Compte-rendu du Colloque « Comment promouvoir l’intelligence économique » de l’ANAJ-IHEDN

Organisée le 18 avril par le Comité défense économique de l’ANAJ/IHEDN présidé par Marc Cazabat, cette conférence a réuni quelques grands noms de l’intelligence économique, tant institutionnels que du secteur privé. L’occasion pour les auditeurs de bénéficier d’un « regard croisé » de ces acteurs avec un objectif unique : la promotion de l’intelligence économique.

L’ouverture du colloque par Monsieur Alain Juillet laissait présager de la qualité des interventions qui allaient suivre. Si, forte de multiples définitions, l’expression d’intelligence économique (IE) pourrait paraître quelque peu galvaudée, Alain Juillet a rappelé ce que recouvrait cette notion : l’intelligence économique, c’est avant tout se donner les moyens d’obtenir une information par rapport à d’autres acteurs, ce qui permet d’anticiper et de se défendre.

En outre, ce grand personnage de l’IE a souligné la meilleure visibilité dont fait l’objet la discipline, fruit d’efforts menés depuis 1992. Il a néanmoins regretté la trop faible prise de conscience des PME dans la valorisation de la connaissance, notamment en termes économiques.

En guise de clôture de son intervention, Alain Juillet a précisé qu’avant d’être une simple technique, l’intelligence économique est un état d’esprit ; un état d’esprit partagé aujourd’hui par des acteurs institutionnels comme par des acteurs privés.

La première table ronde fut consacrée à la perception de l’IE par un panel d’acteurs institutionnels, et non des moindres : Monsieur Philippe Lorec, Conseiller spécial de Claude Revel – Déléguée interministérielle à l’intelligence économique – Monsieur Rémy Pautrat, ancien préfet et ancien directeur de la Direction de la Surveillance du territoire (DST) et Jean Michel Jarry, Coordinateur ministériel à l’intelligence économique auprès du Ministère de l’économie et des finances.

Monsieur Lorec s’est particulièrement attaché à décrire l’environnement nouveau dans lequel les acteurs économiques – dont l’Etat – évoluent. Dans un monde devenu multipolaire et marqué par une révolution des échanges et des communications, le problématique majeure n’est plus d’obtenir une unique information mais bien de faire le tri entre plusieurs d’entre elles.

Du manque d’informations disponibles, il semble que nous ayons glissé vers une surabondance d’information, une véritable « infobésité ».

Face à ce nouveau paradigme, la Délégation interministérielle à l’intelligence économique apparait comme un acteur essentiel dans la poursuite d’une politique publique amorcée depuis 20 ans. En outre, son rattachement direct au Premier ministre facilite indubitablement une coopération interministérielle.

Bien loin de désavouer l’intervenant qui le précédait, Monsieur Pautrat a insisté sur l’importance de l’intelligence économique territoriale, à laquelle il a été confronté en sa qualité de préfet. Les PME représentent à elles-seules plus de 9 millions d’emplois en France, et pourtant, très peu d’entre elles ont une idée de leur environnement concurrentiel. Elles souffrent notamment d’un défaut d’anticipation, fondement de l’économie de la connaissance.

La guerre économique n’est pas qu’un concept, elle existe réellement. Et, dans ce contexte d’hyper-concurrence faussée, l’information en constitue la première munition. Elle est un enjeu de pouvoir.

Dès lors, a-t-il pu souligner, la place du préfet est majeure. Il doit effectivement servir d’interface entre l’Etat et les entreprises. Il participe, d’une certaine manière, à la « décentralisation » de l’intelligence économique à l’échelle territoriale. 

En cela, le Ministère de l’économie et des finances apparaît comme un bon élève, conscient de la nécessité d’une intelligence économique territoriale. Monsieur Jarry a en effet rappelé qu’outre un service de coordination à l’intelligence économique né en 2006, il existe un réseau de chargés de missions à l’intelligence économique au sein des régions.

De plus, Bercy est à l’initiative d’un beau projet dont le but est d’ouvrir et de mutualiser la base de connaissance alimentée par ces délégués régionaux aux autres ministères.

La seconde table-ronde fut consacrée à l’appréhension de l’IE par les acteurs privés, apportant à l’audience une vision complémentaire aux échanges précédents.

Cela a été l’occasion pour Monsieur Lamoureux, Président du Comité IE du Medef, de revenir sur la normalisation. Il a constaté le rôle grandissant d’entités non étatiques et la trop faible place de nos entreprises dans l’édiction d’instruments normatifs, tant nationaux que supranationaux. Dans cette perspective, il est fondamental de parvenir à une « intelligence collective », c’est-à-dire de développer l’IE au sein-même de l’entreprise, entre acteurs privés mais également en partenariat avec les pouvoirs publics.

D’autant que cela implique le bénéfice d’une meilleure influence sur le « marchés des idées » à l’instar de celle qui émane de certaines Organisations non gouvernementales (ONG) ou Think tanks anglo-saxons.

Plus pragmatique, Monsieur Revardel est revenu sur le « cas d’espèce » Sanofi, une entreprise française qui s’exporte internationalement. Elle est l’exemple-même de l’utilité de l’intelligence économique comme vecteur de compétitivité.

Rémi Pautrat a clôturé ce second atelier en sa qualité de membre de la Compagnie Européenne d’Intelligence Economique (CEIS), insistant sur l’importance de l’éthique pour les entreprises et plus précisément de l’impact sur ces dernières, à l’image des fameux classements établis chaque année par Transparency International (TI).

Ainsi, ce colloque a pu traduire le plus fidèlement possible les progrès qui ont été réalisés mais également ceux qui restent encore à accomplir.

Bien plus qu’un simple balbutiement, cette conférence a témoigné d’une véritable prise de conscience de la valeur de l’intelligence économique sur l’échiquier des acteurs économiques français, tant institutionnels que privés.

Cette meilleure visibilité de l’IE doit être au service de ce tissu économique ; elle doit être envisagée comme le support nécessaire d’entreprises innovantes. A ce titre, il ne pouvait être de meilleur exemple que celui donné par Spallian, start-up française innovante spécialisée dans le Conseil en management, essentiellement rendu possible par un logiciel unique de cartographie « intelligent ». Elle vient par conséquent concurrencer les « grands noms » anglo-saxons de cartographie tels que Google.

Il n’est plus nécessaire de s’attacher à démontrer le formidable potentiel de talents en France, déjà reconnu dans le monde. Gageons que l’intelligence économique, davantage reconnue aujourd’hui, puisse les accompagner au mieux à l’avenir et favoriser leurs succès.

Anais FERRADOU.

– Revivez les interventions en vidéo sur le site de l’ANAJ IHEDN

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