De 12 à 18 Rafale supplémentaires et des Mirage 2000-5 pour l’Indonésie

Le magazine britannique Jane’s, spécialiste des questions de défense, a annoncé le 15 novembre 2022 que l’Indonésie avait contracté un prêt étranger de 3,9 milliards de dollars destiné à financer une nouvelle tranche de 12 à 18 Rafale ainsi que l’acquisition de plusieurs Mirage 2000-5 auprès du Qatar. L’industrie française se trouverait-elle étonnamment favorisée par les sanctions contre la Russie et l’extraterritorialité du droit américain ?

En février 2022, le gouvernement indonésien a conclu un accord avec l’industriel Dassault pour l’acquisition de 42 Rafale, signant ainsi un nouveau succès à l’export pour l’un des fleurons de l’industrie française d’armement. Cependant, le financement du contrat sera réalisé par étape, et l’achat des six premières unités est officiellement entré en vigueur au mois de septembre 2022. L’annonce de ce prêt à hauteur de 3,9 milliards de dollars constitue donc un signal positif pour la réalisation de la suite du contrat, et en l’occurrence pour le financement de 12 à 18 avions supplémentaires par Jakarta. 

Or, seuls 2,9 milliards de dollars seront apparemment dédiés à l’acquisition de ces nouveaux Rafale : le reste du prêt serait, quant à lui, destiné à acquérir plusieurs Mirage 2000-5 (disponibles au nombre de douze) auprès de l’armée de l’air qatarie, qui permettraient notamment aux pilotes indonésiens de se familiariser avec des avions de conception française. Cette annonce constitue alors une double bonne nouvelle pour Dassault, avec notamment l’intégration à venir des Mirage de sa fabrication au sein des forces indonésiennes, et donc de potentielles retombées financières en matière de maintenance. La France renforce ainsi sa position sur le marché de l’armement au sein d’un pays stratégique situé au cœur de l’Indopacifique.  

 

Les sanctions contre la Russie et le droit extraterritorial américain : un atout pour la relation militaire franco-indonésienne ? 

En effet, si l’Indonésie se tourne vers des Mirage 2000-5 d’occasion, cela pourrait également s’expliquer par le besoin d’une solution intérimaire d’urgence afin de préparer le retrait des Su-27 et 30 de fabrication russe actuellement en service au sein de ses forces aériennes, tout en mettant fin à une quelconque dépendance stratégique envers Moscou et à la potentielle difficulté de maintenance induite par les sanctions (par exemple concernant la disponibilité des pièces détachées). De surcroît, l’Indonésie avait choisi en 2021 d’abandonner l’acquisition de Su-35, apparemment afin de ne pas tomber sous le coup de la loi américaine dite CAATSA (Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act), qui autorise notamment le gouvernement américain à prendre des sanctions envers les pays se dotant de matériel militaire russe. Cette décision avait alors conduit à l’ouverture d’un nouvel appel d’offres, suite auquel le Rafale français l’avait emporté face aux propositions américaines… De façon assez surprenante, il semblerait donc que l’extraterritorialité de la loi américaine puisse dans certains cas se révéler bénéfique pour les intérêts industriels français. 

 

Léo Godard

 

Pour aller plus loin :