Un an après le rétablissement des sanctions envers l’Iran, les États-Unis continuent de durcir leur politique d’étouffement économique en décidant de ne pas renouveler les exemptions d’importation du pétrole iranien. Huit États en bénéficiaient depuis le mois de novembre 2018.
Des exemptions accordées en novembre 2018
Le 8 mai 2018, Donald Trump annonçait sortir les États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien signé sous l’administration Obama, et déclarait vouloir imposer contre l’Iran les sanctions « les plus dures de l’histoire ». Parmi les mesures prises, l’embargo contre les exportations de pétrole a forcé de nombreux groupes étrangers à abandonner leurs projets, à l’image de Total. Ce coup d’arrêt porté à un commerce d’hydrocarbures vital pour Téhéran continue de priver le pays d’une importante manne financière.
Cependant, la demande mondiale en pétrole ne cesse de croître. Les quatre millions de barils produits quotidiennement par l’Iran qui ne sont plus exportables créent un vide que l’augmentation de la production saoudienne peine à combler. La demande croissant et l’offre se réduisant, les difficultés liées à une flambée du prix du baril étaient à craindre.
Début novembre 2018, Steven Mnuchin, secrétaire au Trésor américain, annonçait que huit États seraient autorisés à de nouveau importer du pétrole iranien pour une durée de six mois. Ces exemptions concernaient la Chine, l’Inde, la Turquie, le Japon, la Corée du Sud, Taïwan, l’Italie et la Grèce.
Questionné par Les Échos, Pierre Pahlavi, professeur au collège d’État-major des forces canadiennes, interprétait le fait « d’inclure [la Chine] dans le groupe des pays exemptés » comme « un moyen de la garder à l’œil ». Par ailleurs, la présence de deux pays européens, l’Italie et la Grèce, qui s’étaient prononcés en faveur du maintien de l’accord sur le nucléaire pouvait surprendre.
Une décision vivement contestée
L’administration Trump a donc mis fin à ces exemptions en début de semaine dernière. Mike Pompeo expliquait ainsi : « le but de l’opération reste simple : priver le régime des fonds qu’il a utilisés pour déstabiliser le Proche-Orient depuis quarante ans et pousser l’Iran à se comporter comme un pays normal ». Les États exempts s’exposeront donc à d’éventuelles sanctions de la part des États-Unis s’ils persistent à importer du pétrole iranien au-delà du 1er mai.
C’est une décision capitale pour ces pays qui devront soit faire face à la justice américaine, soit trouver rapidement des alternatives. Les importateurs asiatiques, notamment chinois et turcs, qui placent dans les hydrocarbures iraniens un besoin énergétique vital, pourraient être tentés de choisir la première option. Mevlut Cavusoglu, ministre turc des Affaires étrangères, déclarait « ne pas accepter ces sanctions unilatérales ». Le même discours émanait du côté de la diplomatie chinoise, déclarant « s’opposer aux sanctions unilatérales imposées par les États-Unis ». Et le premier client de l’Iran d’ajouter : « notre coopération avec l’Iran est ouverte, transparente, légale et légitime. Notre gouvernement est déterminé à défendre les droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises et à jouer un rôle constructif dans le maintien de la stabilité du marché mondial de l’énergie ».
Téhéran a vivement contesté cette décision, jugée « illégale » à l’image de l’ensemble des sanctions américaines. Vladimir Poutine, quant à lui, après avoir fait part de sa volonté de voir l’Iran autorisé à exporter son pétrole en toute liberté, a confirmé que la production de pétrole russe ne sera pas augmentée en vertu d’accords avec l’OPEP (Organization of Petroleum Exporting Countries) qui prendront fin en juillet 2019. Un son de cloche similaire à celui de Riyad qui ne compte pas augmenter sa production dans l’immédiat.
Clément Lichère