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L’Assemblée Nationale vote en faveur du renforcement du contrôle des investissements étrangers en France

Le 4 octobre dernier, les députés ont adopté l’article 55 du projet de loi PACTE renforçant et élargissant la procédure d’autorisation préalable d’investissements étrangers en France (IEF). Objectif : renforcer la protection des secteurs stratégiques français.

« Avec PACTE, nous renforçons les pouvoirs de l’État sur le contrôle des investissements étrangers en France. Quel est l’objectif ? Éviter le pillage de nos technologies ».

Bruno Le Maire, le 4 octobre 2018.

 

Le projet de loi PACTE, porté par le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire, a pour ambition de simplifier la création et la croissance des entreprises, mais aussi de protéger les entreprises stratégiques françaises. Parmi les mesures envisagées, l’article 55 du projet de loi renforce le régime des Investissements étrangers en France (IEF) en clarifiant les pouvoirs de contrôle du ministre de l’Économie et en affinant le régime des sanctions.

 

Le contrôle des investissements étrangers en France est aujourd’hui encadré par le décret du 14 mai 2014, établi en réaction au rachat d’Alstom par General Electric. M. Montebourg, alors ministre de l’Économie et du redressement productif, y avait fait inscrire le contrôle des investissements dans certains secteurs : l’énergie, les transports, les télécoms, l’eau et la santé. Il prévoyait notamment en son article 7 qu’un investissement puisse être refusé, après décision motivée du ministre, s’il « existe une présomption sérieuse que l’investisseur [soit] susceptible de commettre » une infraction pénale ou s’il est nécessaire « d’assurer la préservation des intérêts nationaux ».

 

Alors qu’un projet de décret est actuellement à l’étude au Conseil d’État pour élargir le champ d’application du contrôle des investissements à de nouveaux secteurs stratégiques (intelligence artificielle, drones, stockage de données, aérospatial, production de semi-conducteurs), le projet de loi renforce les procédures de contrôle de ces IEF. 

 

L’article 55 du projet de la loi prévoit en effet plusieurs mesures renforçant la protection des entreprises stratégiques françaises :

  • La liste des secteurs relevant de la procédure d’autorisation préalable est élargie ;
  • Les investisseurs et entreprises françaises peuvent solliciter l’administration pour savoir en avance si l’opération d’investissement envisagée relève de cette réglementation ;
  • Les pouvoirs de police administrative du ministre sont renforcés en complément de son pouvoir d’injonction : il peut enjoindre l’investisseur à déposer une demande d’autorisation, modifier l’opération ou rétablir la situation antérieure. Il peut également retirer l’autorisation, ou imposer la sollicitation d’une nouvelle autorisation ;  
  • Le ministre dispose en outre d’un pouvoir d’injonction, avec ou sans astreinte, pour obliger les investisseurs à respecter les conditions initiales ou de nouvelles conditions fixées ;
  • En cas de risque d’atteinte à l’ordre public, la sécurité publique ou la défense nationale, le ministre de l’Économie est habilité à : suspendre le droit de vote de l’investisseur, établir l’impossibilité de disposer d’actifs ou de percevoir des dividendes, ou encore désigner « un mandataire chargé de veiller au sein de l’entreprise à la protection des intérêts nationaux », qui pourrait notamment « faire obstacle à toute décision des organes sociaux de nature à porter atteinte à ces intérêts » ;
  • Le ministre disposerait enfin de la possibilité de clarifier les opérations réalisées en autorisant une opération a posteriori tout en sanctionnant l’investisseur, en rétablissant une situation antérieure ou encore en imposant la sollicitation d’une autorisation.

 

Le régime des sanctions est également affiné et renforcé par cet article. Elles pourront être prononcées si des opérations sont réalisées sans autorisation préalable, par fraude ou encore en cas de non-respect d’une injonction. Les amendes pourraient alors atteindre le double de l’investissement irrégulier ou encore 10 % du chiffre d’affaires annuel de la société cible.

 

Pour Guillaume Kasbarian (député LREM), ces mesures s’alignent sur les « meilleurs standards internationaux comme l’ont fait les Américains avec une réforme de CFIUS», et si l’élargissement des autorisations ne se généralise pas à l’ensemble des secteurs, c’est « pour ne pas envoyer un signal ultra-protectionniste », mais faire en sorte que la France adopte « une politique industrielle conquérante dans un contexte de compétition mondiale ».

 

Alban Léger