Humiliation et intimidation – tels sont les délits constants que subissent plusieurs internautes à travers le monde. Les victimes de cyberharcèlement sont soumises à des propos insultants, menaçants ou dégradants, propagés dans le cyberespace à travers les réseaux sociaux, forums, blogs, chats instantanés ou encore jeux vidéo. L’affaire de cyberharcèlement organisé de la « Ligue du LOL », du nom d’un groupe Facebook regroupant des journalistes et communicants qui se livraient depuis 2009 à des campagnes de harcèlement de femmes en ligne, témoigne d’un phénomène protéiforme, bien plus répandu qu’il n’y parait, pouvant toucher tous les internautes.
Selon un sondage Ifop commandé par France Info en février 2019, un jeune majeur sur cinq affirme avoir été victime de cyber-harcèlement, dont un quart des 18–24 ans disent avoir subi des insultes ou des propos grossiers sur Internet et les réseaux sociaux, le terrain le plus fertile à ce genre de pratiques.
Le cyberharcèlement repose sur une relation triangulaire entre l'auteur qui attaque un individu de manière répétée, la victime, et les participants témoins des épisodes de harcèlement. L’absence de contact physique joue un rôle important dans la compréhension du phénomène du cyberharcèlement. En effet, les auteurs se sentent libres de commettre certains actes qu’ils n’auraient jamais envisagés dans la vie réelle. L'auteur ne perçoit pas directement les conséquences de ses actes, ressent moins d’empathie, tandis que se renforce un sentiment d’impunité.
Le cyber harcèlement sous différentes formes
L'usurpation d'identité : le vol d’identité ou la prétention d’être une autre personne, souvent pour effectuer des affaires frauduleuses.
Le doxing : la collecte d’informations personnelles partagées en public ou disponibles en ligne, permettant de menacer et d’harceler la victime.
Le swatting : le fait de piéger les services de police, de manière anonyme, en évoquant la nécessité d’une intervention d’urgence chez un particulier dans le but de lui nuire.
Le discours haineux : l’envoie de menaces ou la diffusion de rumeurs, par la moquerie ou le « happy slapping », ou l’exclusion volontaire d’une personne sur un réseau ou un cercle.
Le revenge porn : la diffusion ou la menace de diffusion du contenu sexuellement explicite en ligne sans consentement, souvent pour se venger ou demander une rançon.
Le cyberstalking : la traque répétitive en ligne, en envoyant des messages injurieux ou diffusant des rumeurs ou des données embarrassantes, telles que les photos ou les vidéos.
Réagir en cas de cyberharcèlement
Afin d’aider les victimes de cyberharcèlement à réagir, la CNIL publie une série de conseils :
- Signalement d’un abus d’usage auprès des gestionnaires des plateformes
- Limitation de la visibilité sur les réseaux sociaux
- Collecte des preuves (dont les captures d’écran en présence d’un huissier)
- Recherche de soutien auprès de plateformes pour les mineurs (nonauharcelement.education.gouv.fr et netecoute.fr)
Les victimes ont la possibilité de signaler aux services de l’État des contenus illicites sur la plateforme internet-signalement.gouv.fr, mais aussi de porter plainte auprès des services de police ou de gendarmerie.
La loi française et le cyberharcèlement
Aujourd’hui, la législation en vigueur dans le cas de cyberharcèlement est celle appliquée contre le harcèlement classique. Cette pratique est définie à l’article 222-33-2-2 du code pénal, c’est « le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende».
Du plan gouvernemental contre la haine en ligne à la proposition de loi
A la suite des révélations sur l’affaire de la Ligue du Lol, en février 2019, le secrétaire d’État au numérique Mounir Mahjoubi publiait un plan d’action pour lutter contre les contenus haineux en ligne, préfigurant la proposition de loi visant à lutter contre la haine sur internet présentée le 20 mars à l’Assemblée nationale. La commission des Lois de l’assemblée nationale a lancé depuis jeudi 18 avril une consultation publique pour nourrir le débat, jusqu’au 12 mai.
Contenant huit articles, le projet tend surtout à renforcer la contribution des opérateurs numériques. Les hébergeurs de contenus (YouTube, Facebook, Dailymotion, Twitter…) dépassant un seuil de connexion sur le territoire français seront soumis à un nouveau régime de responsabilité, activé dans le cadre d’une liste fermée d’infractions, et devront supprimer les messages dans les 24 heures à la suite d’une dénonciation. Cette obligation de retrait sera supervisée par le CSA. Le projet de loi allège également les informations à communiquer à l’opérateur et supprime le principe de subsidiarité, afin que la victime s’adresse directement à l’intermédiaire technique, sans qu’il lui soit obligé de contacter l’auteur de propos haineux en premier lieu.
Aussi le projet de loi prévoit un changement du régime de blocage des sites contenant des contenus jugés illicites. Après un blocage judiciaire d’un site, si ce dernier réapparait sous un autre nom de domaine, l’autorité administrative pourra intervenir en enjoignant les fournisseurs de noms de domaine à bloquer les répliques, sans renouveler la procédure judiciaire.
Club cyber de l’AEGE