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Tunisie : Pékin apporte son aide pour l’établissement de l’académie diplomatique

La Chine va participer à la création de l’Académie diplomatique de Tunis, destinée à la formation de ses diplomates. Longtemps souhaitée, les travaux devraient commencer en mai prochain.

Le mardi 6 février 2018, un accord de partenariat technique et économique pour la création d’une Académie diplomatique a été signé entre Tunis et Pékin. En août 2018, des experts chinois s’étaient rendus en Tunisie pour concevoir une première maquette de l’Académie.

Dans un entretien pour Xinhua du 7 février 2019, le directeur de l’Institut diplomatique pour la formation et les Etudes, Mondher Dhraief est revenu sur le projet, se félicitant que cette académie « constitue une belle manifestation de la réussite d’une coopération fructueuse entre la Tunisie et la Chine, mais surtout du rapprochement entre leurs peuples respectifs ». «La Chine aura une exceptionnelle empreinte dans la concrétisation d'un rêve tunisien: la construction d'une Académie diplomatique purement tunisienne» a-t-il ajouté.

L’Académie doit remplacer l’Institut diplomatique, pour davantage se concentrer sur la recherche et la formation, en offrant plus de cycles de formation, de matières et de séminaires. Plusieurs départements la composeront, dont des laboratoires de recherche sur l’actualité internationale, de prospective et planification, ainsi qu’un conseil scientifique composé de chercheurs locaux et étrangers. « Outre la gestion administrative quotidienne, purement tunisienne, l'académie diplomatique aura un conseil scientifique qui sera ouvert à des formateurs et diplomates étrangers émanant de pays amis, notamment la Chine » précise Dhraief.

La structure, d’une superficie de 2 hectares, sera construite avec l’aide financière du partenaire chinois (un don de 200 millions de yuan, soit environ 26 millions d’euros). Les travaux débuteront en mai prochain, pour coïncider avec la journée nationale de la diplomatie, mais également pour le 55e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Tunisie et la Chine et la livraison est prévue pour 2020. Mondher Dhraief rappelle ainsi que la Tunisie fût l’un des premiers pays à reconnaitre la Chine : Tunis a en effet reconnu la République populaire de Chine le 9 janvier 1964[1].

 

Un rapprochement diplomatique qui intéresse les deux parties

Conscient des enjeux géoéconomiques futurs liés à l’explosion de la démographie africaine, la Chine a établi une stratégie d’influence sur le continent depuis déjà plusieurs années . Pékin et Tunis partagent donc de fait des intérêts stratégiques communs, tels que la stabilité et ou le développement régional.

La Tunisie a par ailleurs adhéré à l’initiative One Road One Belt(Belt & Road Initiative- BRI) le 11 juillet 2018, à l’occasion du 8ème forum sino-arabe à Pékin. Les ministres des Affaires étrangères des deux pays avaient alors signé un mémorandum d'entente, laissant prévoir des partenariats de grands projets d’infrastructures (port en eaux-profondes, autoroutes, etc.) prévus dans le Plan de développement tunisien pour la période 2016-2020. Ce nouveau rapprochement diplomatique est une opportunité pour Tunis, embourbé dans une crise économique majeure. En rejoignant la BRI, la Tunisie a accès à des financements rapides et sans les contraintes du FMI ou de l’Union européenne.

Le 2 janvier dernier, les ministres des Affaires étrangères des deux pays ont échangé sur les actions possibles pour renforcer la coopération bilatérale entre la Tunisie et la Chine au niveau du partenariat stratégique. Ont été notamment abordées les prochaines manifestations économiques régionales, dont le Forum des affaires sino-arabe.

Pour Mohamed Sahbi Basly, président de la Chambre de Commerce Tunisie-Chine, l’attrait chinois pour la Tunisie s’explique par sa position géographique : elle se situe au centre des échanges entre l’Afrique, l’Europe, le Maghreb et le Proche-Orient. La Tunisie partage également une longue histoire avec plusieurs pays régionaux[2] et possède une main-d’œuvre qualifiée et généralement polyglotte. Cependant, il reconnait que le marché national n’est pas le plus attractif pour les Chinois, qui visent de plus grands marchés et vont se servir de la Tunisie comme hub logistique. Une position qu’assure déjà le Maroc.

Déjà initiatrice de l’intelligence économique francophone, et sur le point d’accueillir en avril prochain le Forum des affaires sino-arabe cité précédemment, ainsi que le Forum économique tuniso-chinois, la Tunisie cherche également à développer son influence régionale.

L’Académie devrait ainsi permettre au pays d’assurer la formation, au-delà des locaux, de diplomates arabes et africains. Comme l’indique Mr.Dhraief, ce projet d’académie est issu de la volonté de l’Etat de « faire développer sa politique extérieure, et par conséquent, de promouvoir les compétences diplomatiques de la Tunisie », ajoutant que l’une des ambitions est « la récupération du rayonnement de la diplomatie tunisienne en Afrique, au Moyen-Orient et dans le monde entier ». L’Académie assurera aussi des cours de langues étrangères, notamment d’arabe pour les étrangers (qu’ils soient d’Afrique, d’Europe, de Chine ou d’au-delà).

 


[1] En comparaison, la France de De Gaulle l’a reconnu le 27 janvier 1964

[2] A cet effet, lire le livre La route des consuls, les territoires de la diplomatie de Tunis d’Adnen El Ghali.