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[JDR] Les banques face au risque climatique

Que ce soit de la part du régulateur et des superviseurs ou bien de la part de la société civile, les banques font face à des demandes pressantes de transformer leurs activités en tenant compte du changement climatique. C’est ainsi qu’une véritable gestion du risque climatique apparaît au sein de plus en plus de banques.

La Task Force on Climate-related Financial Disclosures définit le risque climatique en distinguant deux composantes différentes. D’une part, elle identifie les risques de transition, qui peuvent s’expliquer comme étant le résultat des effets de la mise en place d’un modèle économique bas carbone. Ce risque recouvre aussi bien les risques réglementaires et juridiques (comme les mécanismes de tarification du carbone pour réduire les émissions de GES) que les risques technologiques (comme les innovations technologiques favorisant la lutte contre le changement climatique), que les risques de marché (comme les variations du prix des matières premières) et que les risques de réputation (qui peuvent s’expliquer par les perceptions des clients). D’autre part, elle identifie les risques physiques, qui peuvent se comprendre par les dommages qui sont directement liés à des phénomènes climatiques et météorologiques, qu’ils soient aigus (catastrophe naturelle) ou bien chronique (liés à des changements à plus long terme des modèles climatiques et à la hausse des températures sur le long terme). 

Le régulateur et les superviseurs mettent le risque climatique au premier plan de leurs agendas

En novembre 2020, l’Autorité Bancaire Européenne (ABE) lançait une consultation publique sur les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Cette consultation amènera la publication d’un rapport en juin 2021 dans lequel il est fort probable que ces risques soient intégrés dans l’auto-évaluation des besoins en fonds propres de liquidités. Cette consultation indique notamment aux banques comment intégrer les risques ESG dans leur gestion du risque à tous les niveaux (gouvernance, contrôle interne…). Elle s’adresse également aux superviseurs afin de leur indiquer comment intégrer le risque ESG lorsqu’ils supervisent les banques. Il est notamment mentionné que les stress test sur cette problématique est un outil permettant de définir l’encadrement de ces risques. Ainsi, l’Autorité de Contrôle et de Résolution Prudentielle (ACPR) a mis au point un exercice pilote climatique dont l’objectif est de tester la résilience des établissements financiers face au financement de la transition énergétique à l’horizon 2050. Il ressort de cet exercice de simulation, la difficulté de le mener qui s’explique notamment par l’existence d’un aléa du changement climatique et ses effets qui peuvent être bien plus significatifs que des chocs macroéconomiques et financiers plus classiques. Récemment encore, le 1er mars 2021, l’ABE a diffusé une consultation sur la publication en pilier III des risques ESG, qui part notamment du constat sur les limitations liées aux données disponibles sur ces risques.

Piloter le climat comme un risque

Il est indéniable que le changement climatique représente aujourd’hui pour les banques une variable qui va avoir des impacts non seulement sur la valeur de leurs portefeuilles mais également sur la capacité des contreparties à être solvable. C’est pourquoi les banques ont pris conscience de ce risque climatique et l'intègrent désormais dans leur gestion du risque, outre les nombreux engagements qu’elles prennent en faveur de la lutte contre le changement climatique. Ainsi, les grandes banques françaises ont instauré des politiques de désengagement des énergies fossiles, en mettant, par exemple, « en place des politiques exigeantes relatives à l’évolution du « mix énergétique » de leurs clients ».

Pour piloter efficacement ce risque, les banques ont fait évoluer leur modèle de gouvernance en y intégrant désormais le climat comme un véritable risque à part entière, en témoignent les nombreux recrutements d’experts sur le climat ces dernières années. Par ailleurs, les banques ont commencé à réfléchir à la manière de modéliser ce risque, ce qui leur permet d’observer et d’évaluer les changements de paradigme afin de placer des indicateurs de suivi cohérents et efficaces du risque climatique. Elles cartographient également leurs actifs et parties prenantes afin d’identifier leurs clients exposés à ce risque. En cela, les banques tentent au maximum de devancer la potentielle future introduction de ce risque au sein du dispositif de surveillance prudentielle, ce qui les contraindrait d’une certaine manière.

L’exemple du Green IT

Actuellement, les banques font face à un double enjeu. D’une part, elles font face aux pressions écologiques grandissantes de la part de la société civile, en témoignent notamment certains rapports d’ONG. D’autre part, elles font face au phénomène de la numérisation croissantes de leurs activités, en atteste la place prépondérante des systèmes d’informations qui automatisent nombres de leurs activités (cf. paiements en ligne, relation-client à distance…). Réduire l’empreinte du numérique, c’est généralement un pas significatif qu’ont fait les banques, en tentant notamment de concilier leurs objectifs de lutte contre le changement climatique avec la numérisation de leurs activités. Et ce sont très souvent sur les centres de données, très énergivores, que les banques ont axé une partie de leurs politiques de lutte contre le changement climatique.  

                                                           François-Joseph PITIOT pour le club Risques de l’AEGE

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