Le Cheikh du Qatar, Tamim Bin Hamad al Thani, a atterri mardi 5 janvier en Arabie Saoudite pour participer au sommet du Conseil de coopération des États arabes du Golfe (GCC). En parallèle, le 4 Janvier le Koweït annonçait que l’Arabie Saoudite allait rouvrir ses frontières maritimes, aériennes et terrestres avec le Qatar après plus de 3 ans de fermeture: la guerre d’influence pour isoler l’Iran continue.
Depuis le 5 juin 2017, le Qatar subit un blocus aérien, maritime et terrestre de la part de ses voisins arabes et certains de ses partenaires au sein du GCC. En effet, sous l’influence des Émirats Arabes Unis, l’Arabie Saoudite, l'Egypte, le Bahreïn, et le Yémen avaient coupé leur relation avec le riche émirat qatari. Ces pays lui reprochaient notamment de financer le terrorisme via son soutien aux organisations proches des frères musulmans ainsi que ses relations avec l’Iran, tous deux ennemis désigné de Washnigton. Il est vrai que le Qatar partage avec l’Iran le plus grand gisement gazier du monde et entretient à ce titre des relations diplomatiques et économiques avec le régime des mollahs. En outre, les deux pays soutiennent aussi la cause palestinienne. Enfin en Janvier 2020, après qu’un avion d’Ukraine International Airlines ait été abattu par erreur, l’Émir du Qatar s'était déplacé en personne en Iran pour apaiser les tensions avec la communauté internationale.
Le blocus imposé par les voisins du Qatar devait affaiblir son économie et couper le pays de tous ses soutiens. Alors qu’une majorité des importations de biens et services provenaient de Dubaï, Doha avait dû rapidement adapter sa chaîne d’approvisionnement en achetant notamment des fermes en Australie, en important plus de 14000 vaches et en diversifiant ses relations avec l’Europe et l’Asie. In fine le blocus a renforcé l’économie du pays et lui a permis de développer une plus grande résilience. Voyant sa position internationale renforcée, ses voisins cherchaient depuis plusieurs mois à sortir de cette situation afin de ramener la puissance qatarie dans le giron américaino-arabe.
Par ailleurs, ces derniers mois plusieurs signes avaient laissé penser à un apaisement de la situation au Moyen Orient. Sous l’impulsion de l’administration Trump, Israël et les Émirats Arabes Unis ont signé en septembre 2020 des accords de normalisation. L’objectif affiché est de réaliser un encerclement de l’Iran, alors même que le pays continue d’avoir des relations économiques importantes avec ses voisins. Washington cherchant à l’isoler sur la scène internationale. En parallèle, l'Iran et le Qatar ont tous deux prévu d’augmenter leur production de gaz. Le premier via un accord avec la Chine, le second par la réalisation du projet North Field Expansion, qui vise à maintenir l’émirat comme premier producteur de gaz liquéfié au monde. Dans ce cadre, Total suite à son retrait du projet iranien South Pars est devenu partenaire de Qatar Petroleum pour l’exploitation du gisement North Field, tout comme la major américaine ExxonMobil.
Le retour à la normale des relations entre les membres du GCC et le Qatar devrait permettre d’instaurer un nouveau rapport de force face à l’Iran alors qu’un axe Téhéran-Pékin se dessine. Malgré ce rapprochement avec ses voisins du golf, le Qatar accélère ses relations économiques avec la Chine, alors même qu’il accueille sur son territoire la plus grande base militaire américaine au Moyen-Orient. L’arrivée de la nouvelle administration Biden, qui a d’ores et déjà annoncé vouloir être plus souple que son prédécesseur sur le sujet Iranien, devrait permettre un apaisement de tensions dans le golfe persique.
Pierre Gonsolin
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