Malgré le dispositif de contrôle des investissements étrangers et faute de groupes français intéressés par les activités de Photonis, l’avenir des industries de défense propriétaires de technologies d’intérêt souverain risque de s’écrire aux États-Unis, au moment où le ministère des Armées annonce la création d’un fonds d’investissement pour l’innovation de défense.
Au cours des derniers mois, le Portail de l’IE s’est fait l’écho des derniers mouvements possibles ou effectifs de vente d’actifs stratégiques liés à l’industrie de défense. D’après les informations des Echos, l’attrait des investisseurs américains pour les technologies de défense s’est récemment accru, comme on a pu le constater avec la vente conditionnelle de Latécoère au fonds Searchlight. Toutefois, les 10% de participation française au capital requis par l’accord de cession ne se sont pas concrétisés, faute de prise de contrôle totale des 90% restants par l’acquéreur lors de l’OPA.
Par ailleurs, sollicitées par la DGA, Safran et Thalès n’ont pas souhaité s’engager dans la reprise de Photonis, alors que des groupes industriels américains (parfois concurrents) tels que Teledyne, Excelitas ou Heico ont préparé des offres de rachat de cette PME spécialisée dans les nouvelles technologies optiques.
Appelée à être renforcée au 1er avril 2020 et testée dans son efficacité par ces premiers dossiers publics, la procédure de contrôle des investissements étrangers se heurte ainsi à la disponibilité des ressources et des acteurs susceptibles de contribuer à la préservation de la souveraineté nationale. À l’heure de la création d’un nouveau fonds d‘investissement pour l’innovation dans la défense destiné à éviter la fuite outre-Atlantique des technologies à haute valeur ajoutée, le croisement de deux signaux faibles contradictoires illustre la nécessité pour la France de rehausser sa capacité à protéger les éléments clés pour son autonomie stratégique.
Louis-Marie Heuzé