Conférence de presse Cigref

Dans la continuité de ses travaux consacrés aux relations entre les grandes organisations et les fournisseurs du numérique, marqués notamment par la diffusion en juillet dernier d’un communiqué de presse constatant « la dégradation de la qualité des échanges et des services d’Oracle vis-à-vis de ses entreprises clientes, en France et en Europe. », le Cigref organise pour la première fois une conférence de presse à ce sujet. Pour rappel, le Cigref est un réseau de grandes entreprises et administrations publiques françaises qui a pour mission de développer la capacité de ses membres à intégrer et maîtriser le numérique. Association loi 1901 créée en 1970, il regroupe à ce jour près de 150 membres publics et privés de issus de différents secteurs d’activité.
Invité à l’occasion de cette première conférence de presse, le Portail de l’IE vous en fait un retour en avant-première.

Cette conférence de presse avait pour but de créer un rendez vous annuel dédié aux relations fournisseurs/entreprises au sein de l’écosystème numérique.

Après un rapide rappel des causes et raisons de cette conférence de presse, le Président du Cigref Bernard Duverneuil dresse un bilan sans appel : certains fournisseurs numériques ont des pratiques qui peuvent mettre à mal l’indépendance des entreprises françaises et leur compétitivité.

Philippe Rouaud, Président du club relations fournisseurs du Cigref, énonce 11 constats qui étayent les propos du Président.

  • Des pratiques archaïques de la part des fournisseurs pour assurer le maintien de leur position sur le marché. En guise d’exemple, il est question d’audits longs et hostiles ainsi que de contrats créant de la dépendance.
  • Cloud. Selon les observations, les promesses concernant la mise en place de clouds seraient non tenues. Les fournisseurs ne favorisent pas l’accès, la mise en place ou encore l’accompagnement. De plus les méthodes de paiement mises en place sont annuelles et ne varient pas en fonction de la consommation.
  • Un durcissement des relations commerciales qui se manifeste par des négociations faites en urgence en fin d’année par des commerciaux qualifiés de « chercheurs de primes ».
  • Problème de licences. Elles sont jugées intentionnellement complexes et opaques. Souvent changeantes, tout est mis en place pour que le client ne comprenne pas leur fonctionnement. Oracle a été cité en exemple à cause de ses options payantes activables par des techniciens sans aucun contrôle. Est dénoncé également l’accélération des sorties des nouvelles versions, souvent non compatibles avec d’autres logiciels (c’est le cas d’Oracle avec Java).
  • Nouvelle politique tarifaire des SAP basée sur une métrique dite de digital access. Les entreprises dénoncent l’insoutenable monétisation des accès indirects au nom de la protection et de la rémunération de la propriété intellectuelle.
  • Le pricing. Il a été constaté des effets d’augmentation avec des ajouts de fonction sans que les clients n’en manifestent la volonté. Il y a un véritable  manque de prédictibilité des prix et il n’existe pas de grilles tarifaires à l’exception de celles de Microsoft.
  • Les audits. Il existe des cas de pratique d’audits de représailles.
  • Intelligence Economique : les fournisseurs effectueraient des collectes d’information pour s’octroyer un avantage compétitif. Il y aurait aussi une sorte d’espionnage industriel. Le Cigref cherche à savoir s’il y a une compatibilité juridique avec le secret d’affaire.
  • Sécurité des infrastructures : des disfonctionnements chez Google ou Microsoft ont été dénoncés. Ceux-ci ont des conséquences non négligeables sur les entreprises.
  • Données et RGPD. Le problème du principe de la coresponsabilité reste une question en suspens. De plus, on ne trouve que peu d’information sur les sous-traitants qu’ont les fournisseurs.
  • Cloud act. Cette loi américaine du 23 mars 2018 permet aux forces de l'ordre américaines de contraindre les fournisseurs de services américains à fournir les données stockées sur des serveurs, qu'ils soient situés aux États-Unis ou dans des pays étrangers. Les entreprises françaises sont inquiètes des conséquences et des potentielles ingérences.

Afin de pallier cela, un groupe de travail a été créé au Cigref pour trouver des alternatives aux grands fournisseurs. Actuellement, l’Open source est considérée comme l’alternative principale mais encore pas suffisamment utilisable. Le Cigref appelle à de meilleures relations, basées sur la transparence et la prévisibilité, ainsi que sur des partenariats dans l’innovation pour permettre de mieux évoluer.

En somme, le Cigref soulève de nombreux points négatifs mais veut s’inscrire dans une démarche de construction, dans l’optique de créer une réelle relation win-win entre fournisseurs et entreprises.

Manon Fontaine Armand