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Pétrole mexicain : des ambitions d’indépendance pour 2023

La Commission nationale des hydrocarbures mexicaine a récemment confirmé que le pays serait toujours dépendant des hydrocarbures pour l’année 2023. Cette annonce s’inscrit dans une stratégie du gouvernement pour réaffermir la chaîne de valeur pétrolière du pays en diminuant sa dépendance aux exportations et en attirant les investissements étrangers.

En prévision de l’année à venir, la Commission nationale des hydrocarbures (CNH) a annoncé que le Mexique devrait rester un marché actif dans le secteur pétrolier. Alors qu’en 2022, de nombreuses entreprises avaient cédé leurs blocs pétroliers au gouvernement et que certaines décidaient de recalibrer leur stratégie pour « se concentrer sur d’autres options plus prometteuses » selon la CNH, cette annonce tend à redynamiser un marché en perte de vitesse.

Quatrième pays producteur des Amériques, le Mexique tient une place de grand exportateur de pétrole brut sur la scène internationale. Il fournit en priorité les États-Unis, premier partenaire commercial, qui concentrent 58 % des exportations mexicaines en la matière.

Toutefois, les coulisses de ce statut dissimulent une réalité plus complexe. La principale compagnie pétrolière publique, Petróleos Mexicanos (Pemex), figure comme l’entreprise pétrolière la plus endettée au monde. L’agence de notation financière Fitch Ratings a par ailleurs dégradé la note des devises long terme de l’entreprise de BBB+ à BBB- en seulement un an, restreignant grandement l’attractivité du marché et les investissements dans ce secteur. Sans compter que le volume des importations du pays en produits pétroliers raffinés est récemment devenu supérieur à celui de ses exportations, une première depuis 50 ans. En 2020, ces dernières représentaient 1,1 million de barils par jour (2020), soit dix fois plus que les exportations. De fait, le Mexique connaît une importante diminution de sa production nationale depuis quelques années en lien avec la raréfaction de ses ressources pétrolières et un manque d’investissements privés – qui se traduit par des infrastructures de plus en plus rares ou inefficientes. L’année passée, la pénurie d’équipements nécessaires à l’exploitation des sols avait amené certaines compagnies pétrolières internationales – Eni, Murphy et Shell – à revoir leurs plans de forage. Avec peu de possibilités pour raffiner son pétrole brut, le pays est donc contraint d’importer du carburant pour suffire à ses besoins énergétiques, le rendant particulièrement dépendant de ses fournisseurs.

« Cette volonté politique permettrait à terme au Mexique, de raffermir le contrôle sur l’ensemble de sa chaîne de valeur pétrolière »

Ces facteurs entravent la croissance du marché, poussant le pays d’Amérique latine à pallier les manques de la chaîne de production pétrolière nationale par la signature de contrats avec des entreprises étrangères et l’investissement dans la modernisation et la création de nouvelles raffineries. Le Plan national de raffinage, datant de 2018, force en effet le gouvernement à inverser la tendance, qui jusque-là consistait à exporter la production de pétrole brut pour en importer du raffiné. Cette volonté affirmée permettrait, à termte, de raffermir le contrôle sur l’ensemble de la chaîne de valeur pétrolière du pays, entièrement assurée par Pemex, qui opère à tous les niveaux – de l’extraction à la commercialisation des produits.

Le tournant que prend la politique énergétique du pays peut notamment s'expliquer au regard des relations économiques qu’il entretient avec son voisin du Nord. Considéré comme « l’atelier des États-Unis », le Mexique a fondé sa croissance sur ses échanges économiques avec le pays de l’Oncle Sam, créant – par là même – une relation de profonde dépendance sur de nombreux plans (industrie, agroalimentaire, hydrocarbures…). L’économiste Joseph Stiglitz affirmait d’ailleurs « lorsque les États-Unis éternuent, le Mexique s’enrhume », illustrant clairement la nature des relations entre ces deux pays. Si, à l’heure où les États-Unis concentrent plus de 80 % des exportations totales mexicaines, l’exécutif cherche à ouvrir son marché à l’international pour une meilleure diversification de son économie, il s'agit de déterminer dans quelle mesure les ambitions du Mexique se concrétiseront pour l'année 2023.

 

Sixtine de Faletans

 

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