Affaire Huawei : le Canada au centre de la guerre économique entre la Chine et les États-Unis

Lundi 20 janvier 2020 a eu lieu la première audience au tribunal à Vancouver (Canada), de la directrice financière de Huawei. Au cœur de la guerre économique et technologique entre la Chine et les États-Unis, les magistrats canadiens examinent la possible extradition de l’accusée vers les États-Unis.

Meng Wanzhou, directrice financière et fille du fondateur de Huawei, a été arrêtée au Canada le 1er décembre 2018 à la demande des autorités américaines et risque une peine maximum de 30 ans de réclusion. Les États-Unis l’accusent d’avoir violé les sanctions commerciales américaines contre l’Iran. La haute responsable est accusée d’avoir fraudé en opérant des déclarations erronées à des institutions bancaires américaines en présentant la société Skynet comme un partenaire de Huawei, alors qu’il s’agissait d’une filiale du géant chinois. Son objectif était de vendre du matériel informatique à « Mobile Telecommunication Co », le plus grand opérateur de téléphonie mobile iranien. 

Plus d’un an après cette arrestation s’ouvraient, ce lundi 20 janvier 2020, les premières audiences du procès en extradition de la femme d’affaire. Ce dernier devant durer cinq jours. Pour échapper à son renvoi devant la justice américaine, Mme Meng et ses avocats s’appuient sur la question de la double incrimination. Depuis le début de cette affaire, le Canada s’est enlisé dans une crise diplomatique et doit faire face à des représailles chinoises faisant pression sur le système judiciaire canadien. Des sanctions commerciales, comme la restriction du commerce de produits de grosses exportations ou la suspension de milliards de dollars d’importations de produits agricoles canadiens ont été mises en place. Par ailleurs, deux ressortissants canadiens ont été arrêtés en Chine pour des faits d’espionnage et sont toujours emprisonnés actuellement. Dans le même temps, treize Canadiens avaient été détenus début 2019, avant que huit ne soient relâchés peu de temps après. 

Le Canada est pris en étau entre les deux grandes puissances et semble incapable de s’en extirper. Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, martèle que la justice canadienne est indépendante et que l’accord d’extradition doit être respecté. Dans le même temps il a, à plusieurs reprises, demandé à la Maison Blanche de ne pas signer de nouvel accord commercial avec la Chine tant que la question des deux prisonniers canadiens ne sera pas résolue. Les États-Unis ne semble prêter que peu d’attention aux demandes de Justin Trudeau, puisqu’un accord international devant mettre fin à la guerre commerciale a été signé ce 15 janvier 2020. Si ce dernier ne met pas fin aux accusations planant sur Huawei, il marque une désescalade dans le conflit économique opposant les deux pays. La résolution du cas Huawei devrait être l’affaire d’un second accord portant sur la cybersécurité mais dont les négociations n’ont pas encore commencé. 

Au-delà des conséquences du procès de Meng Wanzhou sur les futures négociations, cette affaire rappelle aux pays occidentaux les risques inhérents à s’immiscer dans une guerre commerciale, ne serait-ce que dans le cadre d’une procédure d’extradition. Le risque de voir ses ressortissants pris en otages et la perte de millions d’euros d’échanges commerciaux. 

Emeline STRENTZ