Le Japon marque sa volonté de s’émanciper de l’Empire du Milieu

Les doubles défis que représentent la Covid-19 et la montée en puissance de la Chine semblent avoir suscité au sein du pouvoir politique japonais une volonté d’émancipation. En 2020, le Japon était ainsi décidé à relocaliser massivement ses entreprises technologiques produisant dans l’Empire du Milieu.

Le 5 mars 2020 lors de la 36e conférence sur les investissements futurs au cabinet ministériel, l’ex-Premier ministre japonais Shinzo Abe marquait la volonté du gouvernement nippon de diversifier ses chaînes d'approvisionnements, notamment en encourageant ses entreprises à quitter le sol chinois. Neuf mois plus tard, selon une étude de Kyodo News, 42% des entreprises japonaises concernées ont entamé une phase de transition épousant les velléités du gouvernement nippon.

L’Empire du Soleil Levant désire rapatrier et diversifier certains de ses chaînons logistiques, le nouveau mot d’ordre étant la résilience. Le ministre japonais de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie, Hiroshi Kajiyama,  a dévoilé le 17 juillet 2020 une enveloppe totale de 243,5 milliards de yens ayant pour objectif de déplacer la production de Chine vers le Sud-Est asiatique. Sur cette somme, 70 milliards de Yens (653 millions de dollars) ont été attribués à 87 entreprises, dont 57,4 milliards de yens (536 millions de dollars) utilisés pour favoriser la relocalisation de la production sur le sol japonais.

Plusieurs éléments sont susceptibles d’expliquer la volonté et l’efficacité du gouvernement nippon. Les problèmes logistiques dus à la pandémie du Covid-19 ont pu servir d’électrochoc. L'avancée visible des ambitions numériques chinoises, ou encore, la guerre commerciale sino-américaine ayant mené aux retraits partiels de certaines sociétés de l’Oncle Sam.

Cette dynamique nippone prend place dans une année de durcissement du Parti communisme chinois sur son secteur privé, une situation étant susceptible de mettre à mal les intérêts des entreprises japonaises. La Chine est le premier partenaire commercial du Japon, et pourtant, le nouveau Premier ministre japonais, Suga Yoshihide, garde le cap d’émancipation tracé par son prédécesseur. Au vu des récents accords signés avec la Grande-Bretagne, l’Union européenne, ou l’Accord de partenariat régional économique global englobant 15 pays asiatiques, le Japon semble vouloir répondre aux défis chinois par le multilatéralisme et une réorganisation industrielle et logistique. Que ce soit par suivisme à l’égard des Américains, ou une politique volontaire d'accroissement de puissance, le Japon semble décidé à s'émanciper de l’”atelier mondial” chinois.  

Paco Martin 

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