Face à la lenteur européenne : l’industrie de défense française s’arme seule

La pépite française Exxelia, cruciale pour l’industrie aéronautique et spatiale mondiale, est passée sous giron américain faute de repreneurs français ou européens. En réponse, la société d’investissement Weinberg Capital Partners a annoncé le jeudi 9 février la création d’un fonds dédié à « accompagner le développement des PME et des ETI du secteur de la défense et de la sécurité ».

La défense européenne s’est depuis quelques années convaincue de l’utilité de disposer d’une base industrielle et technologique de la défense (BITD) européenne autonome. Première pierre d’une longue série, le Conseil de l’UE a appelé le 28 juin 2016 à « assumer davantage la responsabilité de notre sécurité ». Pour l’heure, le nouveau programme stratégique européen retient que « L’UE doit se donner les moyens de réaliser ses ambitions, d’atteindre ses objectifs et de mener à bien ses politiques »

En pratique, cette volonté politique se traduit dans la création du fonds européen de défense (FED) ainsi que des programmes de recherches et développement commun (PESCO). Pour l’heure, aucune obligation n’existe – ni aucune incitation d’ailleurs – sur la préférence européenne en termes d’équipement militaire. 

En dépit des critères ESG qui incombent aux entreprises et à la finance des actions éthiques, Serge Weinberg a annoncé l’investissement d’un montant à hauteur de 100 millions à destination de la BITD française. Devant atteindre les 200 millions sous peu, le fonds d’investissement baptisé Eiréné (la paix), cible un ensemble de 4 000 petites entreprises soit 10 % de la base industrielle et technologique de la défense. Le fonds priorise avant tout les technologies ayant déjà acquis une certaine maturité et pouvant avoir une activité duale (à destination du civil comme du militaire). Il a vocation à prendre principalement des positions d’actionnaire majoritaire dans le cadre d’opérations de capital transmission.

Eiréné est appelé à être gérée de façon indépendante. Elle est co-pilotée par deux présidents : Lionel Mestre, et David Lebain, ingénieur de l’armement, passé par Naval Group, l’APE (Agence des participations de l’État) et la DGA. L’ex-patron de la DGA Laurent Collet-Billon, Hervé Guillou, ancien PDG de Naval Group, Philippe Caduc, président de l’Adit, et Philippe Delville, directeur de la sûreté de Capgemini, feront également partie du comité de pilotage.

Face à la passivité relative des mécanismes publics français et européens quant au rachat des PME et ETI stratégiques, les initiatives privées sauront-elles devenir les nouvelles égides de la BITD ?

 

Benoît Lacoux

 

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