Le Brésil, nouveau leader sur le marché du coton en 2023 ?

« Nous serons bientôt les plus grands exportateurs du monde, peut-être déjà l’année prochaine » a déclaré Julio Cezar Busato, président de l’association Abrapa (Association brésilienne des producteurs de coton) en décembre 2022. Cette ambition à l’exportation s’inscrit dans une volonté affichée depuis une dizaine d’années de gagner en compétitivité sur ce marché.

Le Brésil est le quatrième pays producteur de coton derrière l’Inde, la Chine et les États-Unis. En 2021, le pays s’est maintenu à la deuxième place des pays exportateurs de la matière première, juste derrière les États-Unis. Pour atteindre leurs objectifs, les agriculteurs brésiliens misent sur les terres déjà allouées à la culture bien installée du soja, qui peuvent être réutilisées pour la culture du coton une fois la première récolte échue, augmentant ainsi considérablement les surfaces agricoles. 

Pour la filière brésilienne, dépasser les États-Unis viendrait signer une revanche dans la longue concurrence que les deux pays se livrent depuis 2002 en la matière. En effet, quelques années après la relance de la production de coton dans le pays, le Brésil a ouvert un litige devant l’OMC concernant les subventions publiques américaines à destination des producteurs et exportateurs de coton, créant ainsi une concurrence déloyale. Si, sept ans plus tard, l’organe de règlement des différends a autorisé le Brésil à prendre des mesures de rétorsion, l’Oncle Sam a obtenu un accord de compensation pour renouveler ces aides au secteur via la Farm Bill en 2014.

Il faut désormais conjuguer avec le pays d’Amérique du Sud, puissance agricole incontournable qui a déjà dépassé les États-Unis en devenant premier exportateur de soja mondial et pourrait être en passe de renouveler ce tour de force pour l’exportation du maïs. Suivi par la Chine, son principal partenaire commercial, le pari des producteurs de coton de s’imposer sur le marché semble atteignable d’ici cinq ans. Déjà en 2021, l’empire du Milieu a été le premier importateur de coton brésilien pour une valeur commerciale dépassant les 53 milliards de dollars. Ce partenariat vient confirmer, du côté chinois, un décrochage entre Pékin et Canberra, la Chine ayant commencé les restrictions d’importations australiennes de coton dès la fin 2020.

Ces ambitions nécessitent des investissements en infrastructures portuaires pour assumer les exportations. Un nouveau terminal portuaire dédié au coton était déjà en projet en 2014. On peut se demander si la Chine y verra un nouvel élan d’investissement dans un contexte où la China Communications Construction Company (CCCC), géant des infrastructures et investisseur de premier ordre dans les routes de la soie, se retire actuellement de nombreux mégaprojets dans le pays.

 

Eloïse Calohard

 

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