Nouveau site de production d’Intel en Europe, un choix sous haute tension

Les premiers éléments mentionnés dans la presse au sujet de l’implantation d’Intel en Europe font état de la sélection de l’Allemagne comme nouveau site de production. Les discussions se poursuivraient pour des implantations complémentaires (centre de recherche, assemblage, etc.), notamment en France et en Italie.

L’annonce du Financial Times en Juillet 2021 sur le choix d’Intel, second plus gros producteur de semi-conducteurs au monde au chiffre d'affaires de 72 milliard de dollars en 2020, d’investir en Europe avait attisé la concurrence alors que les rumeurs du choix de l’Allemagne semblent à présent se confirmer. La création d’un nouveau site de production de semi-conducteurs représente un investissement initial de 10 milliards de dollars, qui peut être multiplié par dix en intégrant les extensions successives. Autant dire que l’arrivée potentielle en Europe d’un tel investisseur a suscité l’appétit de très nombreux pays : Allemagne, France, Italie, Pologne, Pays-Bas, Belgique, etc. À l’occasion d’une tournée européenne il y a quelques mois, Pat Gelsinger, CEO d’Intel, a même été reçu par Angela Merkel, Emmanuel Macron et Mario Draghi. 

Au-delà des préférences nationales, il est vrai que la pénurie mondiale de semi-conducteurs pénalise l’Europe comme les autres continents, notamment le secteur automobile. Dans ce cadre, l’ambition de l’Union européenne et de Thierry Breton, Commissaire à l’Industrie, de porter la part de l’Europe de 9 à 20 % dans la production des puces pour réduire sa dépendance vis-à-vis de l’Asie (d’où proviennent plus de 70 % des semi-conducteurs mondiaux), est en phase avec le projet d’Intel de s’implanter sur le continent. 

La sélection de plusieurs pays pour positionner différents types d’activités correspond également à une politique de maximisation des aides de la part d’Intel, sachant que l’Union européenne a aussi indiqué qu’elle était elle-même prête à mettre la main au portefeuille. Mais plus que les aides, c’est l’évolution attendue du marché des semi-conducteurs (un doublement, de 400 à 800 milliards de dollars), qui provoque cette frénésie d’investissement,  qui concerne autant les grands acteurs européens (ST Microelectronics, Soitec, etc.) qu’asiatiques (TSMC, SMIC).

De plus en plus de secteurs utilisent les semi-conducteurs, et chaque secteur en utilise davantage. Dès lors, une approche purement nationale n’est pas suffisante pour endiguer la pénurie générale, qui, de l’avis des spécialistes, devrait au moins durer jusqu’en 2023. Mais la perspective de cette collaboration européenne a remis sur la table l’enjeu stratégique de l’implantation d’Intel. 

 

François Guilbaud

 

Pour aller plus loin : 

Pénurie des semi-conducteurs, vers une redistribution des cartes