Proposition de loi pour déployer une riposte démocratique face aux ingérences étrangères

La DGSI vient de publier sa 100e édition flash ingérence, confirmant la nécessité de mieux prévenir les attaques d’acteurs étrangers sur les plans économique, informationnel et universitaire. Ces recommandations sont prises en compte dans la proposition de loi présentée le 13 mars en Commission des lois, visant à « protéger notre pays et à déployer notre riposte démocratique face aux ingérences étrangères. »

Le mardi 6 février, une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée Nationale par les députés Sacha Houlié, Thomas Gassilloud et Constance Le Grip. La proposition vise à mieux prévenir les ingérences étrangères sur le sol français par un renforcement de l’arsenal juridique. Celle-ci fait suite au rapport alarmant publié en novembre 2023 par la délégation parlementaire au renseignement (DPR). Il faisait alors état de l’incapacité des services de renseignement à lutter contre une menace pourtant croissante des attaques étrangères sur divers secteurs. Au travers de ses « flash ingérences » mensuels, la DGSI tente pourtant depuis plusieurs années maintenant de sensibiliser les entreprises françaises à ce risque. La 100ème édition revient sur six cas emblématiques d’attaques étrangères sur des acteurs stratégiques, aux différentes approches.

Une proposition de loi axée sur l’élargissement de l’arsenal juridique employé pour le contre-terrorisme

Examinée le 13 mars en Commission des lois, la proposition de loi s’appuie sur les recommandations émises par le rapport parlementaire de novembre. La loi comporte quatre articles, qui visent tous à renforcer les outils de préventions d’ingérences étrangères.

Le premier doit obliger les « représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger » à se signaler à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), afin d’y être inscrit sur un « répertoire numérique ». Les acteurs ne se soumettant pas à cette obligation pourront faire l’objet d’enquête du procureur de la République allant jusqu’à des poursuites judiciaires. Le deuxième article propose que le Gouvernement remette désormais au Parlement un rapport annuel sur « l’état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale ». Ceux-ci pourraient par la suite faire l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat. Le troisième article se penche quant à lui davantage sur les moyens techniques de la lutte contre les ingérences étrangères. Il s’agit d’un remaniement de l’article L. 851‑3 du code de la sécurité intérieure qui autorisait le traitement automatisé de données issues des réseaux sociaux, afin de lutter contre le terrorisme. Celui-ci permettait aux services veillant à la sécurité intérieure de faire l’usage d’algorithmes pour fouiller massivement les réseaux, dans le but de détecter les activités suspectes liées au cas de terrorisme uniquement. La proposition de loi souhaite étendre ce système à « toute forme d’ingérence ou tentative d’ingérence étrangère », donnant ainsi une nouvelle ampleur à ces systèmes. Le quatrième et dernier article élargit lui aussi des dispositions, originellement prises pour les groupes terroristes. Il propose d’élargir l’application des gels d’avoir aux actes d’ingérences.

Après la création en 2021 de Viginum, service rattaché au SGDSN s’intéressant au pendant informationnel de l’ingérence, cette proposition continue de marquer la volonté du pays de renforcer ses capacités en matière de lutte contre les menaces hybrides. Sacha Houlié, président de la DPR et à l’origine de la proposition, souligne à juste titre l’ampleur des ingérences chinoises, russes, iraniennes et turques pour expliquer la nécessité de ce projet. Culture, économie et recherche sont les cibles d’attaques « dangereuses pour notre démocratie ». Le débat en séance publique sur la loi aura lieu le lundi 25 mars.

Alexandre Chalmeton pour le Portail de l’IE

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