Charles Rodwell : pour une politique offensive d’attractivité des territoires

Pays le plus attractif de l’Europe pour la 4e année consécutive, la France bénéficie de nombreux investissements étrangers qui ne sont pas toujours maîtrisés. Les politiques et les industriels ne collaborent pas suffisamment pour comprendre ce qu’est un bon investissement. Tel est le constat fait par le député Charles Rodwell, qui suggère avant tout de s’interroger sur comment contrôler les investissements sur le territoire.

La France est le pays européen le plus attractif pour les entreprises françaises et européennes. Ce statut est le fruit de mesures trans-partisanes sous les quinquennats de Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron. Aujourd’hui la France attire de nombreux investisseurs qui ne sont pas toujours contrôlés. Dans un contexte de tensions géopolitiques majeures et de guerre économique omniprésente, Charles Rodwell rappelle la nécessité pour la France d’être maîtresse de son industrie. En décembre 2023, il publie un rapport sur la relance industrielle et la souveraineté économique, intitulé « pour une politique d’attractivité d’attaque au service de l’indépendance et de la sécurité économiques de la France ». Elle « dispose de tous les atouts pour développer une politique d’attractivité « d’attaque », plus offensive et plus ciblée, pour attirer en priorité les entreprises françaises et internationales qui viendront renforcer la sécurité de [ses] chaînes d’approvisionnement stratégique ».

Afin de conserver un contrôle sur toute la chaîne de valeur, le député suggère de contraindre les investisseurs à respecter certaines règles afin que le pays puisse conserver une indépendance économique et industrielle.

La France dispose déjà d’un service, le SISSE, pour bloquer certains investissements d’entités étrangères identifiés comme menaçant pour les intérêts stratégiques économiques du pays. Cependant, le député considère que ce n’est pas suffisant. Il insiste sur la nécessité de coopération entre les secteurs privés et publics pour mettre en place une stratégie offensive d’attractivité des territoires.

Filtrer les investissements étranger : l’exemple belge

Depuis 2022, un accord de coopération a été signé par les entités fédérales et fédérées belges pour filtrer et bloquer les investissements étrangers. Fort de sa position, le port d’Anvers, joyaux de la couronne belge, attire de nombreux investisseurs.  Le filtrage est réalisé en 3 étapes distinctes. D’abord la politique flamande se concentre sur les manques des filières stratégiques. Ensuite, l’accord prévoit de chercher en priorité des investisseurs nationaux et européens. En dernier recours, la Belgique cherche des fournisseurs du marché mondial auxquels elle propose une offre d’implantation (donc un accès au marché européen) contre des engagements. Il s’agit en réalité d’une offre d’implantation offensive.

Si la Belgique parvient à mettre en place cette politique, la France devrait être capable d’en faire autant, d’autant plus que la direction générale de l’armement le fait déjà. En s’inspirant de l’exemple belge, Charles Rodwell préconise de mettre en place une politique d’attractivité dite d’attaque en 3 étapes. Il faut identifier les besoins des filières stratégiques ; identifier les fournisseurs de produits critiques et essentiels pour l’industrie française (d’abords à l’échelle nationale et européenne puis sur le marché international) ; proposer une offre prioritaire d’implantation sur le territoire avec une réglementation stricte aux fournisseurs identifiés.

Une politique publique offensive : le cas de l’Inflation Reduction Act

D’après Charles Rodwell, les politiques publiques les plus efficaces et offensives sont américaines, notamment grâce à l’Inflation Reduction Act, datant de 2022. En s’inspirant de la méthode américaine, le député propose dans son rapport d’élaborer une politique publique offensive sur 3 axes stratégiques : sécuriser le porteur du projet d’implantation (investisseurs et collectivité) ; accélérer les projets d’implantation en France (rapidité) ; mobiliser des ressources financières publiques conséquentes afin de stimuler l’investissement privé (ampleur).

Malgré une «loi industrie verte qui a été un premier jalon décisif», ce triptyque doit inspirer le gouvernement français afin d’élaborer une  « politique industrielle et d’attractivité de la France et de l’Europe pour les dix ans qui viennent ». A ce titre,  vingt-huit propositions réglementaires et législatives articulées autour des 3 axes cités ci-dessus vont être discutées au Sénat et à l’Assemblée nationale dans les prochains mois.

Charles Rodwell souligne enfin dans son rapport, que cette politique d’attractivité « d’attaque » ne sera possible que si l’État initie un processus de pérennisation du contrôle des vulnérabilités des investissements dans les produits critiques. Ce dernier devra aussi effectuer une « revue globale a posteriori, tous les trois ans, de la réussite et de la pertinence des implantations effectuées ». Le député affirme que relancer le tissu industriel est possible si les partis politiques font fi de leurs différends et collaborent pour un même objectif : une France au tissu industriel fort et souverain.

Finalement, malgré la désindustrialisation passée du pays, des industries subsistent et résistent à toutes formes d’attaques. Elles ont su faire preuve de résilience et sont pleines de ressources. De fait, elles seront des exemples concrets pour la mise en place de politiques d’attractivités offensives.

Tiphaine de Rauglaudre pour le Portail de l’IE

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