Les pôles de compétitivité sont devenus des acteurs majeurs de la croissance en France et ont vocation à fédérer les compétences. La politique de pôle de compétitivité lancée il y a maintenant plusieurs années a vocation à accompagner les PME dans leurs projets innovants en leur apportant soutien financier et réseau. Le but à terme est de créer des Etablissements de Taille Intermédiaire (ETI), les pôles se spécialisent en filière et fédèrent les PME, centre de recherche et grands groupes. A l’occasion du 4 ème forum annuel du pôle Astech, spécialisé dans l’aéronautique, l’espace et les systèmes embarqués, le Portail de l’IE est allé à la rencontre de Sébastien Courrech, directeur adjoint du pôle.
Pouvez-vous nous décrire quel est le rôle du pôle de compétitivité ASTech ?
Comme tous les pôles de compétitivité, notre premier objectif est de permettre à nos Grands Groupes, PME, laboratoires et académiques d’échanger et de travailler sur des projets de recherche sur un modèle collaboratif.
C’est là la raison d’être des pôles de compétitivité : faciliter les actions partenariales entre des acteurs qui n’en n’ont pas forcément l’habitude ou tout simplement susciter le réflexe d’échanger entre eux, tout en nous assurant que les projets vers lesquels ils s’orientent sont innovants avec des retombées économiques et sociales à moyen terme intéressantes. Le Pôle ASTech est très fier de son taux de projets retenus dans le cadre des FUI. ASTech a une stratégie basée sur la qualité de ses projets, aussi nous pouvons afficher que plus de 80% de nos projets labellisés ont fait l’objet d’un financement public.
Au-delà du périmètre cité ci-dessus, le pôle ASTech s’est également positionné pour porter la filière aéronautique et spatiale francilienne. La démarche, dans ce cadre précis, est plus orientée vers des actions de soutien au développement économique de nos PME franciliennes. Peu de pôles ont pris l’option de porter leur filière et pourtant, depuis que nous avons pris ce pari, nous avons pu constater la complémentarité qui existait entre les actions dites « pôles » et les actions « filière » à de nombreuses reprises. La recherche et le développement économique marchent de pair et les mettre entre les mains d’un seul et même opérateur est une démarche structurante.
Le 20 Mars se déroule le 4éme forum annuel du pôle ASTech, quel est le bilan que vous pouvez tirer de ces années d'existence ?
Quand on regarde d’où nous sommes partis, le taux de projets financés que nous pouvons afficher aujourd’hui, ou lorsque l’on voit la place qu’ASTech a pris sur le territoire national avec le soutien d’autant de membres, le bilan ne peut être que positif. Nous avons aujourd’hui près de 250 membres dont plus de la moitié de PME. Nos membres sont majoritairement franciliens, mais nombreux viennent également d’autres régions. C’est très gratifiant de voir que certaines PME qui ne bénéficient pas de pôles sur leur territoire, se tournent vers ASTech pour profiter de notre dynamique.
J’ajouterai que s’il y a une chose à retenir de ce forum, c’est l’enthousiasme !
L’enthousiasme de nos membres et de nos partenaires. Organiser une telle manifestation sur la base de « success stories » aurait pu s’avérer difficile car il faut mobiliser de nombreuses personnes qui sont souvent déjà très sollicitées. Néanmoins, tous ont répondu présents immédiatement. C’est cette appropriation du pôle par nos membres qui est le véritable succès d’ASTech, ils se sentent bien dans leur pôle et en confiance.
Quels sont les difficultés du pôle et les enjeux pour son futur ?
Un pôle de compétitivité est ni plus ni moins qu’une petite PME. Aussi, les difficultés d’une PME au quotidien sont celles que rencontre le pôle. C’est surement pour cette raison que les PME sont si proches de leurs pôles. La trésorerie est une véritable problématique dans les pôles de compétitivité. Une bonne partie de nos subventions sont réglées sur présentation de factures acquittées. Il nous faut donc faire l’avance de trésorerie en permanence, avant que les subventions ne se débloquent, (ce qui peut prendre entre 6 et 8 mois). Cette difficulté est très consommatrice de temps et l’énergie que nous consacrons à résoudre nos problèmes de gestion impacte notre disponibilité pour mener d’autres actions.
L’enjeu principal est donc de trouver un modèle économique sain, qui reposera de plus en plus sur des financements privés. Cette difficulté mise à part, les enjeux du pôle sont ceux de son industrie : soutenir toujours plus l’innovation pour apporter des solutions susceptibles de répondre aux attentes du marché. Une aéronautique toujours plus propre, plus performante et mieux intégrée dans son environnement.
Le pôle dispose-t-il d'un dispositif d'Intelligence Economique ? Dans cette optique, a-t-il un service de veille qui diffuse de l'information à destination de ses membres?
Nous sommes une petite structure donc non, nous n’avons pas de service de veille en interne.
Nous avons une réunion d’équipe régulière pour échanger sur les informations que nous avons pu, les uns et les autres, obtenir de nos différentes rencontres et nous faisons un suivi des informations stratégiques publiées dans la presse spécialisée.
Pour nos PME, une action, portée par la CCI Essonne, mise en place dans le cadre de notre plan filière Perform’Aéro, permet à une équipe d’expert de rechercher des informations stratégiques visant à répondre aux préoccupations technologiques, commerciales, concurrentielles ou environnementales de nos PME.
Y-a-t-il un service d'accompagnement des membres du pôle à l'international ? Sur les salons, ou pour la candidature aux appels d'offres ?
Les actions menées pour nos PME à l’international sont de deux ordres. Les actions qui visent à monter des missions pour des projets de recherche collaboratifs, et des missions plus spécifiquement pour faire du business.
Dans un cas comme dans l’autre, les PME sont accompagnées soit par le pôle soit par un de ses partenaires (CCI, GIFAS, …). Je souligne l’importance des soutiens qui sont apportés par nos financeurs dans le cadre de ces missions et sans lesquels nous ne serions pas en mesure de mener à bien cette action.
Comment appréhendez-vous les questions de sécurité économique ?
Nous sommes très sensibles à ces problèmes de sécurité économique, mais il faut bien admettre que si les actions de sensibilisation sont faciles à mettre en œuvre, il n’en reste pas moins qu’il reste un gros travail à faire pour convaincre nos PME que la sécurité de leurs structures passe par leurs capacités à se protéger.
Régulièrement nous faisons appel aux services de l’Etat pour ce travail de sensibilisation. Les PME qui font l’effort de participer à ces formations repartent convaincues du bien fondé de la vigilance que nous recommandons. Mais il y a encore un énorme effort à faire pour toucher plus largement nos PME innovantes.
Du coté du pôle, toute l’équipe permanente est sensibilisée aux aspects de la sécurité économique et nous sommes particulièrement prudents au quotidien. Nous sommes hébergés sur un site protégé par les services du Ministère de la Défense, et nos infrastructures sont donc convenablement sécurisées. Toutefois, on peut toujours aller plus loin dans le domaine de la sécurité et un effort devra être fait dans les mois à venir sur notre matériel informatique, mais bien que nous soyons convaincus du bien fondé de ce type d’investissement, nous nous voyons toujours quelque peu freinés par les problèmes de trésorerie évoqués plus haut.
Interview réalisée par Mathieu Dupressoir