Le 13 janvier, la Customs and Border Protection (CBP) a annoncé le boycott des États-Unis de produits issus du travail forcé des Ouïghours, dont le coton du Xinjiang, ainsi que tous produits à base de tomate. Cet embargo s’aligne avec les annonces faites le 12 janvier par Londres et Ottawa concernant l’arrêt de l’importation de marchandises directement impliquées dans l’ethnocide.
Selon le chef de la diplomatie britannique, Mr Raab, cette mesure de guerre économique s’oppose à « la détention arbitraire, la rééducation politique, le travail forcé, la torture et la stérilisation forcée” (des Ouïghours) “à l’échelle industrielle ». Dans la foulée, la chaîne de prêt-à-porter britannique Mark & Spencer a inauguré l’application de ces annonces en suspendant la vente de ses vêtements produits à base de coton du Xinjiang. La guerre commerciale s’articule désormais autour d’Ottawa et de Londres, pressant le pas à Washington qui s’est aligné cette semaine. Force est de constater que ce mouvement anglo-saxon fait écho aux accords d’investissement de L’Union européenne avec la Chine en décembre 2020. Ces négociations se sont déroulées au mépris de la Convention de l’Organisation de Travail relative aux travaux forcés que Pékin a refusé de signer. Dans un climat post-Brexit houleux et de guerre économique bipolaire, ces évènements créent un gouffre entre puissances pourtant alliées, repoussant l’Europe au banc des accusés.
Car si la décision paraît profondément économique, elle porte un coup général à l’industrie du textile notamment celle du coton chinois, à l'origine de 20% de la production mondiale. En outre, derrière ces usines d’approvisionnement chinoises se cachent de très célèbres et puissantes marques, dont l’anonymat est facilité par la complexité des chaînes de productions internationales ; parmi celles-ci se trouveraient Apple, Sony, Samsung, Microsoft, Nokia, Adidas, Lacoste, Gap, Nike, Puma, Uniqlo, H & M, BMW, Volkswagen, Mercedes-Benz, Land Rover, Jaguar et bien d’autres.
Ainsi les ennemis de Pékin se servent de ce nettoyage ethnique pour riposter contre ses multiples actes industriels offensifs (espionnage, dumping). Or la République populaire de Chine base ses ambitions sur le capitalisme pour asseoir le communisme. Les coups portés contre son empire commercial visent non seulement à lui faire perdre des parts de marché mais également son image. En effet, le dossier hongkongais lui a valu de vives critiques, tout comme le génocide des Ouïghours dont l’omerta s'est brisé, jusqu'à la disparition de Jack Ma, le fondateur de Alibaba courant d’octobre 2020. La stratégie offensive chinoise est donc à double tranchant pour son industrie, ce qui pourrait profiter à l’Inde qui s’accommode parfaitement d’un échiquier en mutation.
Clémentine Balayer
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