Mondial de l’automobile 2022 et prédation chinoise sur le marché européen des véhicules électriques

La prééminence des constructeurs chinois de voitures électriques (VE) lors du salon de l’automobile de Paris (2022) traduit la volonté de domination chinoise de ce secteur. Par son libéralisme dogmatique, l’Union européenne facilite les plans chinois, augmente la dépendance de l’Europe envers Pékin et menace gravement l’industrie automobile du vieux continent.

Alors que l’édition 2022 du Mondial de l’automobile de Paris s’est terminé le 23 octobre dernier, le peu de fabricants européens de VE présents ont contrasté avec la prise d’assaut chinoise du salon : Leap Motor, BYD, Great Wall Motors ou encore Seres, pour ne citer qu’eux, exhibaient tous fièrement leurs VE, traduisant la politique industrielle mercantiliste de Pékin qui veut dominer mondialement ce secteur. Avec déjà 10% des parts de marché européens, la Chine a écoulé en Europe 40% des 500 000 VE vendues dans le monde en 2021. Les constructeurs chinois de VE ambitionnent d’être leader sur le marché européen. Quant aux constructeurs européens, beaucoup délocalisent leur production en Chine. Cette situation menace sérieusement la pérennité du secteur européen de l’automobile et représente, pour Pékin, un levier d’influence majeur sur l’Europe. 

 

Les entreprises chinoises jouissent de subventions et d’autres avantages étatiques que les constructeurs européens n’ont pas. Pékin veille ainsi au développement de ses entreprises et protège jalousement son marché intérieur, contrairement à l’UE, qui, avec seulement 10% de tarifs sur les VE chinoises, fait pâle figure en comparaison de la taxe de 27% imposée par les États-Unis sur ces mêmes VE depuis 2018. De plus, beaucoup de pays européens, par le biais des aides à l’achat de VE sans condition d’origine, subventionnent directement les constructeurs chinois, car plus compétitifs que leurs homologues européens. Ce n’est pas le cas des Américains et de leur projet de loi qui conditionne un crédit d’impôt de 7500 dollars à l’achat de voitures électriques fabriquées sur leur territoire, incluant la batterie.  

 

Or si le vieux continent devient un importateur net de voitures, c’est toute l’industrie européenne de l’automobile, et ses milliers d’emplois de qualité, qui sont menacés. Si on ajoute à cela le choix de l’UE d’arrêter la production de nouvelles voitures thermiques d’ici 2035, et donc de céder gracieusement ses parts de marchés à l’étranger à qui veut bien les saisir, sans toutefois utiliser des mesures de défense commerciale pour contrer la Chine sur le marché européen des VE, c’est bien au sabotage de l’industrie européenne de l’automobile que nous assistons.  

Pour finir, outre les conséquences économiques négatives, cette situation fait planer une dépendance additionnelle de l’Europe envers la Chine. En effet, les entreprises chinoises bénéficient du contrôle de Pékin sur la chaîne d’approvisionnement des VE. De l’extraction et la transformation des matières premières (lithium, terres rares, etc.) à la confection des batteries et des voitures électriques, la Chine a la main sur toutes les étapes, contrairement à l’Europe. Il en résulte qu’en cas de conflit géopolitique avec la Chine, Pékin pourra, s’il parvient à ses fins, stopper l’exportation, en Europe, de VE, de batteries électriques ou de matières premières essentielles à leur fabrication. L’écrasante présence chinoise lors du Mondial de l’automobile 2022 est un avertissement limpide, pour qui veut bien le voir, de la volonté de puissance chinoise en Europe.

 

Rémy Carugati

 

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