Tel que cela l’a été développé dans un article du 03 mai 2013, la traçabilité est une arme de défense pour les industriels nationaux.
Elle permet d’affirmer une volonté de qualité, de lutter contre la contrefaçon, d’assurer une meilleure gestion d’éventuelles crises et de faciliter le travail de magasiniers aux divers stades de contrôle mais aussi des douaniers.
Pourquoi voir la traçabilité comme une arme de protection ?
En réalité, c’est parce qu’elle est souvent employée à des fins protectionnistes. Or le protectionnisme est de ces derniers tabous que les élites européennes n’osent pas ou très peu aborder. En effet, avec une idéologie ultra-libéraliste parvenue à un certain degré de son paroxysme, les faits tendent à un comportement contraire, avec des intentions protectionnistes à tout va. Pour autant, au-delà d’un nationalisme mué par un repli sur soi, l’Europe réfléchit à un protectionnisme mûr.
Ainsi, il n’est pas déplacé de dire qu’en l’absence de politiques offensives réfléchies, il est indispensable pour un pays de mettre en place un dispositif de défense aux attaques subies et de sécurisation de son périmètre. Ceci afin de tout simplement préserver la santé de ses citoyens, mais aussi leur bien-être ainsi que leur confiance. Cette confiance nécessaire des consommateurs permet en même temps une réelle responsabilisation des industriels. En effet, ceux-ci sont obligés à un respect des différentes règlementations et voient leur responsabilité engagée en cas de non-respect. Cette traçabilité peut être appliquée à chaque secteur : de l’agroalimentaire à la santé, en passant par le luxe, la grande distribution, ou encore les industriels de défense ou les jouets. Tout le monde est concerné.
Le politique a la responsabilité de veiller à sa population. Il apparaît donc tout à fait logique, qu’à l’aide du législateur, ils s’attachent à mettre en place des règlementations de protection et obligations de justification, qui feraient de la traçabilité un outil au service de tous. Cela permettrait ainsi d’obliger les produits franchissant nos frontières françaises et européennes de se soumettre à différents contrôles, et ce à différents niveaux. Tout le monde y serait gagnant.
Le consommateur bien évidemment qui est au centre des préoccupations, mais aussi l’industriel qui gagnerait en qualité, fiabilité et réputation, donc en parts de marché. Selon une étude publiée par une ONG américaine en février 2013, les restaurants de sushis sont les plus mauvais élèves, avec des fraudes constatées dans 74 % des cas. Un tiers des poissons vendus aux Etats-Unis ne correspondent pas à ce qu’il y a sur l’emballage…Après le scandale de Spanghero, la direction a dû annoncer au personnel des mesures de chômage partiel. Au-delà de la crédibilité d’un groupe, il s’agit aussi de mener une réflexion sur l’emploi et des taux de chômage en berne.
Au-delà d’enjeux défensifs, la traçabilité doit aussi pouvoir permettre de révéler la facette offensive nécessaire à chaque Etat ou industrie, pour mener à bien n’importe quelle bataille économique
En aucun cas, le système de traçabilité ne doit être perçu comme du « flicage ». Au contraire, il est même réclamé par la plupart des industriels. Récemment encore, des éleveurs de porcs en ont réclamé la nécessité avec une dénonciation du manque. En réalité, cela permettrait aux industriels d’être plus performants dans leur secteur et ne pas avoir à prouver constamment leur fiabilité. Ne pas avoir, à sans cesse se préoccuper de potentielles défaillances au sein du système, permet de recentrer ses objectifs. En matière agroalimentaire notamment, un marché à très fort potentiel dans les années, voire mois, à venir serait celui de la Chine.
En effet, au début du mois de mai, le journal Le Monde publiait l’exaspération chinoise en matière de scandales alimentaires : cochons malades morts rachetés par la mafia pour être revendus comme de la viande fraîche sur les marchés locaux, choux au formol, huile de caniveau pour la cuisine, pastèques explosives, petits pains à la teinture chimique, lait aux nitrites, porc élevé au clenbutérol, ou encore lait à la mélanine.
La Chine, pays avec une économie en pleine croissance peut être envisagée comme un futur marché demandeur de confiance en les produits consommés. Il ne serait pas étonnant de les voir se tourner vers des produits davantage occidentaux, gages de qualité. L’émergence lente mais certaine d’une classe moyenne dans différents pays répondra certainement à cette logique.
La traçabilité peut et devrait être envisagée comme une arme de défense afin de contrôler la qualité des produits qui franchissent nos frontières certes. Mais elle doit aussi pouvoir être utilisée comme une arme de conquête de parts de marché. En mettant en évidence les failles de concurrents internationaux, elle doit pouvoir montrer le caractère irréprochable de notre système et donc la fiabilité de ses produits. Il s’agit tout simplement de susciter l’envie et la confiance.
Margot Spiess