Négociations américano-iraniennes à Vienne : cartes posées et paris lancés

La reprise des négociations sur le nucléaire iranien à Vienne, le mardi 6 avril 2021, dont Téhéran et Washington sont les principaux protagonistes, pourrait laisser imaginer une levée des sanctions américaines actuellement en vigueur à l’encontre de l’Iran et un retour de l’embargo des Nations-Unies sur ses armes. Ces négociations arrivent à point nommé pour les deux camps qui gagneraient chacun en influence.

Alors que les Etats-Unis sont sortis unilatéralement de l’accord sur le nucléaire iranien en 2018, cumulant dès lors les sanctions économiques et financières à l’encontre de la République islamique, « un nouveau chapitre s’est ouvert » mardi 6 avril, a estimé Hassan Rohani, le Président iranien. Depuis son investiture, Joe Biden affirme son souhait de réintégrer l’accord iranien à l’exact opposé de Donald Trump, qui qualifiait l’accord comme « le pire accord jamais signé par les Etats-Unis », selon ce dernier. Toutefois, les conditions que chacun impose pour que cela se fasse sont très contrastées et l’Iran s’est entre temps écarté du cadre de l’accord en dépassant la limite de 20% autorisée pour son stock d’uranium faiblement enrichi, comme l’indiquent deux rapports de l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA) de juillet 2019.

 L’enjeu de ces discussions qui se sont ouvertes à Vienne le 6 avril 2021 est donc de trouver le moyen de réintégrer les Etats-Unis, tout en s’assurant que Téhéran se conforme à l’accord conclu en 2015. Le Plan d’Action Global Commun (PAGC), avait levé les sanctions américaines et fixé un cadre au nucléaire iranien. En s’en retirant, les sanctions ont été rétablies, ce qui a mené l’Iran à sortir à nouveau du cadre convenu. Par ailleurs, en août dernier, Washington a échoué dans le prolongement de l’embargo sur les armes iraniennes expiré au 18 octobre 2021, interdisant notamment la vente d’armes et d’équipements militaires lourds à l’Iran. Ces tentatives américaines ont été plusieurs fois rejetées par le Conseil de Sécurité, aux termes de la résolution 2231. Un retour des États-Unis pourrait donc laisser présager un retour de ces restrictions.

 Les négociations ainsi introduites laissent espérer que les relations entre Téhéran et Washington se réchauffent et soient rapidement rétablies. Toutefois, l’Iran demande la levée imminente des sanctions et conditionne une entrevue avec les Etats-Unis à cette unique condition. En effet, la levée des sanctions occasionnée par l’accord de 2015 avait profité à l’économie iranienne. Le pays, grand producteur de pétrole et deuxième réserve mondiale de gaz, avait pu à nouveau exporter ses matières premières, notamment vers l’Union européenne.

A l’heure actuelle, et selon les Echos,  “les échanges se font à huis-clos, les « 4+1 » d’un côté (Iran, Chine, France, Royaume-Uni et Russie), et de l’autre l’Iran et l’Union européenne qui endosse le rôle de navette diplomatique, intermédiaire entre les deux puissances”Les pronostics sont optimistes et l’on peut espérer une avancée rapide et efficace des négociations, comme s’enthousiasme Ned Price, conseiller politique américain : "Elles nous fournissent une meilleure compréhension de l'état d'esprit de l'Iran et nous pensons qu'à l’inverse, Téhéran quittera cette session de discussions avec une meilleure compréhension de ce que nous sommes disposés à faire". Si l’on se fie à cette déclaration, les négociations se jouent à armes égales et chacun y trouvera son compte. L’accord serait en effet gagnant-gagnant: Washington pourrait faire perdre un peu d’influence à la Chine au Moyen-Orient et la levée de l’embargo serait une victoire pour les réformistes à Téhéran avant les élections.

 

Jehanne Duplaa

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