L’année 2020 a été marquée par la Covid-19, pandémie qui a bousculé l’économie mondiale. Depuis le mois d’avril les prix du fret maritime se sont brutalement envolés : un casse-tête inédit pour les acteurs maritimes, mais une aubaine pour le développement de la partie terrestre du projet chinois Belt and Road Initiative.
Le confinement a changé les habitudes des consommateurs et a fait s’envoler les taux de fret maritimes via des conteneurs devenus extrêmement coûteux. À défaut de pouvoir circuler librement, les consommateurs ont eu recours de manières intensives au commerce digital, comme en France. Rodolphe Saadé, président-directeur général d’une des plus grandes compagnies d’affrètement mondial CMA-CGM,, explique dans une déclaration au Financial Times que la progression de l’e-commerce a intensifié la demande en fret maritime, les produits étant fabriqués massivement en Chine. Tout ceci a mis à rude épreuve la logistique portuaire dans le monde entier. Le responsable des exportations chez Kuehne + Nagel, Wang Xin déclare que le coût du fret a triplé entre Shanghai et Los Angeles et quadruplé pour les trajets Shanghai-Royaume-Uni.
La pénurie de conteneurs en Europe est l’une des raisons de ce dérèglement. Elle peut s’expliquer par la conjoncture de trois éléments. Premièrement, les flux de conteneurs de l’Europe vers l’Asie ont été maintenus trop longtemps alors que les armateurs ont privilégié le fret entre l’Asie et les États-Unis, empêchant les conteneurs de revenir en Europe rapidement. Deuxièmement, l’augmentation des demandes pour des produits fabriqués en Chine a entraîné une hausse du fret maritime et d’importants défis logistiques pour les terminaux du monde entier. Enfin, la pandémie a poussé les États aux verrouillages partiels des activités, ce qui a eu pour effet de bloquer les conteneurs dans les ports et ainsi de gripper la machine maritime mondiale.
Cette situation a donné l’occasion aux armateurs mondiaux de tirer d’importants bénéfices dans une année qui s’annonçait compliquée. Pourtant, sont-ils vraiment gagnants sur le long terme ? La Chine dispose d'immenses capacités de production, mais elle se trouve bridée par le coût du fret et le manque d'infrastructures et d'équipements portuaires pour répondre à la hausse soudaine du trafic. Ce contexte maritime est un accélérateur pour le versant terrestre du projet Belt and Road Initiative lancé par la Chine en 2013. Alors que le transport maritime était jusqu'alors était privilégié du fait de son faible coût par rapport aux transports routiers et ferroviaires, les conditions actuelles semblent avoir fait partiellement basculer les facteurs temps et coût en faveur du transport terrestre.
Paco Martin
Pour aller plus loin :
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