Tandis que le DoJ vient de saisir 32 domaines internet impliqués dans les campagnes d’influence russes, l’administration Biden accuse la Russie de tenter d’interférer dans les élections présidentielles de 2024 à travers « un effort soutenu ». Les manœuvres du « Good Old U.S.A. Project » sont dévoilées dans un document du FBI déclassifié le 4 septembre, qui rapporte également des tentatives de déstabilisation en Europe pour diviser les pays, discréditer les Etats-Unis et saper le soutien à l’Ukraine.
« The Good Old U.S.A. Project » : quand le Kremlin interfère dans les élections américaines
Le ministère de la Justice des Etats-Unis (DoJ) a annoncé le 4 septembre la saisie de 32 domaines internet utilisés par des acteurs soutenus par le gouvernement russe, pour mener des campagnes de désinformation et d’influence politique. « This is deadly serious, and we are going to treat it accordingly » a déclaré Merrick Garland, le procureur général des Etats-Unis. En plus de la saisie des 32 domaines, l’administration Biden poursuit pénalement deux ressortissants russes, et sanctionne dix individus et entités impliqués dans ces campagnes qui chercheraient à booster la candidature de Donald Trump. L’ensemble de ces mesures constitue la réponse publique la plus importante de l’administration Biden aux opérations d’influence russes présumées ciblant les électeurs américains.
Sous la direction de Sergei Kiriyenko, l’administration présidentielle russe, ainsi que des entreprises comme Social Design Agency et Structura National Technology, ont utilisé ces domaines pour réduire le soutien international à l’Ukraine, promouvoir les intérêts pro-russes et influencer les électeurs américains sans révéler l’implication du gouvernement russe. Les techniques incluent la création de contenu généré par intelligence artificielle et de faux profils de médias sociaux se faisant passer pour des citoyens américains, ou encore l’achat de publicités sur les réseaux sociaux pour générer du trafic vers des domaines cybersquattés.
Les notes déclassifiées sur les opérations psychologiques russes en Europe
Ces manœuvres psy-ops, articulées dans le « Good Old U.S.A. Project », sont révélées dans un document du FBI déclassifié le 4 septembre 2024 compilant documents, mémos et comptes-rendus de réunions de guerre psychologique russes. « We need to discredit the USA, Great Britain and NATO, and […] convey the truth about the war in Ukraine ». Outre les efforts du Kremlin pour interférer dans les élections américaines de novembre, l’Europe est également ciblée, et tout particulièrement l’Allemagne. La dépendance économique allemande à l’égard du gaz et des exportations russes serait un des leviers envisagés pour convaincre l’Allemagne de s’opposer à « la politique inefficace des sanctions. »
La France est spécifiquement visée aux côtés de l’Allemagne dans l’opération « Incitation aux conflits internationaux » (p29). Son objectif étant d’« intensifier les tensions internes […] afin de promouvoir les intérêts de la Fédération de Russie », ainsi qu’« influencer les conflits réels et créer artificiellement des situations de conflit » par le biais de « faux récits supplémentaires », de « fausses vidéos, documents et enregistrements de conversations téléphoniques », de « commentaires sur les médias sociaux » et de « fausses et vraies citations d’influenceurs ». Le document du FBI témoigne ainsi des ingérences connues du Kremlin à travers l’espace numérique, qui offre un potentiel de résonance inédit au narratif desservant la Russie dans ses conflits hybrides.
Agathe Bodelot
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