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L’Agence nationale de lutte contre les manipulations de l’information, nouvelle arme anti-fake news du gouvernement

Pour lutter contre les manipulations de l’information de l’étranger provenant d’acteurs étrangers, le Secrétariat Général de la Défense et de la Sécurité Nationale (SGDSN) a annoncé la création en son sein d’une agence nationale de lutte contre les manipulations de l’information. A l’ère des guerres de l’information, cet outil a pour objectif de lutter contre les ingérences étrangères, principalement dans les périodes électorales, qui représentent un défi pour les démocraties.

Stéphane Bouillon, secrétaire général de la SGDSN, en a surpris plus d’un. Auditionné par la Commission de Défense de l’Assemblée Nationale, il a annoncé la création en septembre d’un nouveau service placé sous sa direction, qui mobilisera à terme une soixantaine de personnes, travaillant uniquement à partir de sources ouvertes. Ici, le but n’est pas de vouloir établir une vérité prédéfinie au service de l’exécutif tel un "œil de Moscou”, mais de détecter les attaques informationnelles et d’en trouver la source. Pour veiller à cet objectif et éviter toutes déviances, un comité éthique et scientifique sera mis en place, comprenant des journalistes, magistrats, chercheurs, ambassadeurs, et membres du Conseil d’Etat et du Conseil Supérieur de Défense.

Cette agence fait suite à la « Task force Honfleur », mobilisée en février par le Président de la République à la suite de campagne de désinformation sur les réseaux sociaux après l’assassinat de Samuel Paty. Celle-ci avait pour objectif de détecter et de comprendre cette attaque et a finalement conclu que son origine était turque. Cette prise de conscience des ingérences étrangères, particulièrement dans le processus de décision démocratique avait été révélé aux yeux du grand public lors de la révélation de secrets d’Etat incriminant Hillary Clinton en pleine campagne en 2016. En France, les Macron Leaks, campagne de désinformation mélangeant rumeurs, fake news et faux documents visant à nuire au candidat LREM, avaient émergé sur la toile seulement deux jours avant le second tour de l’élection présidentielle de 2017. Depuis, les périodes d’élections sont particulièrement scrutées, et c’est dans cet objectif qu’a été implémentée cette nouvelle agence, à un an de la future élection présidentielle française.

La France n’est pas pionnière en la matière. L’Union Européenne avait créé en 2015 l’East StratCom Task Force sous l’égide du Service Européen pour l’Action Extérieure, afin de  lutter contre la désinformation, auprès de ses voisins orientaux. De la même manière, en 2016, a été créé aux Etats-Unis un Global Engagement Center au sein du Département d’Etat, pour lutter à l’origine contre la propagande de Daech, auquel s’est ajoutée la désinformation et/ou influence étrangère en ligne. Des initiatives similaires ont pu être prises en République Tchèque ou en Suède.

Cette nouvelle agence rentre donc dans ce cadre, avec un ciblage précis sur les campagnes visant à nuire aux intérêts étatiques ou publics, et témoigne d’une prise de conscience de ce problème, trois ans après la promulgation de la loi contre les fake news. Pourtant, les acteurs privés, notamment les entreprises, sont aussi la cible de campagne de ce genre, notamment pour la dispute de contrats onéreux, à l’image des Rafales en Inde ou de Naval Group en Australie. Il s’agirait désormais de considérer ces risques, pouvant être préjudiciables pour les intérêts français.

 

Thibault Menut

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