Scaleway, deuxième acteur du cloud français derrière OVHCloud, annonce se retirer du projet de cloud européen Gaia-X. Alors qu’Ursula Von Der Leyen avait fait du projet une des bases de la stratégie des données de l’Union européenne, Scaleway explique ne plus y croire, sur fond d’entrisme des entreprises américaines et chinoises du numérique au sein de Gaia-X.
Officiellement lancé en juin 2020 par une initiative franco-allemande, Gaia-X est un projet européen qui avait pour objectif initial d’ériger une infrastructure de données de façon à garantir la souveraineté des données européennes vis-à-vis des entreprises américaines, sur la base des principes de sécurité, d’interopérabilité et de portabilité. Initialement porté par des entreprises françaises et allemandes telles que Scaleway (fondée par Xavier Niel en 1999 et filiale à 94,8 % du groupe Iliad), OVHCloud, Bosch, SAP ou encore Deutsche Telekom, le projet a grossi pour englober un grand nombre d’entreprises européennes.
Le 18 novembre, alors que la grand'messe du projet, le Gaia-X Summit 2021, battait son plein, Scaleway a jeté un pavé dans la mare en annonçant son intention de ne pas renouveler son adhésion. Il a au passage critiqué la présence de sponsors étrangers à l’évènement tels qu’AWS, Alibaba ou Microsoft. Au-delà de leur simple présence en tant que sponsors, c’est la décision du conseil d’administration de Gaia-X d’accueillir des entreprises américaines et chinoises en son sein qui a fait l’objet de vives critiques du côté des entreprises françaises depuis l’annonce en mars dernier.
D’après Yann Lechelle, directeur général de Scaleway, l’équilibre souhaité entre les acteurs européens et extra-européens n’est pas garanti. Dans une interview pour Challenges, il pointe du doigt la présence permanente des GAFAMs à tous les comités de travail et leur force de frappe en matière de lobbying. Selon lui, les normes promues par Gaia-X sont devenues une “aide à la concurrence américaine au détriment des acteurs européens”. Les critiques à l’encontre de Gaia-X ont trouvé un écho bien au-delà de Scaleway, à l’image du CEO de Jamespot, Alain Garnier, qui dénonce le 19 novembre dans une vidéo l’entrisme des entreprises américaines et chinoises dans les initiatives européennes.
Finalement, même si la décision de Scaleway est un coup dur pour le projet Gaia-X, l’hébergeur devrait poursuivre son projet d’alliance européenne Euclidia. Ce projet rassemble des entreprises de tailles plus modestes, mais se démarque par son souhait de favoriser des solutions cloud 100% européennes. La bataille pour la souveraineté numérique de l’Europe n’est donc pas totalement perdue.
Gabriel Mouchès
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