énergétique, quant à lui, représente la proportion de chacune des filières de production d’électricité (nucléaire, éolien, solaire, hydroélectrique, thermique) dans une zone géographique donnée, en l’occurence la France.
En ce qui concerne la production d’électricité, la France a produit 563 TWh en 2014. L’essentiel du bouquet électrique français est assuré par la technologie nucléaire qui représente 77,5% de la production nationale en 2014. Les énergies renouvelables occupent une part de 17,7% dans la production nette d’électricité en 2014 décomposée entre l’hydroélectricité (12,6%), l’éolien (3,1%), le solaire (1,1%), les déchets et autres (0,9%). Le restant, soit 5% de la part totale, est produit en ayant recours aux énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz).
La prépondérance de l’énergie nucléaire dans la part de la production d’électricité est une singularité française au regard d’autres puissances économiques mondiales. Pour en citer quelques-unes, en 2014, les Etats-Unis ont produit 70% de leur électricité avec les énergies fossiles et 18% avec le nucléaire. En 2013, l’Allemagne produisait 45% de son énergie avec le charbon, 10% avec le gaz naturel, 24% avec les énergies renouvelables et 15% avec le nucléaire.
Fort de ce constat et des enjeux climatiques futurs, le gouvernement a voté en 2015 la loi sur la transition énergétique.
La loi sur la transition énergétique fixe un nouveau cap pour les vingt prochaines années
Récemment votée par le gouvernement, la loi sur la transition énergétique vise à atteindre des objectifs ambitieux relatifs à la place des énergies renouvelables dans le bouquet électrique français à l’horizon 2030.
En effet, l’objectif à atteindre est une consommation finale d’énergies renouvelables de l’ordre de 32% en 2030 (contre 16,7% actuellement). Pour ce faire, le Ministère de l’écologie édicte des objectifs « intermédiaires » pour l’horizon 2023, qui seront atteints grâce à la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE). La première PPE couvrira les années 2016 à 2018 et fixe une puissance installée de 24 000 MW (contre approximativement 13 000MW en 2014) de solaire et d’éolien terrestre à la fin de cette période. La puissance installée devra être portée à 36 000 MW voire 43 000 MW en 2023, après promulgation du deuxième texte règlementaire (nouvelle PPE).
Néanmoins, ces objectifs paraissent difficilement atteignables. Pour y arriver, il faudrait installer et raccorder au réseau une puissance solaire et éolienne d’environ 2,5 GW par an jusqu’en 2018 et continuer sur le même rythme jusqu’en 2023. Or, La France est en deçà de ce rythme d’installation depuis toujours et les récents 1889MW installés en 2014 sont toujours insuffisants.
La transition énergétique dispose que la part du nucléaire dans le mix électrique français doit baisser de 50% d’ici à 2030. Répondre à ce défi énergétique exige de se poser les bonnes questions, notamment celles concernant le réseau de distribution de l’électricité. À ce titre, Les « smart grid » pourraient apporter des éléments de réponse.
Le réseau électrique intelligent (ou « smart grid ») ou l’intelligence économique appliquée à la distribution de l’électricité
Un réseau électrique intelligent ou « smart grid » utilise les technologies informatiques de manière à optimiser la production, la distribution, la consommation et vise aussi à optimiser les mailles du réseau d’électricité allant du producteur au consommateur dans le but d’améliorer l’efficacité énergétique de l’ensemble concerné par l’expérimentation.
De nos jours, des actions pionnières vont déjà dans ce sens. ERDF, la branche de distribution d’électricité d’EDF, va commencer à équiper le domicile des usagers avec un nouveau compteur nommé Linky. Il permettra de relever la consommation en temps réel et de la transmettre au fournisseur d’électricité. Cet équipement sera déployé progressivement de manière à équiper les 35 millions de foyers français d’ici six ans.
Le fonctionnement de ce dispositif se divise en plusieurs étapes : il communique les données de consommation tout d’abord en envoyant un signal crypté sur le circuit électrique vers un concentrateur qui le relaie par la suite. Les données recueillies par les compteurs Linky vont être analysées dans un centre à Lyon, lequel va emmagasiner des quantités croissantes d’informations.
La similitude avec les pratiques de l’intelligence économique est frappante. le dispositif procède en effet à une veille informationnelle avec la collecte de l’information (les données des usagers). Puis vient le traitement et l’analyse des données de manière à les exploiter. L’information stratégique obtenue est utilisée pour mieux gérer le réseau : elle est au cœur de l’expérimentation d’un réseau électrique intelligent.
Par ailleurs, un autre pilier de l’intelligence économique se retrouve dans ce dispositif: la sécurité économique. La sûreté des communications est en effet recherchée. Les signaux sont cryptés et un dispositif sécurisé a été installé en collaboration avec l’Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d’Information (ANSSI).
À la croisée d’avancées technologiques et de l’intelligence économique, ces nouveaux réseaux pourraient donc constituer une solution aux défis d’envergure que la France s’est lancée.