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Cap sur le secteur minier : la stratégie de l’Arabie saoudite pour sortir de la rente pétrolière

Fin mars, l’Arabie saoudite a conclu une alliance commerciale avec la Chine, la Russie, l’Inde, le Pakistan, et quatre autres pays d’Asie centrale, afin de s’affranchir de la dépendance au dollar américain. Depuis quelques mois, le Royaume opère son virage vers la Chine, notamment par l’accélération des négociations sur les contrats pétroliers en yuan. En entamant une profonde refonte de son économie, le pays cherche une alternative en développant son secteur minier.

Alors que le surplus budgétaire du pays de l’or noir bat des records en enregistrant une hausse de 8,6 % de son PIB grâce à l’envolée du cours du brent en 2022, le baril atteignant les 100 dollars, le pays projette en parallèle de pérenniser son économie en la diversifiant au profit de l’exploitation de ses ressources minières. L’objectif est de multiplier par trois la contribution du secteur minier au PIB, soit une valeur de 75 milliards de dollars.

L’Arabie saoudite est particulièrement bien dotée en minerais. La Saudi Geological Survey (SGS) a répertorié la présence de plus de 48 minerais dans ses sols, dont du phosphate, de l’or, du cuivre, de l’argent, du zinc, du nickel, du lithium, ainsi que de l’uranium et des terres rares. Cette prospection attire d’ores et déjà l’intérêt d’acteurs étrangers. La Chine, par la China National Nuclear Corporation (CNNC), a ainsi travaillé de concert avec la SGS pour évaluer les ressources en uranium du royaume. 

La refonte de l’économie saoudienne s’inscrit à la fois dans une volonté de diversifier son économie, dans l’anticipation des mouvements de la demande mondiale sur les marchés des minerais, mais également dans des objectifs de développement durable. La Banque mondiale estime que pour atteindre l’objectif de réchauffement climatique inférieur à 2°C d’ici 2050, trois milliards de tonnes de minerais minimum devront être exploitées. L’Arabie saoudite a donc parfaitement intégré le rôle majeur que joueront les métaux dans la transition énergétique, et ce, depuis déjà quelques années.

En effet, cette transition a été lancée en 2016 avec le plan Vision 2030 et le développement du secteur minier s’annonce comme un chantier majeur du National Industrial Development and Logistics Program (NIDLP), pilier économique de la Vision 2030. Côté financement, le Royaume a prévu d’accorder un rôle majeur au Fonds public d’investissement saoudien (PIF) – sixième fonds d’investissement le mieux doté du monde avec 607,42 milliards de dollars d’actifs – placé sous l’égide directe du prince héritier. En parallèle, le pays a lancé un nouveau fonds d’investissement minier qui sera détenu à 49 % par le PIF aux côtés de la compagnie minière nationale Ma'aden, actionnaire majoritaire. 

 

Pour se positionner comme un acteur de référence dans le secteur et améliorer son image, l’Arabie saoudite multiplie les initiatives d’envergure. Riyad a notamment accueilli, début janvier, le Forum sur les minéraux du futur, évènement le plus important en la matière qui a été placé sous le thème de « la promotion des chaînes de valeurs minérales résilientes et responsables pour des impacts environnementaux, économiques et sociaux durables ». Avec un nombre de délégations record venant de plus de 130 pays, ce forum est un succès. Dans cette lancée, le pays a également affiché ses ambitions au forum de Davos à la mi-janvier en envoyant des officiels de premier plan, dont les ministres des Affaires étrangères, de l'Investissement et des Finances. 

Ce chantier économique d'envergure nécessitera d'attirer de nombreux capitaux étrangers susceptibles de soutenir ces investissements. Ainsi, depuis quelques années, le Royaume agit pour valoriser son image auprès des Occidentaux, notamment en investissant massivement dans le milieu du sport (rachat de ESL, Faceit, NewCastle United Football Club, LIV Golf, etc.). Le dernier coup de communication en date est signé par l'arrivée du célèbre joueur Cristiano Ronaldo, ce qui devrait favorablement avancer la position de Riyad pour accueillir la Coupe du monde de football en 2030.

 

Eloïse Calohard

 

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